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NASA : entre le PRIMA et l’AXIS, la guerre des télescopes a commencé

Les équipes d’ingénieurs et de chercheurs derrière ces deux concepts de télescopes de pointe vont passer l’année 2025 à défendre leur dossier auprès de la NASA pour gagner le droit de déployer un nouvel observatoire spatial majeur.

Pour étudier le cosmos, les astronomes peuvent s’appuyer sur des télescopes spatiaux de pointe comme le fameux James Webb, ce bon vieux Hubble, ou encore Chandra et Fermi. Un nouveau nom va bientôt s’ajouter à cette liste prestigieuse : il s’agira soit du PRIMA ou de l’AXIS, deux concepts très prometteurs qui vont s’affronter à distance pour obtenir une place dans l’armada scientifique de la NASA.

Ces deux projets ont émergé d’un long processus de sélection préliminaire à travers lequel la NASA a choisi les deux engins qui lui semblaient les plus intéressants — mais elle ne va en financer qu’un seul. Les deux équipes vont donc devoir passer l’année 2025 à travailler d’arrache-pied pour démontrer le potentiel de leur projet grâce à une dotation préliminaire de 5 millions de dollars. Au terme de processus, l’agence américaine va sélectionner un grand gagnant qui sera déployé à l’horizon 2032.

Deux appareils à fort potentiel

D’un côté, nous avons le PRIMA (Probe far-Infrared Mission for Astrophysics), un engin imaginé par le prestigieux centre Goddard de la NASA en collaboration avec d’autres chercheurs américains et européens. Il a vocation à observer l’univers dans l’infrarouge extrême. Cela lui permettra de récolter des informations précieuses sur la formation et la composition des planètes, l’évolution des galaxies, ainsi que les flux de poussière interstellaire et d’éléments lourds qui façonnent le cosmos.

Prima Telescope Nasa
Un rendu 3D du télescope PRIMA. © NASA/JPL–Caltech/ESO/S. Brunier

De l’autre, on trouve l’AXIS (Advanced X-Ray Imaging Satellite), un projet né à l’Université du Maryland. Contrairement au PRIMA, il sera plutôt spécialisé dans les rayons X. Il se concentrera notamment sur l’observation des trous noirs supermassifs situés au centre des galaxies les plus anciennes repérées par le James Webb. C’est également un sujet particulièrement prometteur, car de telles observations pourraient nous offrir des informations inédites sur la dynamique de l’Univers précoce et sur la manière dont il a évolué jusqu’à aujourd’hui.

Axis Telescope Nasa
Un rendu 3D de l’AXIS. © Edmund Hodges-Kluck/NASA GSFC

« Les deux concepts pourraient ouvrir la voie à de la science révolutionnaire répondant aux principales priorités astrophysiques de la décennie, nous aidant à développer des technologies clés pour les futures missions phares », a déclaré Nicola Fox, administratrice adjointe du directoire scientifique de la NASA. Autant dire que le choix s’annonce cornélien, car les deux engins disposent d’arguments très sérieux.

Y a-t-il un favori ?

À première vue, il semble que l’AXIS dispose d’un léger avantage à cause de sa fréquence de prédilection.

En effet, à l’heure actuelle, il n’y a qu’un seul observatoire spatial majeur qui est capable d’observer dans le domaine des rayons X : Chandra. C’est un engin fabuleux qui a contribué à des tas de découvertes absolument majeures depuis son déploiement en 1999. Malheureusement, sa vétusté devient de plus en plus criante à chaque jour qui passe. Son plus gros problème, c’est son revêtement d’isolation qui se dégrade à vue d’œil. Il est donc extrêmement compliqué de maintenir les instruments à une température acceptable. Par conséquent, il est de plus en plus cher et difficile à opérer, si bien que la NASA envisage de le mettre en pré-retraite dans un futur proche.

Une perspective terrifiante pour de nombreux astronomes, qui ont multiplié les tribunes et les lettres ouvertes pour demander à la NASA de le garder sous perfusion. Car dans le cas contraire, ils ne disposeraient plus du moindre observatoire de pointe dans le domaine des rayons X — une grosse lacune qui aurait des implications particulièrement lourdes sur la production scientifique globale.

James Webb Space Telescope
Les deux engins pourraient tous les deux devenir des partenaires privilégiés du fabuleux JWST. © NASA GSFC/CIL/Adriana Manrique Gutierrez

Mais être un successeur potentiel de Chandra ne suffira pas à remporter le contrat de la NASA, car le PRIMA travaillerait lui aussi dans une gamme de fréquences sous-exploitée. À première vue, sa spécialisation dans l’infra-rouge pourrait sembler redondante, sachant qu’il s’agit de la spécialité du formidable James Webb Space Telescope qui ne cesse de repousser les limites de l’astrophysique.

Mais il ne s’agirait en fait pas d’un doublon. Sa cible, l’infrarouge extrême, se positionne en effet à mi-chemin entre les fréquences de prédilection des radiotélescopes terretstres et du James Webb. Le PRIMA pourrait donc aussi former un couple détonnant avec ce dernier.

Pour l’heure, il est donc pratiquement impossible de livrer un pronostic ; les deux concepts  seraient capables de produire de la science de haute volée, et le verdict final dépendra essentiellement de ce que les deux équipes vont réussir à montrer d’ici à 2026. Nous vous donnons donc rendez-vous à la fin de l’année prochaine pour savoir lequel de ces deux télescopes gagnera un budget d’un milliard de dollars ainsi que le droit de rejoindre l’armada spatiale des astrophysiciens au début de la prochaine décennie.

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