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Ce cœur artificiel en titane utilise un moteur à lévitation magnétique

L’entreprise américaine qui a développé cet organe de substitution mise sur une approche très différente de l’entreprise française Carmat.

Aux États-Unis, un homme de 58 ans est récemment devenu le tout premier humain à bénéficier d’un dispositif médical d’un nouveau genre : des chirurgiens ont remplacé son cœur défaillant par un organe en titane.

Cet engin, appelé Total Artificial Heart (TAH), est développé par l’entreprise américaine BiVACOR. Il est conçu pour assumer temporairement les fonctions de l’organe original lorsqu’il n’est plus à la hauteur de sa tâche vitale ; mais contrairement aux autres appareils de ce genre, il ne cherche pas vraiment à imiter son modèle organique. Puisqu’il s’agit d’un palpitant entièrement métallique, ses différentes chambres ne peuvent pas se contracter pour propulser le fluide vital dans le système circulatoire. À la place, il s’appuie sur un petit rotor interne.

À première vue, cette approche semble très risquée. Tous les systèmes mécaniques de ce genre sont des vulnérabilités potentielles qui peuvent conduire à des défaillances. Pour limiter les risques, l’entreprise a misé sur un concept très original : déconnecter le rotor du reste du système. En effet, la seule pièce mobile est maintenue dans un état de lévitation magnétique, comme les fameux trains à grande vitesse de type maglev. Il n’y a donc aucun point de contact physique, et cela permet de supprimer la source de friction qui pourrait produire une usure aux conséquences potentiellement catastrophiques.

L’idée est conceptuellement simple, mais beaucoup plus difficile à mettre en place. D’après le communiqué de l’entreprise, il a fallu dix ans de développement, des dizaines de tests sur des animaux et plusieurs retours à la case départ pour arriver à un produit mature et fonctionnel. Mais ces efforts ont payé : le cœur en titane a permis de sauver la vie d’un patient dont le cœur venait de lâcher définitivement. Il a parfaitement assuré l’intérim pendant huit jours en attendant que l’intéressé puisse bénéficier d’une transplantation cardiaque qui serait probablement arrivée trop tard sans cet intermédiaire salvateur.

Avec cet essai concluant, l’entreprise va désormais proposer son produit à d’autres institutions, avec l’objectif de le greffer à cinq autres personnes atteintes d’insuffisance cardiaque en phase terminale. Elle espère ainsi pouvoir améliorer significativement le pronostic vital de ces patients qui ont souvent très peu d’alternatives à disposition.

Moins de complexité, plus de durabilité ?

En effet, les cœurs artificiels viables ne se bousculent pas au portillon. Aux États-Unis, un seul et unique modèle a été approuvé par les autorités de santé publique sur les deux dernières décennies (le Total Artificial Heart de SynCardia). Côté européen, l’exemple le plus connu est sans doute celui du cœur artificiel de la société française Carmat, qui est officiellement arrivé sur le marché il y a un peu plus de trois ans.

Ces dispositifs ont déjà produit des résultats très encourageants. Mais ils souffrent tout de même de certaines limites inhérentes à l’approche choisie par ces entreprises. En effet, Carmat et SynCardia cherchent à imiter fidèlement l’architecture cardiaque, en utilisant des valves artificielles et des membranes flexibles qui se contractent pour propulser le sang. Le souci, c’est qu’il reste des doutes par rapport à la solidité de ces matériaux sur le long terme. En outre, il reste aussi un problème de taille — littéralement : ces cœurs artificiels sont généralement bien plus volumineux que les originaux. Celui de Carmat, par exemple, ne peut donc être implanté que chez des personnes relativement corpulentes, et est globalement assez mal adapté à la morphologie de la cage thoracique féminine.

BiVACOR espère surmonter ces deux obstacles avec son produit. Puisqu’il est construit entièrement en titane rigide, il évite certaines défaillances liées à la délicatesse des membranes. Le rotor à lévitation magnétique, de son côté, permet d’éviter complètement d’avoir recours à des valves qui pourraient elles aussi flancher ; la circulation est régulée exclusivement en ajustant la vitesse du moteur. Pour l’instant, personne ne sait combien de temps l’engin pourrait fonctionner, mais les tests actuellement en cours sont très encourageants : sur un banc d’essai en laboratoire, il fonctionne depuis quatre ans déjà sans montrer le moindre signe de faiblesse. L’entreprise espère donc que ce cœur en titane n’est pas qu’une solution d’appoint, mais bien une solution sur le « long terme ».

Bivacor Tah Test
© BiVACOR

Cette simplicité conceptuelle (toutes proportions gardées) permet aussi d’économiser du volume. Selon le communiqué, ce TAH est suffisamment petit pour être compatible avec la majorité des humains, aussi bien chez les hommes que les femmes. La firme met aussi en avant ses performances : le rotor est suffisamment puissant pour alimenter un homme adulte pendant qu’il fait de l’exercice.

Il sera intéressant de voir si les revendications de l’entreprise survivront à la réalité du terrain une fois que davantage de patients auront bénéficié de ce TAH. Le cas échéant, cela pourrait marquer le début d’un changement de paradigme ; peut-être qu’à moyen terme, d’autres entreprises délaisseront les cœurs flexibles pour se tourner vers des modèles rigides plus résistants et durables afin de maximiser l’espérance de vie des patients en attendant que Carmat et consorts finissent de peaufiner leurs coeurs biomimétiques. Rendez-vous dans quelques années pour un premier état des lieux.

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Source : BiVACOR

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