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L’incroyable secret de la Banque de France : pendant près de dix ans, l’État a diffusé une fausse monnaie !

Yannick Colleu, expert en métaux précieux, a fait une découverte susceptible de vous faire perdre toute confiance en l’État lorsqu’il s’agit des finances publiques. Selon lui, entre 1951 et 1960, l’État français a mis en circulation des millions de “vraies fausses” pièces d’or.

La France d’après-guerre, entre ruines et espoirs fragiles

Pour comprendre l’origine de cette affaire, il faut replonger dans le contexte de la France de l’immédiat après-guerre. Le pays sort de six années de conflit. Les caisses sont vides, l’économie est à reconstruire, et la confiance dans la monnaie nationale, le franc, est fragile. L’un des piliers de cette reconstruction économique et de la stabilité monétaire réside dans les réserves d’or. Malheureusement, celles-ci ont été largement fondues pour financer l’effort de guerre.

La France, comme d’autres nations, est alors liée par les accords de Bretton Woods, signés en 1944. Ces accords ont instauré un nouveau système monétaire international, faisant du dollar américain la monnaie de référence, la seule directement convertible en or. Toutes les autres devises, y compris le franc, étaient définies par rapport au dollar, et donc, indirectement, par rapport à l’or. Maintenir une parité stable entre le franc et le dollar était donc crucial, non seulement pour la crédibilité économique de la France sur la scène internationale, mais aussi pour faciliter les échanges commerciaux et attirer les investissements étrangers.

La situation devient encore plus tendue lorsque la France contracte, en 1952 et 1954, deux emprunts d’État dont le remboursement est indexé sur la valeur de l’or. Cela signifie que si le cours de l’or venait à augmenter, le coût de remboursement de ces emprunts monterait lui aussi, mettant en péril les finances publiques déjà fragiles. La stabilité du marché de l’or n’est alors plus seulement une question économique, elle devient un véritable enjeu politique.

L’opération “Faux Napoléons” : Une solution audacieuse, mais illégale

Dans ce contexte de crise, le ministre des Finances de l’époque, confronté à une pénurie d’or et à la nécessité de stabiliser le marché, prend une décision radicale et, rétrospectivement, illégale. Il ordonne, avec l’aval plus ou moins formel de la Banque de France, la fabrication de copies de pièces de 20 francs d’or, les célèbres “Napoléons”, également connues sous le nom de “Coqs” en raison du coq gaulois frappé sur l’une de leurs faces.

Ces pièces, frappées entre 1907 et 1914, avaient été démonétisées en 1926, c’est-à-dire qu’elles n’avaient plus cours légal. Pourtant, leur design est repris à l’identique, y compris les millésimes. L’opération est menée dans la plus grande discrétion, sans décret officiel, ce qui est tout à fait inhabituel. Une simple lettre du ministre des Finances à la Banque de France suffit à lancer la production.

Le Fonds de Stabilisation des Changes, l’organisme chargé de réguler le marché de l’or, est au cœur du dispositif. C’est lui qui va utiliser ces “fausses” pièces pour intervenir sur le marché, achetant ou vendant de l’or (ou plutôt, des “faux Napoléons”) afin de maintenir les cours à un niveau acceptable et d’éviter une spéculation excessive qui pourrait déstabiliser le franc.

Les objectifs de cette manœuvre risquée

L’opération “Faux Napoléons” poursuivait plusieurs objectifs, tous liés à la stabilisation de l’économie française :

Premièrement, il s’agit de contrôler le marché de l’or. En injectant massivement ces pièces sur le marché, le Fonds de Stabilisation des Changes peut influencer les cours et éviter une flambée des prix. Une telle flambée aurait des conséquences désastreuses, non seulement sur la parité franc-dollar, mais aussi sur le coût de remboursement des emprunts indexés sur l’or, aggravant encore la situation financière du pays.

Deuxièmement, et c’est là un point controversé soulevé par Yannick Colleu, l’opération aurait permis à l’État d’économiser une quantité non négligeable d’or. Selon l’expert, les “fausses” pièces auraient une teneur en or légèrement inférieure à celle des pièces originales. La différence, bien que minime à l’échelle d’une seule pièce (897,3 millièmes d’or fin au lieu de 900 millièmes), devient significative lorsqu’on la multiplie par les 37,5 millions de pièces fabriquées. Au total, l’État aurait ainsi économisé environ 654 kilogrammes d’or fin. La Banque de France conteste formellement cette affirmation, arguant que les pièces étaient conformes aux tolérances de fabrication de l’époque et que l’usure naturelle des pièces peut expliquer une légère perte de masse.

Quand la rumeur devient scandale

Malgré le soin apporté à la fabrication de ces copies, des détails finissent par trahir leur véritable nature. Les professionnels du marché de l’or, habitués à manipuler ces pièces, remarquent des différences subtiles. Les “faux Napoléons” sont trop brillants et trop neufs comparés aux pièces originales qui, même bien conservées, portent généralement les traces du temps. De plus, Yannick Colleu affirme que leur couleur est légèrement différente, plus rouge, en raison d’un alliage contenant un peu plus d’argent et un peu moins d’or.

La rumeur enfle, et en janvier 1952, la Banque de France est contrainte de sortir de son silence. Elle publie discrètement un communiqué pour tenter de justifier la présence de ces pièces sur le marché, une communication de crise qui ne fait qu’attiser les soupçons.

Un Héritage Controversé

L’affaire des “faux Napoléons”, bien que largement oubliée du grand public, a des ramifications juridiques et fiscales qui perdurent jusqu’à aujourd’hui.

Sur le plan pénal, la fabrication de fausse monnaie, même démonétisée, est un délit. L’article 442-3 du Code pénal français est clair à ce sujet. L’action de l’État français dans les années 1950 serait donc, si elle était jugée aujourd’hui, considérée comme criminelle.

Sur le plan fiscal, la situation est complexe. Yannick Colleu dénonce le fait que ces “fausses” pièces sont taxées lors de la revente comme de vraies monnaies d’or, avec une taxe de 11,5% sur le prix de vente. Selon lui, ces pièces devraient être considérées comme de simples jetons, et donc bénéficier d’une exonération de taxe jusqu’à 5000 euros. La Banque de France, de son côté, maintient sa position : ces pièces ont toujours été traitées comme de vraies monnaies lorsqu’elle intervenait sur le marché de l’or, et la taxation actuelle est donc justifiée.

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