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Une étude suggère que l’Univers tourne sur lui-même, et ça pourrait tout changer

Des chercheurs ont accouché d’un modèle mathématique qui suggère qu’une rotation de l’Univers tout entier pourrait permettre de résoudre le problème de la tension d’Hubble, un paradoxe majeur torture les astrophysiciens depuis des décennies.

La Terre tourne, le Soleil tourne, la Voie lactée tourne… et c’est peut-être aussi le cas de l’Univers tout entier, si l’on en croit une étude récemment publiée par des chercheurs hongrois. Une interprétation qui, si elle est confirmée, pourrait aider les spécialistes à lever un point de friction majeur de l’astrophysique moderne.

On sait depuis près d’un siècle que notre univers s’étend au fil du temps. Les experts cherchent donc à calculer la vitesse de cette expansion — et c’est là que les problèmes commencent : il se trouve que les différentes méthodes de mesure ne parviennent pas à se mettre d’accord sur cette valeur.

D’un côté, certaines observations se basent sur les positions relatives des Céphéides, des étoiles extrêmement lumineuses qui servent de balises aux astronomes pour calculer la distance entre deux régions du cosmos. En effectuant ce genre de mesures régulièrement, on peut donc déterminer le rythme d’expansion de l’univers. Sur la base des travaux menés en 1929 par l’illustre Edwin Hubble et ses collègues, les physiciens modernes considèrent aujourd’hui que notre monde gonfle à une vitesse d’environ 73 kilomètres par seconde par mégaparsec — un nombre appelé constante d’Hubble-Lemaître.

Au fil des décennies, les astrophysiciens ont imaginé d’autres méthodes pour calculer cette fameuse constante. La mission Planck de l’ESA, par exemple, se base sur l’observation des vestiges électromagnétiques du Big Bang. Dans l’idéal, les deux approches devraient dû aboutir au même résultat… mais ce n’est pas le cas en pratique. La seconde produit des chiffres significativement différents, à savoir environ 67 km/s/mpc. On se retrouve avec une incohérence majeure que l’on appelle la Tension d’Hubble. Et à ce jour, personne n’a encore réussi à prouver rigoureusement d’où elle provient.

Et si l’Univers tournait sur lui-même ?

Les hypothèses tombent globalement dans deux catégories distinctes. Il pourrait simplement s’agir d’une erreur systématique, soit dans les mesures, soit dans la méthodologie en elle-même. Une conclusion pas particulièrement spectaculaire, certes, mais tout de même importante, car elle renforcerait considérablement les modèles cosmologiques modernes.

L’autre possibilité, en revanche, est nettement plus excitante : la tension d’Hubble pourrait aussi être due à un phénomène physique encore jamais identifié, susceptible de redéfinir tout ce que l’on sait de l’histoire et de la dynamique de l’Univers. Et c’est précisément dans cette catégorie que tombe la proposition des auteurs de cette nouvelle étude.

En explorant différentes pistes sur l’origine de la tension, ces chercheurs ont pris le parti de modifier un paramètre très important. Au lieu de travailler avec un univers relativement homogène, comme le font l’archimajorité des modèles actuels, ils ont considéré qu’il tournait en fait sur lui-même. Et lorsqu’ils ont appliqué les méthodes citées plus haut pour mesurer la vitesse d’expansion de cet univers virtuel, ils ont constaté avec étonnement que cette modification permettait de réconcilier les deux approches. En d’autres termes, ils ont montré mathématiquement que la tension d’Hubble pourrait disparaître dans un univers en rotation.

« À notre grande surprise, nous avons constaté que notre modèle avec rotation résout le paradoxe sans contredire les mesures astronomiques actuelles. Mieux encore, il est compatible avec d’autres modèles qui supposent une rotation », explique István Szapudi, auteur référent de l’étude, dans un communiqué.

Un concept pas si aberrant que prévu

Ce dernier point est particulièrement important. En effet, ce n’est pas la première fois que l’idée d’un Univers en rotation pointe le bout de son nez. Mais les hypothèses de ce genre ont tendance à être rapidement rejetées, pour deux raisons. En premier lieu, elles semblent souvent incompatibles avec les observations du fond diffus cosmologique — un rayonnement électromagnétique que l’on considère comme une relique du Big Bang.

En outre, elles ont tendance à reposer sur l’existence de boucles spatio-temporelles fermées (ou plus rigoureusement, de courbes causales fermées). Un concept certes fascinant, mais qui pulvériserait une grande partie des fondations de la physique telle qu’on la conçoit aujourd’hui, comme l’importantissime principe de causalité.

En montrant que la théorie d’un univers en rotation pourrait être compatible avec les observations du monde réel, et sans pour autant nous forcer à reconstruire l’ensemble de la physique moderne, les auteurs de l’étude ont donc défriché une piste de recherche aussi prometteuse qu’intéressante. Cette idée ferait émerger un tas de questions subsidiaires plus fascinantes les unes que les autres, à commencer par l’origine de la force immense qui serait nécessaire faire tourner l’ensemble de la matière existante.

Une piste prometteuse qu’il va falloir creuser

Mais comme toujours en science, il serait très indélicat de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Avant d’aller plus loin, il va falloir commencer par valider rigoureusement ce modèle, ce qui ne sera pas une mince affaire.

Selon l’équipe, la première étape consistera à créer une simulation informatique à très grande échelle d’un univers en rotation à l’aide d’un supercalculateur. Cela permettra au moins de vérifier si ce modèle mathématique, qui reste finalement une simplification, tient la route au niveau le plus superficiel avant de plonger de plus en plus profondément vers le cœur du problème.

Quoi qu’il en soit, le processus de vérification s’annonce aussi fascinant que l’hypothèse en elle-même, et il sera très intéressant de suivre les retombées de cette étude.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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