La Lune qui accompagne notre Terre depuis sa plus tendre enfance est généralement considérée comme géologiquement morte depuis belle lurette. Une nouvelle étude remet désormais cette conclusion en question ; il semble finalement qu’elle était encore active bien plus récemment qu’on ne le pensait jusqu’à présent.
Notre bonne vieille planète bleue fait partie des corps célestes géologiquement actifs. Cela signifie que ses entrailles regorgent de chaleur résiduelle, produite pendant l’épisode d’accrétion extrêmement énergétique qui a conduit à sa formation. Depuis, cette chaleur interne se manifeste régulièrement à travers des phénomènes comme le volcanisme ; chaque éruption est une preuve indiscutable que notre planète est géologiquement active.
Sur la Lune, en revanche, personne n’a jamais observé la moindre éruption volcanique en direct. On sait toutefois que la situation était bien différente » il y a plusieurs milliards d’années. On sait par exemple que les mers lunaires, comme la fameuse Mer de la Tranquillité, sont recouvertes d’une épaisse couche de matériel basaltique qui correspond à de la lave solidifiée. Les planétologues ont aussi identifié de grandes crêtes rocheuses sur la face visible de la Lune ; selon toute vraisemblance, elles ont été formées par des événements de compression vaguement comparables à ce que produit la tectonique des plaques terrestre.
Mais tous ces vestiges géologiques remontent à deux ou trois milliards d’années, et la situation ne semble pas avoir beaucoup évolué entre cette époque et la nôtre. On considère donc que la Lune est plus ou moins géologiquement morte.
Mais voilà : Ce qu’ils savent de l’histoire géologique de la Lune, les planétologues l’ont surtout appris en étudiant sa surface stérile, soit depuis l’orbite, soit directement depuis la surface grâce à des missions comme Apollo 11. Cela signifie que des éléments de contexte importants pourraient encore se cacher dans les profondeurs — et c’est précisément ce que suggèrent trois géologues américains dans une nouvelle étude.
Des structures géologiques 20 fois plus récentes que prévu
Dans leur papier, ils expliquent avoir passé en revue 266 crêtes rocheuses auparavant inconnues, toutes situées sur la face cachée de la Lune. À première vue, elles n’ont pas grand-chose de très intéressant ; elles sont en effet situées dans une région qui s’est formée il y a un peu plus de 3 milliards d’années. Intuitivement, on pourrait donc penser que ces crêtes datent de cette époque.
Par acquit de conscience, le trio a cherché à vérifier cette information en utilisant une méthode bien connue : le comptage de cratères. En effet, puisque la Lune est dépourvue d’une atmosphère dense comme celle de la Terre, elle est constamment pilonnée par de nombreux astéroïdes qui s’écrasent régulièrement à la surface, laissant derrière eux des cratères bien visibles. Plus le temps passe, et plus ils deviennent nombreux ; par extension, plus une surface est ancienne, plus elle est généralement constellée de cratères (à moins qu’un autre phénomène géologique n’ait modifié la structure du terrain plus tard). En résumé, on peut déterminer l’âge d’une région donnée avec une bonne précision en analysant les propriétés (nombre, taille…) de ces cratères à l’aide de modèles statistiques.
Au terme de leur analyse, les chercheurs ont constaté que la densité des cratères est étonnamment faible dans la zone autour de ces crêtes. En appliquant les outils statistiques mentionnés plus haut, ils en ont même déduit que la roche était âgée d’environ 160 millions d’années à peine ! Cela suggère très fortement que la Lune présentait des processus tectoniques, et donc qu’elle était encore géologiquement active, bien plus récemment qu’on ne le pensait.
Des données intéressantes pour les astronautes
Il sera très intéressant de voir si de futures études pourront établir un lien entre ces structures et les différents types de moonquakes, ces secousses qui parcourent régulièrement la surface de la Lune. Mais en plus de nous offrir de nouveaux éléments de contexte sur l’Histoire de notre satellite, ces travaux pourraient aussi avoir des implications très concrètes. Les auteurs mentionnent notamment l’importance de connaître les aléas de la géologie lunaire pour assurer le bon déroulement des futures missions d’exploration et de colonisation.
« Nous espérons que les futures missions vers la Lune incluront des outils tels que le radar à pénétration de sol, afin que les chercheurs puissent mieux comprendre les structures sous la surface lunaire », explique Jaclyn Clark, co-autrice de l’étude. « Le fait de savoir que la Lune est encore géologiquement dynamique a des implications très réelles sur l’endroit où nous prévoyons de placer nos astronautes, notre équipement et nos infrastructures sur la Lune », conclut-elle.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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