La question des origines de la vie fascine toute l’humanité depuis sa plus tendre enfance ; quasiment toutes les grandes civilisations de notre histoire, quelle que soit la région ou la période, ont proposé différents scénarios pour expliquer comment notre planète a pu passer d’un désert inerte à l’incroyable havre de biodiversité que l’on connaît aujourd’hui. Mais malgré la montée en puissance de la méthode scientifique et l’arrivée de technologies toujours plus sophistiquées, nous ne sommes finalement pas beaucoup plus avancés que les mésopotamiens il y a plus de 4 millénaires ; nous ne sommes toujours pas capables d’expliquer rigoureusement comment s’est allumée la mèche qui a conduit à l’explosion de la vie.
Aujourd’hui, la plupart des spécialistes sont partagés entre une petite dizaine de scénarios non exclusifs. Certains estiment par exemple que le processus a démarré au fond des océans, et plus précisément à proximité des cheminées hydrothermales. Ces structures géothermiques auraient pu fournir les éléments chimiques et l’énergie nécessaire pour lancer la synthèse des premières briques constitutives de la vie telle qu’on la connaît à partir des éléments de base comme le carbone ou l’azote.
D’autres préfèrent une hypothèse basée sur l’argile — un peu comme le suggéraient déjà des mythes sumériens, selon qui les humains auraient été façonnés à partir de ce matériau. Ils sont en effet capables d’adsorber et de concentrer des composés organiques, et ils auraient ainsi pu faciliter les réactions de polymérisation indispensables à l’émergence de molécules plus complexes. D’autres estiment que ce sont des météorites qui auraient ensemencé la Terre avec ces molécules complexes, et ainsi de suite.
Les briques essentielles de la vie peuvent apparaître grâce à la foudre
Mais au fil des recherches, toutes ces pistes sont devenues de moins en moins convaincantes. La piste extraterrestre, par exemple, est fortement handicapée par le fait que les impacts de corps célestes sont devenus rares très tôt dans l’histoire de la Terre, dès qu’une atmosphère a commencé à s’installer durablement. Récemment, des chercheurs américains de la prestigieuse université d’Harvard ont donc choisi de se concentrer sur une des rares hypothèses qui restent prometteuses, à savoir celle de la foudre, pour en déterminer la viabilité.
Pour savoir si des éclairs auraient effectivement pu conduire à la génération des éléments nécessaires à l’essor de la vie, ils ont mis en place une enclave spécifiquement conçue pour imiter les conditions physiques et chimiques de la terre précoce. Ils y ont aussi installé des électrodes qui leur ont permis de générer des arcs électriques pour simuler des éclairs à travers l’air, l’eau et le sol de leur environnement simulé.
À la fin de ces décharges, ils ont analysé les produits des différentes réactions permises par ces apports d’énergie. Ils ont constaté que sous l’influence des décharges, le carbone et l’azote s’étaient partiellement transformés en composés qui sont connus pour leur importance biologique. Le premier a notamment été converti en monoxyde de carbone et en acide formique, tandis que le second s’est largement transformé en nitrates et en nitrites.
Pour mieux imiter la dynamique de la Terre précoce, les chercheurs ont ensuite ajouté des minéraux similaires à ceux qui auraient été présents dans la croûte terrestre à cette époque. Après une nouvelle salve de décharges, ils ont observé la formation de composés soufrés et d’ammoniaque, deux éléments cruciaux qui jouent un rôle central dans un tas de processus métaboliques extrêmement répandus à tous les étages du vivant.
« L’électrochimie du plasma induite par la foudre aurait pu générer localement de fortes concentrations de matières premières contenant de l’azote et du carbone et produire une gamme de réactifs qui étaient cruciaux pour la vie émergente », expliquent les auteurs.
Une piste particulièrement prometteuse
Évidemment, ces résultats sont encore largement insuffisants pour clore le débat. Il ne s’agit en aucun cas d’une preuve que ce sont bien des éclairs qui ont lancé la machine il y a environ 3,5 milliards d’années. Mais ces expériences ont montré que ces réactions pouvaient avoir lieu très facilement, et c’est un point très important lorsqu’il s’agit de comparer les différents scénarios entre eux.
Selon les chercheurs, la relative simplicité de ce processus rend l’hypothèse de la foudre bien plus probable que celle de l’ensemencement par un astéroïde ou une comète, par exemple. Il pourrait donc être intéressant de la placer en tête de liste jusqu’à nouvel ordre, en croisant les doigts pour que de nouveaux éléments de réponse susceptibles de la renforcer ou de l’écarter finissent par tomber.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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Merci pour cet article fort interessant et très accessible à la lecture
Une “enclave” ???? Ça ne veut strictement rien dire !
Il vous arrive de vous relire, un autoclave veut dire quelque chose !