Lorsqu’on pense aux nombreux concepts d’androïdes sur lesquels travaillent de plus en plus d’entreprises, le réflexe est généralement de mentionner des engins comme l’Atlas de Boston Dynamics ou l’Optimus de Tesla, qui deviennent de plus en plus performants année après année grâce à leurs prouesses en termes de mobilité.
Mais il existe aussi d’autres entreprises qui ont adopté une approche assez fascinante, plus organique, qui imite l’architecture du corps humain. Et cette niche est en train de passer un véritable cap : la preuve avec le Protoclone de Clone Robotics, un androïde aussi flexible que dérangeant.
Même s’ils ont chacun leurs spécificités, Atlas et ses homologues présentent tous un point commun : les équivalents du squelette, des muscles et des autres éléments fonctionnels de l’anatomie sont tous métalliques. Clone Robotics, en revanche, a développé une technologie appelée « Myofiber », basée sur un système de muscles pneumatiques. En pratique, il s’agit de poches en polymère remplies de fluide qui sont mises en mouvement par une puissante pompe électrique.
Plus vrai que nature, pour le meilleur…
Cela donne une apparence beaucoup plus humaine au robot, du moins par rapport à ses concurrents conventionnels. De loin, on pourrait même le confondre avec une représentation grandeur nature de la musculature humaine destinée à des chercheurs ou des étudiants… ou à la dernière victime d’un serial killer, selon votre interprétation.
Et la différence est aussi remarquable d’un point de vue mécanique et fonctionnel. Pour l’instant, cette première itération n’est même pas encore capable de se tenir debout. À l’heure actuelle, le prototype reste suspendu par des câbles au milieu d’un laboratoire ; ce n’est pas demain la veille que le Protoclone va enchaîner les sprints et les cabrioles avec la même fluidité qu’Atlas et consorts. En outre, ses mouvements ressemblent davantage aux spasmes d’un pauvre hère possédé par un démon qu’à ceux d’un humain en chair et en os. Cette présentation très brute de décoffrage, loin des vidéos soignées proposées par les startups américaines, n’aide décidément pas à le rendre engageant.
Mais une fois le choc visuel passé, il faut admettre que sa façon de bouger est déjà bien plus organique que celle de ses concurrents conventionnels. A terme, cette approche pourrait permettre au robot de réaliser des mouvements particulièrement fins et convaincants. Il nous tarde déjà de voir ce dont il sera capable une fois le concept arrivé à maturité.
…et pour le pire
Comme Optimus et les autres engins du genre, le Protoclone a vocation à devenir un assistant domestique capable de porter vos courses, de plier votre linge, et ainsi de suite. Mais si l’on fait abstraction du côté novateur de cette technologie, on peut toutefois se demander si l’idée est véritablement pertinente. En effet, ce n’est pas seulement pour contourner des obstacles technologiques que la plupart des startups ont délibérément pris leurs distances avec le modèle du corps humain.
Notre cerveau est conditionné pour reconnaître instantanément un visage et les caractéristiques qui le définissent. Il est particulièrement doué pour identifier une foule de détails que l’on ne perçoit pas consciemment, comme l’infime asymétrie que l’on retrouve dans la structure de tous les visages et des expressions. Par contre, dès que l’on supprime ces subtils marqueurs de notre humanité, la supercherie devient absolument criante, sans qu’on puisse pointer du doigt une difformité évidente. On appelle ce phénomène la vallée de l’étrange.
L’approche de Tesla, Boston Dynamics et compagnie, qui consiste à ne conserver que la forme globale du corps, permet d’éviter ce phénomène qui a tendance à générer un certain malaise chez les observateurs. Protoclone, en revanche, risque d’avoir bien plus de mal à s’en défaire. Son recours aux matériaux flexibles, qui évoquent immédiatement un être vivant, pourrait être assez rédhbibitoire pour une partie du public. Avec tout ce que cela implique en termes de succès commercial. On parle d’un engin censé nous accompagner au quotidien, mais aurait-on vraiment envie de tomber nez à nez avec cet écorché pâlichon au détour d’un couloir ? Cela reste à démontrer.
Dans tous les cas, l’entreprise va devoir fournir de gros efforts sur la partie esthétique pour espérer vendre son androïde. Reste que d’un point de vue strictement technologique, il s’agit néanmoins d’un projet assez fascinant qui mérite d’être suivi de près. Rendez-vous d’ici quelques années pour voir si cette approche basée sur la biomécanique gagnera en traction, ou si le Protoclone restera au stade de la preuve de concept.
🟣 Pour ne manquer aucune news sur le Journal du Geek, abonnez-vous sur Google Actualités. Et si vous nous adorez, on a une newsletter tous les matins.