Dans une étude repérée par Interesting Engineering, des chercheurs chinois ont développé un nouveau prototype de batterie flexible au lithium qui, contrairement aux modèles Li-ion classiques, peut fonctionner même lorsqu’elle est pliée ou coupée en deux, afin de la rendre plus sûre.
Les batteries lithium-ions (Li-ion) sont omniprésentes aujourd’hui, que ce soit dans nos appareils électroniques ou dans les nouveaux types de véhicules électriques qui sont en train de se démocratiser. Cette technologie doit son immense popularité à un ensemble de qualités très intéressantes dans de nombreux contextes. Elles sont globalement légères, offrent une densité énergétique élevée, une vitesse de recharge rapide, et un rendement important.
Un problème de sécurité
En revanche, elles souffrent aussi d’un problème tout sauf négligeable : la sécurité. En effet, les batteries Li-ion sont généralement constituées de plusieurs couches d’anodes et de cathodes séparées par un matériau isolant. Lorsqu’elle est endommagée, cette séparation peut être rompue, et permettre aux anodes et cathodes d’entrer en contact direct. On obtient alors un court-circuit qui génère beaucoup de chaleur, et peut enflammer tout le dispositif.
C’est particulièrement ennuyeux, car ces feux sont notoirement difficiles à gérer. Ils ont tendance à s’autoentretenir, et il faut déverser des quantités d’eau absolument gigantesques pour les contrôler. Dans le cas des grosses batteries, l’eau peut même faire empirer la situation ; au contact des électrodes, le liquide peut déclencher une réaction qui produit rapidement de grandes quantités d’hydrogène et d’oxygène — des gaz combustibles qui peuvent alimenter l’incendie, voire conduire à une explosion dans un espace confiné. C’est notamment pour ces raisons que les pompiers redoutent autant les incendies de voitures électriques.
Les batteries Li-S, prometteuses mais pas encore matures
Les chercheurs de l’Université des Sciences et Technologies Electroniques de Chine ont donc choisi de miser sur une composition chimique différente, avec une batterie lithium-soufre (Li-S).
C’est une approche qui a déjà été explorée par le passé, car sur le papier, ces batteries présentent des avantages importants par rapport à leurs équivalents Li-ion. Pour commencer, elles offrent une densité énergétique largement supérieure de l’ordre de 500 Wh/kg, contre 200 pour une batterie Li-ion standard. C’est un point particulièrement intéressant pour le développement de véhicules électriques. En outre, elles sont aussi construites à partir de matériaux abondants, peu chers, et potentiellement moins problématiques au niveau environnemental que le nickel et le cobalt des batteries Li-ion.
Le souci, c’est que personne n’a encore trouvé le moyen de créer une batterie Li-S suffisamment stable sur le long terme. Leur durée de vie est nettement plus courte, notamment parce qu’elles ont tendance à perdre beaucoup de capacité à chaque cycle de charge. En effet, les électrodes à base de sulfure de fer utilisées dans ces prototypes ont tendance à se dissoudre dans les électrolytes carbonés, formant un résidu solide qui réduit progressivement la capacité de la batterie. En outre, le volume du soufre a tendance à augmenter significativement au fil des cycles, ce qui est évidemment problématique dans un smartphone ou une voiture.
L’équipe a donc pris le parti d’intégrer une nouvelle couche entre la cathode et l’électrolyte pour diminuer la dissolution du soufre. Après plusieurs essais, ils se sont arrêtés sur l’acide polyacrylique (PAA) ; grâce à ce matériau, les chercheurs ont pu créer un prototype capable d’encaisser 300 cycles de charge avant de présenter une baisse de capacité.
Pour référence, c’est inférieur aux batteries qui équipent la plupart des véhicules électriques (entre 1500 et 3000 cycles), mais à peu près similaire à celles dont disposent nos appareils électroniques du quotidien (300 à 500 cycles pour un smartphone ou un ordinateur portable). Vous l’aurez compris, il y a encore des progrès à faire en termes de gestion de l’énergie.
Une batterie qui peut fonctionner même coupée
Mais ce n’est pas le principal argument des chercheurs ; leur priorité, c’était de concevoir une batterie résistante aux dégâts structuraux. Et à ce niveau, les résultats sont déjà nettement plus impressionnants.
Après avoir démontré la viabilité de leur batterie, les chercheurs l’ont intégrée dans un support très différent des batteries traditionnelles, à savoir une petite pochette flexible qui ressemble un peu à une poche de perfusion. La surface intérieure du contenant est couverte d’une couche de sulfure de fer elle-même enduite de PAA, puis remplie d’un électrolyte carbonaté et doté d’une anode en graphite.
Pour tester la résistance de cette batterie, les chercheurs l’ont tout simplement coupée en deux dans le sens de la largeur. Le dispositif a survécu à ce traumatisme, sans produire la moindre flamme. Mais surtout, elle a continué à fonctionner comme si de rien n’était. La cerise sur le gâteau, c’est qu’elle est restée fonctionnelle pendant plus de 100 cycles de charge sans la moindre détérioration des performances.
Les chercheurs reconnaissent explicitement que leur invention n’est pas encore assez mature pour être déployée à grande échelle dans l’industrie. Pour en arriver là, il faudra augmenter significativement les performances énergétiques du système. Mais ils estiment tout de même que cette technologie pourrait faire son trou dans des niches bien spécifiques où la durabilité et la densité énergétique sont des facteurs critiques.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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