La DARPA, l’agence américaine de recherche et de développement de la Défense américaine, est connue pour sa propension à explorer des projets particulièrement originaux, même s’ils n’arrivent pas toujours à maturité. Drones sous-marins, robots et lasers militaires, trains sur la Lune… Il faut admettre que les ingénieurs de l’institution ont de la suite dans les idées. Et récemment, ils sont revenus à la charge avec un nouveau concept encore plus exotique que d’habitude : faire « pousser » d’immenses structures spatiales biomécaniques.
Les contours de ce concept sont assez flous. Mais en pratique, il semble que la DARPA envisage d’utiliser des processus biologiques pour faire émerger spontanément de grandes structures, au lieu de les assembler avec des techniques conventionnelles comme la soudure.
Pour ce faire, les ingénieurs pourraient s’appuyer sur différents types de micro-organismes extrêmophiles, c’est-à-dire capables de survivre dans des conditions insupportables pour la plupart des êtres vivants. On peut citer l’exemple des tardigrades, de véritables petits tanks biologiques qui ont déjà prouvé leur capacité à survivre dans le vide impitoyable de l’espace.
Mais pour contribuer à un tel projet, les organismes candidats devraient aussi être capables de produire des polymères structuraux, fonctionnellement comparables à la cellulose (le principal constituant des cellules de nombreux végétaux). Autant dire qu’il va falloir intégrer une bonne dose d’ingénierie génétique à cette équation déjà très compliquée.
Un concentré de technologies émergentes
Cette idée s’est progressivement immiscée dans la boîte à idées de la DARPA à cause des progrès spectaculaires de certaines disciplines de pointe, notamment du côté de la science des matériaux et de la bio-ingénierie. Toutes ces nouvelles techniques pourraient permettre de créer les organismes nécessaires à un tel projet.
« Compte tenu des avancées récentes en matière d’ingénierie métabolique pour une croissance rapide, des organismes extrêmophiles aux propriétés nouvelles, des propriétés d’auto-assemblage biologique de matériaux ajustables et des principes émergents de conception mécanique des systèmes biologiques, la DARPA souhaite explorer la faisabilité de la “croissance” de structures biologiques de taille sans précédent en microgravité », a expliqué l’agence dans un document repéré par Astrobiology.com.
En s’appuyant sur ces technologies à fort potentiel, l’agence souhaite poser les bases d’un nouveau mode de construction pour créer des structures spatiales aux proportions énormes, bien au-delà de ce qui est possible avec les techniques conventionnelles. Le tout sans avoir à dépêcher le moindre travailleur humain sur place.
« Parmi les exemples de structures qui pourraient être fabriquées et assemblées biologiquement, mais qui pourraient être impossibles à produire de manière traditionnelle, on peut citer des câbles d’ascenseur spatial, des filets pour la capture des débris orbitaux, des interféromètres à l’échelle kilométrique pour la radioscience, de nouvelles ailes auto-assemblées d’une station spatiale commerciale, ou la production à la demande de matériaux de réparation pour réparer les dommages causés par les micrométéorites », énumère la DARPA.
Un concept encore très, très loin d’être mature
Même pour la DARPA, qui est coutumière des projets très exotiques, celui-ci semble particulièrement tiré par les cheveux. Nous sommes encore très loin d’avoir ne serait-ce qu’un début de plan viable pour lancer une telle opération; à l’heure actuelle, le concept relève de la science-fiction pure et simple.
Mais la DARPA estime que les avantages potentiels seraient suffisamment importants pour que la discussion mérite d’être lancée. L’agence organisera donc un colloque en avril prochain, afin que différents chercheurs et institutions puissent discuter de leurs idées sur cette thématique. Il sera donc intéressant de voir si quelque chose d’intéressant va ressortir de cet événement, et le cas échéant, comment la DARPA s’y prendra pour lancer des recherches concrètes sur le sujet.
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