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Google freine sur la fin des cookies tiers dans Chrome

Après des années passées à promettre un web plus respectueux de la vie privée, Google revient sur son intention de supprimer les cookies tiers dans son navigateur Chrome. Le projet Privacy Sandbox, censé remplacer ce système de suivi controversé, reste en place, mais son avenir est de plus en plus incertain.

C’est une volte-face discrète mais lourde de conséquences. Google a annoncé cette semaine qu’il renonçait à déployer une fenêtre pop-up dédiée dans Chrome pour inviter les utilisateurs à activer sa solution de remplacement aux cookies tiers, le Privacy Sandbox. Autrement dit, le statu quo est maintenu : les internautes devront eux-mêmes aller dans les paramètres de Chrome s’ils souhaitent limiter le pistage par les cookies.

Un abandon abandonné

« Nous avons pris la décision de conserver notre approche actuelle concernant le choix des cookies tiers dans Chrome », écrit Anthony Chavez, vice-président de Privacy Sandbox chez Google. « Les utilisateurs peuvent continuer à faire leur choix dans les paramètres de confidentialité et de sécurité du navigateur. »

Annoncée en grande pompe dès 2019, la disparition progressive des cookies tiers devait initialement entrer en vigueur en 2022. Mais après plusieurs reports, Google avait fini par proposer une transition plus souple, laissant aux utilisateurs le choix d’accepter ou non ce pistage. Désormais, même ce compromis n’ira pas plus loin.

Pourquoi ce revirement ? Google évoque des « perspectives divergentes » sur l’abandon des cookies, ainsi qu’un contexte réglementaire mouvant. La firme est actuellement au cœur de plusieurs batailles judiciaires, notamment aux États-Unis, où la justice estime qu’elle détient un monopole dans la publicité en ligne. Un juge fédéral a même suggéré que Google pourrait être contraint de céder certaines de ses activités, y compris son navigateur Chrome.

Côté technique, les retours du secteur publicitaire n’étaient guère plus encourageants. Plusieurs partenaires de Google, comme BidSwitch ou Index Exchange, ont signalé des problèmes de compatibilité entre le Privacy Sandbox et l’architecture complexe de la publicité en ligne, qui repose sur des échanges entre multiples acteurs en temps réel. Résultat : les tests ont pris du retard, et les éditeurs ont privilégié des solutions plus rentables à court terme.

Google assure néanmoins que le Privacy Sandbox n’est pas abandonné. Des éléments du projet, comme l’IP Protection en navigation privée, doivent toujours être lancés, notamment au troisième trimestre 2025. L’entreprise promet aussi de « recueillir les retours de l’industrie » et de proposer une nouvelle feuille de route « dans les mois à venir ».

Si la promesse d’un web plus respectueux de la vie privée est reportée, c’est aussi parce que Google marche sur un fil. Supprimer les cookies tiers sans solution viable reviendrait à déstabiliser tout un pan du financement d’internet. Et imposer sa propre alternative trop rapidement risquerait d’attirer l’attention des régulateurs, déjà méfiants.

En attendant, les cookies tiers continuent d’alimenter les campagnes de ciblage publicitaire, au grand dam des défenseurs de la vie privée. Quant au Privacy Sandbox, il reste pour l’instant un projet en suspens, coincé entre ses ambitions techniques, une certaine prudence politique et les réalités économiques.

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