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Voici le premier hologramme tactile et interactif au monde

Cette preuve de concept n’est pas encore entièrement mature, mais il s’agit tout de même d’un pas en avant pour cette technologie qui se rapproche un peu plus de la science-fiction jour après jour.

Des chercheurs espagnols viennent de présenter une preuve de concept impressionnante : ils ont conçu le tout premier système d’affichage holographique qui peut être touché et manipulé.

Les hologrammes sont un grand classique de la science-fiction, où ils servent souvent de mode de communication ou de système de contrôle. Mais à l’heure actuelle, ces images flottantes en trois dimensions sont encore assez éloignées de ce qu’on trouve dans des œuvres comme Star Wars.

Une technologie complexe

Ce qu’on appelle la lumière est en fait une forme particulière d’onde électromagnétique. Cette onde se propage en suivant des motifs bien précis, qui dépendent notamment de la forme et de la texture de l’objet sur lequel elle rebondit. Ces motifs sont représentés dans ce qu’on appelle le front d’onde, une surface qui représente les points où la lumière a la même phase à un instant donné. En pratique, créer un hologramme revient donc à recréer le front d’une onde lumineuse ayant « touché » un objet.

Pour l’enregistrer, on utilise une deuxième onde lumineuse de référence qui, lorsqu’elle rencontre l’onde provenant de l’objet, génère des interférences. Ces dernières peuvent alors être utilisées comme une représentation indirecte de l’objet ; à partir de là, en combinant plusieurs lasers d’une manière bien spécifique grâce à différents modèles mathématiques, on peut reconstituer le front d’onde original, de façon à ce que nos yeux le perçoivent comme une reconstruction de l’objet en trois dimensions.

Le souci, c’est que cette technique nécessite de capturer les motifs d’interférence avec une résolution extrêmement élevée, ce qui est difficile à réaliser en pratique. La plupart des vrais hologrammes sont donc de petite taille, et cantonnés aux laboratoires de recherche qui disposent d’équipements optiques de pointe.

Et la complexité du problème augmente encore de manière exponentielle lorsqu’il s’agit d’interagir avec ces hologrammes. Pour espérer les manipuler, il faut concevoir un système optique encore plus élaboré. Il doit aussi être soutenu par un ordinateur assez puissant pour résoudre de nombreuses équations complexes en temps réel, comme les fameuses transformations de Fourier. Cela explique pourquoi les rares projecteurs holographiques commerciaux comme ceux de Voxon ou Brightvox, qui même s’ils sont très impressionnants, se limitent à des hologrammes relativement petits, à la résolution plutôt faible, et non-interactifs.

Les premiers hologrammes interactifs

C’est là qu’interviennent les auteurs de cette nouvelle étude. Ils ont conçu un système pseudo-holographique qui ne permet pas de faire apparaître une image au milieu d’un espace vide, mais qui offre tout de même la possibilité de la manipuler en temps réel.

Pour construire ce système, les chercheurs ont recyclé le concept de diffuseur volumétrique. Ce terme désigne un système qui repose sur la persistance rétinienne — le phénomène à cause duquel les images mettent environ 1/18 de seconde à disparaître après avoir été projetées sur la rétine. On peut exploiter cette persistance en projetant une image sur une surface qui oscille très rapidement. On crée ainsi de nombreuses « couches » de lumière différentes, que le cerveau interprète comme une représentation 3D complète de l’objet.

Le problème, c’est que les diffuseurs de ce genre sont généralement rigides. Il est donc impossible d’interagir avec l’image ; introduire un doigt dans l’espace où elle apparaît bloquerait le diffuseur, empêchant l’image en trois dimensions de se former. L’équipe a donc conçu un diffuseur extrêmement fin et surtout élastique, qui se déforme au lieu de s’arrêter ou de se casser lorsqu’il rencontre un autre objet.

La difficulté, c’est que cette approche change radicalement la manière d’aborder la projection de l’image. Puisque la surface se déforme, il faut aussi ajuster cette projection en temps réel afin qu’elle reste cohérente avec la surface du diffuseur. C’est cette étape qui a demandé le plus de travail aux chercheurs, qui ont dû modéliser le comportement de la surface avec une grande précision pour corriger l’image finale. Mais ces efforts ont payé : au bout du processus, ils ont obtenu le premier diffuseur volumétrique interactif au monde, qui permet par exemple de faire pivoter la représentation de l’objet en la pinçant.

De vraies applications concrètes

Certes, le système reste plutôt brut de décoffrage — il faut admettre que le résultat est assez éloigné de ce que l’on décrit généralement comme un hologramme. Mais il s’agit néanmoins d’un premier pas très intéressant qui, une fois peaufiné, pourrait tout de même avoir un intérêt concret — même dans sa forme actuelle.

Les auteurs proposent par exemple de s’en servir à des fins d’éducation. Un apprenti mécanicien pourrait l’utiliser pour visualiser l’assemblage d’un moteur, tandis qu’un étudiant en chirurgie pourrait manipuler directement une représentation anatomique d’un patient. L’équipe cite aussi les musées, où ce genre d’appareil pourrait offrir aux visiteurs une nouvelle façon d’observer des objets trop précieux pour être exposés à l’air libre.

En attendant que de vrais hologrammes libres et interactifs fassent leur apparition, il sera intéressant de voir si cette technologie réussit à se trouver une petite place dans un de ces domaines.

Le texte de l’étude en prépublication est disponible ici.

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