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Voyager 2 : la NASA forcée de sacrifier un instrument de la sonde légendaire

Tout comme sa soeur Voyager 2 arrive en bout de course et manque cruellement d’énergie. Ses opéraeurs ont donc été forcés de mettre un de ses instruments à la retraite pour prolonger sa durée de vie.

La légendaire sonde Voyager 1 n’a pas eu la vie facile ces derniers temps ; la NASA a bien failli la perdre à plusieurs reprises. C’est seulement grâce au talent et au dévouement d’une équipe d’ingénieurs aux petits soins qu’elle a pu sortir d’une situation quasiment désespérée cet été — un véritable petit « miracle ». Malheureusement, sa sœur n’est pas non plus dans une situation enviable ; tout récemment, l’agence américaine a été forcée de désactiver un des instruments scientifiques de Voyager 2, dont les réserves d’énergie diminuent à vue d’œil.

À l’heure où ces lignes sont écrites, la sonde évolue à un peu plus de 20 milliards de kilomètres de la Terre. Et même si elle ne peut pas s’enorgueillir des records ou de l’album photo historique de Voyager 1, à qui l’on doit notamment les premières « photos de famille » du système solaire ou encore le légendaire « pale blue dot », elle continue d’apporter des données à la NASA en sondant inlassablement les tréfonds du cosmos.

Pale blue dot
En plissant les yeux, on peut repérer un “pale blue dot” au milieu d’une trainée claire; il s’agit de la Terre vue par Voyager 1 depuis les confins du système solaire. © NASA / JPL-Caltech

Des données uniques menacées par un manque d’énergie

Ces données sont incroyablement précieuses. En novembre 2018, Voyager 2 est devenu le deuxième engin à quitter la zone d’influence des vents solaires pour s’aventurer dans l’espace interstellaire — un exploit que seule sa jumelle avait accompli auparavant et qui n’a jamais été répliqué depuis. Elle rapporte donc des informations pratiquement uniques qui poussent les ingénieurs à la maintenir en vie aussi longtemps que possible. Malheureusement, il devient de plus en plus difficile de maintenir ce régime. Car après quasiment 50 ans de travail, le matériel arrive lentement mais sûrement en bout de course.

Les réacteurs nucléaires des deux engins, en particulier, commencent à montrer des signes de faiblesse. Chaque année, leur production d’énergie diminue d’environ 4 watts, et ils ne sont désormais plus capables de produire suffisamment d’énergie pour alimenter l’ensemble des sous-systèmes. La NASA a donc désactivé tout le matériel superflu, comme certains radiateurs, afin de prolonger l’autonomie autant que possible. Mais même avec ces économies, la situation devient critique, mettant les opérateurs face à des choix cornéliens.

Le Plasma Science Instrument rend son dernier souffle

Dans le cas de Voyager 2, les ingénieurs de la NASA ont désormais été forcés de désactiver un de ses quatre instruments de bord pour préserver les autres. Leur choix s’est porté sur le Plasma Science Instrument, qui mesure l’intensité et la direction des flux de plasma qui parcourent l’espace.

C’était autrefois un des éléments les plus importants de la sonde ; c’est notamment grâce à lui que les ingénieurs ont pu confirmer que Voyager 2 avait officiellement pénétré dans l’espace interstellaire, quand la densité de plasma originaire du Soleil a chuté de façon particulièrement brutale.

Voyager 2
Voyager 2 dans les locaux du Jet Propulsion Lab, quelques mois avant le grand départ. © NASA

Depuis cette phase de transition, l’instrument se montre peu productif. Il ne rapporte des données utiles que tous les trois mois. Par conséquent, la NASA a déterminé qu’il s’agissait du maillon faible, et décidé de le désactiver pour que les autres instruments puissent continuer de faire leur office.

La commande fatidique a été envoyée le 26 septembre dernier. Elle a mis environ 19 heures à atteindre la sonde par l’intermédiaire du Deep Space Network. Après 19 heures supplémentaires, la NASA a reçu la confirmation que Voyager 2 avait bien reçu ce signal : le détecteur est officiellement hors service.

La bonne nouvelle, c’est que Voyager 2 n’a pas totalement perdu sa capacité à analyser le plasma interstellaire. Un autre instrument, le Plasma Wave Subsystem, est aussi capable d’estimer sa densité. La mauvaise, c’est qu’il le fait de manière indirecte, et qu’il ne bénéficie donc pas du même niveau de précision que le PSI. Par conséquent, il ne s’agit pas d’une perte négligeable, surtout que la sonde jumelle est également privée de cet instrument depuis belle lurette ; le Plasma Science Instrument de Voyager 1 a cessé de fonctionner dès les années 1980. Dans l’ensemble, la mission Voyager a donc perdu une part substantielle de sa capacité à produire des données.

La fin est proche, mais l’aventure continue

Au moins, cette concession permettra à la sondes de continuer à opérer pendant quelques années supplémentaires… mais il faudra encore faire d’autres sacrifices pour maximiser sa durée de vie. À l’heure actuelle, la NASA estime que Voyager 2 pourra continuer d’opérer jusqu’au début de la prochaine décennie, mais avec un seul instrument opérationnel. Deux sources de données supplémentaires vont donc être désactivées à leur tour sur les prochaines années.

Et pour atteindre cet objectif, il faudra aussi compter sur un petit coup de pouce du destin. Les mésaventures de Voyager 1, qui a encore dû être sauvée in extremis au début du mois de septembre, montre bien que la mission ne tient plus qu’à un fil après quasiment un demi-siècle de bons et loyaux services.

Il faudra donc croiser les doigts pour que les deux engins tiennent le coup à l’approche de leur 50e anniversaire, en 2027. D’ici là, il conviendra de savourer comme il se doit les dernières aventures de ce couple légendaire qui a marqué l’histoire des sciences, mais aussi l’imaginaire collectif au fer rouge. Haut les cœurs, Voyager !

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