Le Soleil commence en ce moment à aborder le pic de son cycle d’activité de 11 ans. Une période qui coïncide généralement avec une augmentation substantielle du rythme et de l’intensité des phénomènes tels que les éruptions solaires, ces décharges de rayons X et gamma extrêmement intenses associées à la rupture d’une ligne de champ magnétique à la surface de l’étoile. Et d’après Spaceweather.com, un site spécialisé dans le suivi de la météo spatiale, l’astre vient justement d’émettre l’éruption solaire la plus puissante depuis le début du cycle actuel.
Les éruptions solaires sont classées à l’aide d’une nomenclature un peu particulière. Elle commence par une lettre (A, B, C, M ou X) qui désigne la catégorie de puissance. A désigne les plus petites ; à l’opposé, X désigne les éruptions les plus violentes. La définition officielle explique qu’elles sont susceptibles de « déclencher des blackouts radio à l’échelle de la planète et des tempêtes de radiations prolongées “. Cette lettre est assortie d’un chiffre qui représente l’ampleur de l’éruption au sein de cette catégorie. Plus le chiffre augmente, plus elle est intense.
Deux éruptions majeures en une semaine
La dernière éruption solaire est originaire d’une tache solaire du groupe AR3842 — une localisation qui a déjà fait parler d’elle le premier octobre dernier en émettant une puissante éruption classée X 7,1. Il s’agissait donc d’un phénomène extrêmement énergétique, mais pas autant que celui qui a eu le hier, le 3 octobre : nous avons eu droit à une nouvelle éruption majeure, cette fois classée X 9,05.
Les éruptions solaires de cette intensité sont rares ; les spécialistes n’en ont enregistré qu’une poignée depuis le début du millénaire. Elles sont aussi particulièrement violentes. Pour rappel, elles sont décrites à l’aide d’une échelle logarithmique, comme l’échelle de Richter qui classe les séismes ; ce nouvel épisode est donc largement plus intense que celui qui a eu lieu en début de semaine. En fait, elle hérite même de la 15e place dans la base de données moderne de SpaceWeatherLive, un autre site spécialisé dans le référencement de ces phénomènes.
De superbes aurores…
Ces deux épisodes ont aussi donné naissance à ce qu’on appelle des éjections de masse coronale — de vastes bulles de plasma qui propulsées à très grande vitesse. Et il se trouve justement que ces deux objets ont pris la direction de la Terre. Notre planète va donc subir deux déluges de rayonnements de haute énergie.
Ces particules chargées vont interagir avec le champ magnétique terrestre et lui transférer une partie de leur énergie, produisant ainsi ce qu’on appelle une tempête géomagnétique. C’est une très bonne nouvelle pour les chasseurs d’aurores, puisque ces événements ont tendance à augmenter drastiquement l’intensité de ces superbes phénomènes lumineux.
et quelques perturbations au programme
Mais on ne peut pas en dire autant des systèmes de communication. En effet, l’ionisation locale de l’atmosphère associée à l’impact de la CME peut avoir un impact significatif sur la propagation des ondes radio, ce qui peut conduire à un blackout dans la zone concernée.
C’est aussi problématique pour les opérateurs de satellites. En effet, les composants électroniques ne font pas bon ménage avec ces particules chargées en règle générale. La plupart des appareils sont protégés par la magnétosphère, et ne courent donc pas de risque majeur. Mais les satellites sont nettement plus exposés, puisqu’ils évoluent à une altitude où l’intensité de ce champ magnétique protecteur est moins élevée.
Still early days following the X9 solar flare from sunspot region 3842 which is the strongest solar flare of Solar Cycle 25 thus far but we do have some preliminary SOHO/LASCO coronagraph imagery from SEEDs right now. We see the beginning of a very nice halo coronal mass ejection… pic.twitter.com/tJsr6Tk6es
— SpaceWeatherLive (@_SpaceWeather_) October 3, 2024
En plus des risques pour l’électronique embarquée, l’impact d’une CME peut aussi chauffer significativement l’ionosphère et la thermosphère, ce qui a pour effet d’augmenter le volume des gaz les plus denses. Et c’est très embêtant pour les satellites positionnés sur des orbites relativement basses. Cette expansion peut augmenter leur friction avec l’atmosphère, conduisant à une perte d’altitude progressive qui force les opérateurs à réagir. Cet été, une puissante éruption solaire a d’ailleurs donné lieu à la plus grande migration de satellites de l’histoire. Autant dire que les opérateurs seront sur le qui-vive à l’approche de ces nouvelles CME.
D’après les modélisations de NASA, la première devrait avoir touché la Terre aujourd’hui, et ne semble pas avoir eu de conséquences dramatiques pour le moment ; il n’y a donc quasiment aucune chance qu’elle fasse des dégâts avant de s’estomper complètement. Mais la seconde éjection de masse coronale, celle qui est associée à cette fameuse éruption de classe X9, est attendue le 6 octobre. Le pire pourrait donc encore être à venir.
Pas d’apocalypse solaire à prévoir
Il n’y a toutefois pas de raison de céder au catastrophisme. Un éventuel blackout radio devrait s’estomper assez rapidement, et les industries qui dépendent de ce mode de communication disposent de procédures pour limiter l’impact de ces perturbations sur leurs activités. Les chances qu’un avion s’écrase à cause d’une CME, par exemple, sont quasiment négligeables.
En outre, même si cette éruption solaire est effectivement très intense, elle n’est tout de même pas assez puissante pour causer de gros dégâts sur les équipements électroniques à la surface. Pour en arriver là, il faudrait une éruption de classe X10+, comme le fameux Événement de Carrington en 1859 — la plus grosse éruption solaire jamais documentée (voir notre article ci-dessous).
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Ah ! (c’est toujours comme ça…) ; il a fallu que je loue la qualité rédactionnelle, pédagogique et imagée d’Antoine Gautherie à mon tout dernier post (pour tous ceux que j’avais lus), pour qu’à celui-ci je lui tire un peu les oreilles d’en laisser certains en plan (dont moi…) avec son acronyme C.M.E. !.. (et 4 dans l’article, s’you plaît !..).