Il faudra y réfléchir à deux fois avant d’exposer fièrement votre nouvelle voiture sur les réseaux sociaux. Non sans certaines réserves, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a finalement validé les nouvelles méthodes du Fisc et des douanes pour renforcer l’arsenal de vérification de la fraude fiscale. Dans certains cas bien précis, les agents de l’administration pourront désormais aspirer et analyser les données publiées sur les réseaux sociaux, notamment à travers l’utilisation d’outils automatisés boostés à l’intelligence artificielle.
Qu’est-ce qui change ?
C’est dans un décret adopté le 31 décembre 2024 et publié le lundi 1ᵉʳ janvier 2025 au Journal officiel que les choses ont été officialisées. Concrètement, le dispositif vient simplement étendre les prérogatives de l’administration fiscale, qui était déjà en mesure de traquer les piscines non déclarées via Google Maps, et les ventes suspectes sur les sites de location et de seconde main, comme Airbnb, Leboncoin ou Vinted.
Depuis trois ans, la surveillance des activités en ligne s’est intensifiée, prenant des airs de grande expérimentation à ciel ouvert pour le Fisc. Si la CNIL émettait à l’époque de sérieuses réserves, elle a fini par admettre “des garanties satisfaisantes“, tout en restant prudente sur les conditions d’application réelles du dispositif. Reste que la méthode a porté ses fruits. Désormais autorisés à créer de faux profils sur les sites de vente pour traquer les mauvais payeurs, certains contrôleurs des finances publiques dûment habilités ont accès à un arsenal de nouveaux outils pour détecter la fraude.
De nouveaux outils boostés à l’IA
Plus concrètement, il s’agira pour le fisc de s’assurer que le train de vie déclaré par les contribuables correspond bien à celui affiché sur les réseaux sociaux. Voitures de luxe, montres ou sacs de créateurs, vacances à l’étranger ou résidence secondaire non déclarées… l’objectif sera aussi d’identifier les personnes qui vivent dans l’Hexagone, alors qu’elles prétendent être domiciliées à l’étranger pour échapper à l’impôt sur le revenu.
Pour arriver à leurs fins, les agents du fisc auront toutefois certaines obligations : ainsi, ils ne pourront exploiter que les données accessibles publiquement en ligne. La CNIL rappelle en effet que ces données sont limitées aux “contenus librement accessibles et manifestement rendus publics par les utilisateurs“, et que les messages privés ne pourront donc pas être utilisés comme preuve de fraude devant un tribunal. Le décret précise aussi que la collecte de données ne pourra avoir lieu que dans le cadre de suspicions précises concernant “certaines infractions limitativement énumérées par la loi“. Cela concernera cependant aussi bien les particuliers que les entreprises, qui pourront être poursuivies pour “minorations ou dissimulations de recettes”.
Des garanties pour la vie privée
Au milieu de ce nouveau dispositif, la CNIL a toutefois réclamé quelques garanties nécessaires, qui devraient permettre d’éviter les abus en tous genres. Dans un premier temps, les agents assermentés ne pourront pas utiliser des “identités d’emprunt” lorsqu’ils collectent des données sur les réseaux sociaux. Ils devront ainsi clairement indiquer leur fonction, et le caractère professionnel de leur compte. Il sera également interdit de récolter des données depuis des sites sensibles, comme des plateformes de rencontres, ou médicales. De quoi rassurer (un peu) les sceptiques.
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