Chronologie des médias : Canal+, Disney+ et Netflix… ce qui change en 2025

L’arrivée des services de diffusion en continu par abonnement a bouleversé le secteur culturel, et particulièrement du côté de la chronologie des médias. Il y a trois ans, cette règle qui définit l’ordre et les délais d’exploitation d’un film sur les différents canaux (TV payante, TV gratuite ou VOD), connaissait une modification importante pour s’adapter à un secteur en constante mutation. Longtemps relégués en bas de la chaîne des priorités, Netflix, Disney+ et consorts espéraient profiter de fenêtres de mise à disposition plus avantageuse. Avant 2022, il leur fallait patienter 36 mois après la première exploitation avant d’ajouter un film à leurs catalogues.

Trois ans pour découvrir le dernier Marvel sur Disney+ ou les productions Warner Bros sur Max, la situation avait de quoi créer des frustrations chez les entreprises du secteur qui ne pouvaient pas tirer profit de leurs métrages à destination des salles obscures. Pour les spectateurs, cette attente avait aussi le désavantage de les priver d’une opportunité de rattraper les propositions cinématographiques manquées en salles. Après plusieurs mois de négociations, plutôt houleuses, la chronologie des médias de 2022 offrait à Disney+, Apple TV+, Prime Video ou encore Max une opportunité de diffuser leurs productions après 17 mois. Un peu moins d’un an et demi, la réforme a fait grincer quelques dents, mais le mot d’ordre en décembre 2024 semblait être à la conservation des règles en vigueur pour permettre d’en évaluer plus précisément les bénéfices. Chez Disney, par exemple, l’on se disait prêt à jouer selon ses règles encore un peu plus longtemps.

Néanmoins, la firme aux grandes oreilles est passée à l’offensive pour profiter d’une fenêtre plus avantageuse. La plateforme a signé deux accords avec les organisations du cinéma et de l’audiovisuel. En échange d’un plus grand investissement dans la création française (25% de son chiffre d’affaire en France), l’entreprise s’offre le droit d’ajouter ses productions cinématographiques dès 9 mois. Huit mois plus tôt que précédemment et seulement trois mois après Canal+, l’opération rebat les cartes. Retour sur les changements et comment cela affectera les spectateurs.

Disney+ en première ligne

Disney+ ne mise pas essentiellement sur ses séries originales pour se rendre séduisante aux yeux des abonnés. À la différence de Netflix, la plateforme peut compter sur les activités de ses studios pour alourdir les rayons de son offre. Mais voilà, alors que Disney+ peut proposer les nouveautés Marvel, Star Wars et Pixar quelques semaines après leur exploitation dans le pays de l’oncle Sam, la maison de Mickey doit patienter beaucoup (beaucoup) plus longtemps dans l’Hexagone. Ces délais étaient d’ailleurs l’un des points de frictions lors des négociations en 2022. Disney avait menacé de priver les salles françaises de Black Panther : Wakanda Forever en représailles. Finalement, le film Marvel aura investi le grand écran… pas le film d’animation Avalonia qui devait sortir quelques jours plus tard.

Dès l’année 2025, les abonnés Disney+ pourront profiter des métrages de toutes les écuries mentionnées plus haut moins d’un an après leur sortie. Il leur faudra patienter neuf petits mois pour découvrir ou redécouvrir les hits promis à une sortie au cinéma. Pour référence, la fenêtre de Canal+ se situait à huit mois avant la révision de 2022. Disney+ profite d’un nouvel avantage pour faire de ces sorties un véritable événement : le divorce avec Canal+. Maintenant, Disney+ dispose de la première mise à disposition en streaming par abonnement alors qu’elle devait autrefois partager la lumière avec le replay amélioré de MyCanal.  Il n’aura pas fallu attendre très longtemps pour que ces accords portent leurs fruits. Dès le 25 avril prochain, les abonnés Disney+ pourront accéder au dernier Marvel en date : Deadpool & Wolverine.

Netflix, rien ne change pour le moment

En 2022, Netflix avait réussi à négocier une belle fenêtre à 15 mois, contre 17 pour ses rivaux. Ce traitement de faveur n’aura pas duré, Netflix est en deuxième position aux dernières nouvelles. Elle devrait continuer de bénéficier des mêmes délais, n’ayant pas l’ambition d’investir plus dans la création française. La situation n’est pas vraiment du goût de la firme qui évoquait déjà en 2024 un temps d’attente trop long pour les utilisateurs et pas adapté au marché. Au micro de Tech & Co, Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce expliquait :  “On est passé de 36 mois à 15, c’est un saut quantique, mais qui est encore beaucoup trop longs quand on regarde les usages de par le monde où, dans la plupart des pays, on est plutôt à trois mois, un mois et demi“.

17 mois pour Apple TV+, Max et Prime Video

Les derniers acteurs du marché ont adopté une approche différente. C’est le cas d’Apple TV+ qui a rejoint la liste des entreprises ayant signé un accord avec les organisations du cinéma et de l’audiovisuel, sans pour autant négocier pour des délais raccourcis. La firme s’est néanmoins engagée à contribuer à la création française au même titre que les autres services établis en France. La firme de Cupertino rejoint ainsi la liste des entités qui participent à faire éclore des œuvres hexagonales. Selon l’ARCOM, Disney+, Netflix et Amazon ont dépensé 866 millions d’euros sur le territoire dans la production de contenus depuis 2021. L’autorité de régulation espère que l’arrivée d’Apple TV+ permettra d’inciter les autres entreprises à lui emboîter le pas.

Canal+, la grande inconnue de l’équation

Peu de choses devraient changer avec la nouvelle chronologie des médias, la situation avec Canal+ représente la plus grande inconnue de l’équation. Comme l’on pouvait s’en douter, la firme n’est pas ravie de voir l’entreprise dont elle vient de se séparer la talonner. Canal+ et Disney+ n’ont pas renouvelé leur accord, il prévoyait que le service américain soit disponible via les bundles proposés par la chaîne cryptée et que les films Walt Disney Studios soient proposés en priorité sur MyCanal. Selon l’entreprise de Maxime Saada, ces nouvelles dispositions créent un déséquilibre des forces. Le PDG du Groupe Canal Plus a ainsi laissé entendre qu’une diminution de l’enveloppe attribuée à la création française et européenne n’était pas impensable.

“Cette offre n’est plus sur la table aujourd’hui. De mon point de vue, elle baissera nécessairement, et la question, c’est de combien”.  Le premier financeur du cinéma français explique : “C’est là où on a un petit sujet : si Disney est à neuf mois pour 38 millions d’euros (par an), pour Canal+ il y a un sujet des 220 millions d’euros à six mois”. Les discussions se poursuivent, mais il paraît peu probable que Canal+ parvienne à négocier une fenêtre plus avantageuse.

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