Au cours de leurs séjours qui durent une moyenne de six mois, les astronautes de la Station spatiale internationale génèrent une quantité substantielle de déchets. Faute d’être une priorité dans cet avant-poste scientifique, la gestion de ces ordures n’a jamais vraiment été optimisée. Mais cela va bientôt changer avec l’arrivée d’un tout nouveau compacteur qui va changer la logistique de l’ISS et poser les bases d’une nouvelle organisation pour les futures missions de longue durée.
Cet engin construit par la startup américaine Sierra Space est appelé Trash Compaction and Processing System (TCPS). Comme son nom l’indique, sa première mission sera de compacter les ordures produites à bord de la station pour réduire leur volume de 75 %, contre 30 à 50 % pour le système actuel. Cela facilitera l’évacuation de ces déchets.
En effet, les détritus non recyclables sont généralement entassés dans une des capsules cargo qui livrent régulièrement des vivres et du matériel, comme les Dragons de SpaceX ou les Progress russes. Une fois rempli à raz-bord, le véhicule est détaché de la station, puis réexpédié vers la surface. Il se retrouve alors incinéré avec sa cargaison pendant la rentrée atmosphérique. Avec un compacteur plus efficace, l’équipage pourra donc bénéficier d’une marge de manœuvre supplémentaire en termes d’espace — une ressource extrêmement précieuse dans cet environnement.
Le recyclage, une nécessité absolue
Mais le TCPS n’est pas qu’un simple compacteur à ordures. La principale innovation, c’est qu’il permettra aussi de les traiter pour répondre à deux problèmes majeurs.
Le premier, c’est la disponibilité des ressources. En effet, certains de ces détritus contiennent des éléments précieux, à commencer par le plus vital d’entre tous : l’eau. Jusqu’à présent, l’extraire de ces déchets n’a jamais été une priorité. La proximité avec la Terre fait qu’il est relativement simple d’en acheminer à bord de la station pour que l’équipage n’en manque jamais.
Mais nous nous rapprochons de plus en plus d’un futur où des humains entreprendront des expéditions beaucoup plus longues pendant lesquelles ils ne pourront pas dépendre de la Terre. Recycler la moindre particule de liquide deviendra donc vital. L’ISS dispose déjà d’un système qui permet par exemple de recycler l’urine des astronautes en eau parfaitement pure et potable — mais à terme, il faudra aller beaucoup plus loin.
C’est là qu’interviennent les systèmes comme le TCPS. À l’aide d’un système sophistiqué qui implique plusieurs étapes de filtration, de pressurisation et de filtration mécanique, il est capable d’extraire la moindre trace d’humidité présente dans les déchets sous forme d’eau pure. Elle pourra ainsi être réinjectée dans la cabine pour maintenir l’humidité de son atmosphère artificielle. Alternativement, il sera aussi possible de la condenser sous forme de liquide potable. En effet, les tests en laboratoire ont révélé que le processus de purification était très performant, et que l’eau ainsi produite présente un niveau d’activité biologique extrêmement faible et compatible avec la consommation.
Mais l’eau ne sera pas la seule ressource susceptible d’être ainsi réutilisée. Les briques de déchets produites à partir de certaines fournées triées au préalable pourraient aussi être utilisées directement sur place. Au lieu de les incinérer dans l’atmosphère, la NASA estime qu’elles pourraient par exemple servir à construire un bouclier autour d’un vaisseau pour protéger l’équipage des rayonnements cosmiques cancérigènes.
Eviter la pollution
En plus du recyclage, le TCPS pourra aussi aider les astronautes à gérer une autre problématique centrale : la pollution, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur. En effet, les déchets biologiques produits par l’équipage peuvent représenter une vraie menace, surtout lors d’une mission de longue durée comme un voyage vers Mars. Inutile d’expliquer que la moindre infection pourrait avoir des conséquences absolument catastrophiques. Cette machine sera donc salvatrice dans ce contexte, puisqu’elle permettra aussi de stériliser les briques de détritus pour pouvoir les stocker sans risque.
C’est particulièrement important, car la santé des astronautes n’est pas le seul enjeu de cette démarche. Si c’était le cas, l’équipage pourrait tout simplement larguer ses ordures par dessus bord dans le vide de l’espace. Mais on prendrait alors le risque de contaminer irrémédiablement des environnements extraterrestres, avec des conséquences potentiellement importantes pour le futur des sciences et de l’exploration spatiale.
Un premier test en conditions réelles dès 2026
Si tout se déroule comme prévu, le TCPS sera expédié à bord de l’ISS à l’horizon 2026. Il sera alors testé rigoureusement pour vérifier qu’il est aussi prometteur en conditions réelles que pendant les essais en laboratoire. En cas de succès, il servira sans doute de modèle pour les systèmes de traitement et de recyclage dont les astronautes dépendront lors des futures missions de longue durée.
« Les voyages spatiaux à long terme nécessitent l’utilisation efficace de chaque once de matériau et de chaque pièce d’équipement. Chaque décision prise concernant un vaisseau spatial peut avoir des conséquences considérables, et la gestion des déchets devient une question de survie et d’intégrité de la mission », a déclaré Tom Vice, PDG de Sierra Space, dans un communiqué de presse repéré par Universe Today. « Nous relevons ce défi grâce à l’innovation technologique et à notre engagement en faveur de la durabilité dans toutes les facettes des opérations spatiales. Une élimination efficace, durable et innovante des déchets est essentielle au succès de l’exploration spatiale en équipage. »
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