Ce lundi, un moteur-fusée de Rocket Factory Augsburg (RFA) a explosé de manière spectaculaire lors d’un test au spatioport britannique flambant neuf de SaxaVox. Un revers très ennuyeux pour la startup allemande, qui n’était plus très loin d’un premier lancement important pour plusieurs raisons.
Pour resituer le contexte, RFA est l’une des jeunes pousses les plus prometteuses de l’aérospatiale européenne. Avec HyImpulse, Orbex ou Isar pour ne citer qu’eux, elle fait partie de ces entreprises qui cherchent activement à faire décoller l’aérospatiale privée sur le Vieux continent pour réduire l’écart avec les États-Unis, où l’industrie est désormais dominée par SpaceX, RocketLab et consorts.
Elle travaille en ce moment sur son premier engin, RFA ONE. Il s’agit d’un lanceur léger d’une trentaine de mètres conçu pour déployer jusqu’à 1300 kg de charge utile en orbite terrestre basse.
Leur bébé a même son propre berceau, puisque RFA dispose d’un accès exclusif au spatioport de SaxaVox. Cette base de lancement a enfin reçu sa licence de lancement en décembre 2023, devenant ainsi le premier site autorisé à procéder à des lancements verticaux en Europe de l’Ouest.
Et apparemment, le programme avançait de manière très satisfaisante. Hier matin, un des actionnaires majoritaires de la startup a annoncé fièrement que le premier lancement devrait avoir lieu d’ici quelques semaines. Mais cette perspective très enthousiasmante est retombée comme un soufflé dans la soirée.
Un test de mise à feu statique tourne au vinaigre
Un peu après 22 h, RFA a procédé à un test de mise à feu statique des neufs moteurs Helix qui propulsent le premier étage de sa fusée. Ce test consiste à verrouiller l’engin en l’ancrant solidement au pas de tir pour vérifier que les systèmes de distribution et de propulsion fonctionnent comme prévu. Il devait s’agir d’une procédure de routine, sachant qu’en mai dernier, l’entreprise avait déjà validé un test de ce genre avec 4 des 9 moteurs.
Malheureusement, il semble qu’un problème soit survenu pendant l’installation des cinq derniers moteurs. À 22 h 42, RFA a annoncé qu’une « anomalie » avait conduit à la destruction totale du premier étage. Sur ces images de la BBC relayées par NASASpaceflight, on constate en effet que les îles Shetland ont temporairement été illuminées par une vaste boule de feu qui n’a laissé aucune chance à l’engin.
A longer video from the BBC shows the failure at ignition during the Static Fire test. The vehicle tried to depress at the point of the anomaly, but it was then just a progression to the RUD of the entire booster.https://t.co/2eEITjzdcl https://t.co/leFC8APl8B pic.twitter.com/YtjChWPS5w
— Chris Bergin – NSF (@NASASpaceflight) August 20, 2024
Heureusement, aucun employé de RFA ou de SaxaVox n’a été blessé. L’autre bonne nouvelle, c’est que le deuxième et le troisième étage, dont les validations respectives sont déjà terminées, n’étaient pas présents sur le pas de tir. RFA ne devra donc pas reconstruire l’intégralité du véhicule.
RFA fauchée dans la dernière ligne droite
Mais il s’agit tout de même d’une grosse déconvenue pour la startup. En effet, ce n’est pas une plateforme de test qui était montée sur le pas de tir, mais le véritable premier étage qui était censé décoller d’ici quelques semaines. En d’autres termes, ce sont des semaines de fabrication et de validation qui ont été réduites à néant en un instant.
« Nous développons de manière itérative en mettant l’accent sur des tests réels. Cela fait partie de notre philosophie et nous étions conscients des risques inhérents à cette approche », a déclaré RFA. « Notre objectif est de reprendre nos activités normales le plus rapidement possible. »
Ce qui est regrettable, c’est que RFA a peut-être laissé passer une occasion en or, celle de faire partie du tout premier groupe de startups européennes à procéder à un lancement orbital privé. Elle était bien installée en pole position jusqu’à hier. Mais suite à ce contretemps, ses deux principaux concurrents comme Isar, une autre startup allemande, pourraient désormais lui griller la politesse. Cette dernière avait déjà annoncé son intention de procéder à son premier lancement avant la fin de l’année, ce qui semble difficilement envisageable pour RFA dans le contexte actuel.
Plus largement, la compétition promet de se densifier considérablement sur les prochains mois. Plusieurs autres entreprises privées comme HyImpulse (Allemagne), Orbex (Royaume-Uni) ou PLD Space (Espagne) envisagent un vol inaugural en 2025. Les ingénieurs d’Augsburg vont donc devoir mettre les bouchées doubles pour rester dans le peloton de tête, dans un contexte où l’aérospatiale européenne s’apprête à connaître une mutation importante grâce à l’éclosion de ces jeunes pousses.
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