Passer au contenu

Il pourrait bientôt être plus difficile de se faire rembourser en cas de vol en retard

Il serait bientôt plus compliqué de se faire indemniser en cas de vol en retard ? C’est en tout cas ce qui pourrait arriver si l’Union européenne adopte une modification du règlement EU 261. Actuellement, les passagers ont droit à une compensation si leur vol est retardé d’au moins trois heures. Mais un projet en discussion voudrait repousser ce seuil à cinq heures, ce qui changerait la donne pour beaucoup de voyageurs.

La Pologne, qui assure depuis janvier la présidence du Conseil de l’Union européenne, a fait de cette réforme l’une de ses priorités, selon Le Monde. L’objectif est de répondre à la multiplication des recours en justice intentés par les passagers depuis vingt ans, à mesure que le trafic aérien s’intensifie, notamment grâce aux compagnies low-cost. Les transporteurs aériens font pression depuis des années pour obtenir une révision du système, et il semblerait que les institutions européennes commencent à les écouter.

Des indemnisations revues à la baisse

Sebastian Loerke, représentant du lobby Airlines for Europe (A4E), qui regroupe des compagnies comme Air France-KLM, Lufthansa ou Ryanair, ne cache pas son enthousiasme : « Cette révision est quelque chose que l’on attend depuis longtemps et que l’on soutient de toutes nos forces. »

Mais du côté des défenseurs des droits des passagers, le ton est tout autre. Karima Delli, ancienne présidente de la commission transports du Parlement européen, s’inquiète : « Les droits des passagers risquent d’être vraiment affaiblis. »

Jusqu’à présent, les indemnisations allaient de 250 à 600 euros selon la distance du vol. Avec le nouveau projet, non seulement le seuil de retard serait allongé, mais les indemnisations elles-mêmes pourraient être ajustées.

La Commission européenne propose par exemple une compensation de 250 euros pour un vol retardé de plus de cinq heures et de 3.500 km ou moins. Pour un retard de neuf heures sur un vol de plus de 3.500 km, la somme grimperait à 400 euros. Enfin, au-delà de douze heures de retard, il faudrait attendre un vol de plus de 6.000 km pour toucher les 600 euros.

Le Parlement européen prévoit des montants similaires, mais avec quelques variations. Pour Karima Delli, ces changements sont surtout bénéfiques aux compagnies : « La plupart des retards sont compris entre trois et cinq heures », souligne-t-elle. Autrement dit, la majorité des passagers impactés par un retard risquent de ne plus rien percevoir.

Au-delà de la question du seuil de retard, les compagnies rêvent aussi d’un autre changement : mieux définir les « circonstances extraordinaires » qui justifient une indemnité. Actuellement, ce sont souvent les tribunaux qui tranchent, et dans de nombreux cas, les décisions sont favorables aux passagers. Airlines for Europe plaide pour une liste précise et mise à jour régulièrement, ce qui pourrait permettre aux compagnies d’éviter certaines indemnisations.

Derrière cette bataille réglementaire, il y a aussi une question d’argent. Le montant total des indemnisations atteint plus de 3 milliards d’euros par an, voire 4 milliards selon certaines estimations. Et depuis quelques années, les passagers font de plus en plus appel à des agences de recouvrement comme Flightright ou AirHelp, qui se chargent des démarches contre une commission de 25 à 50 %. Ces entreprises ont permis à des millions de voyageurs d’obtenir gain de cause, mais elles sont aussi devenues une menace pour la rentabilité des compagnies aériennes.

L’avenir de cette réforme se jouera dans les prochains mois. Les amendements au projet de loi doivent être déposés d’ici le 25 mars, avant un vote du Parlement européen en juin. Le Conseil européen, quant à lui, prévoit d’affiner sa position le 6 juin lors d’une réunion ministérielle. Reste à voir si les passagers sortiront gagnants de cette négociation, ou si les compagnies aériennes sauront imposer leurs conditions.

🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.

Mode