Du contenu multimédia (films, séries, jeux vidéo, logiciels…) aux denrées alimentaires en passant par les fonctionnalités des voitures, l’encre des imprimantes, les sous-vêtements et les box insolites en tous genres, nous assistons depuis quelques années à une « Netflixisation » à grande échelle ; de plus en plus de marques rivalisent désormais d’ingéniosité pour transformer leurs produits en services afin de traire leur clientèle sur le long terme. Et si vous pensiez que ce modèle économique discutable commençait à approcher de son point de rupture, mieux vaut vous accrocher : récemment, Logitech a dévoilé son intention de proposer… une « souris éternelle » soumise à un abonnement mensuel.
Cette histoire qui embrase la toile depuis deux jours a commencé dans le podcast Decoder de The Verge. Nilay Patel, rédacteur en chef du média américain, s’est entretenu avec Hanneke Faber, la nouvelle PDG arrivée aux commandes de l’entreprise suisse à l’automne dernier. Au cours de la discussion, elle a commencé à mentionner ce fameux concept de « souris éternelle » en s’appuyant sur quelques comparaisons pour le moins… surprenantes.
De la souris à la Rolex
« L’autre jour, dans notre centre d’innovation en Irlande, un des membres de notre équipe m’a présenté une souris éternelle en la comparant à une jolie montre — pas une montre extrêmement chère, mais pas non plus un objet dont je compte me débarrasser un jour. Donc pourquoi est-ce que je jetterais ma souris ou mon clavier si c’est un produit de qualité fantastique, bien conçu ? », a-t-elle indiqué. « Voyez ça comme votre Rolex. Vous allez vraiment adorer ».
Visiblement interloqué par ce parallèle osé entre des montres de luxe intemporelles et des bouts de plastique à l’espérance de vie bien plus modeste, l’hôte a insisté pour en savoir plus sur la façon dont l’entreprise concevait ce modèle économique, ce qui a donné lieu à un échange carrément lunaire.
« – Je vais vous demander ça très directement : est-ce que vous envisagez cela comme une souris à abonnement ?
– Possiblement.
– Donc on payerait un abonnement pour les mises à jour de notre souris.
– Oui, et vous n’auriez plus jamais à vous en soucier, un peu comme nos services de visioconférence actuels.
– …Mais c’est une souris.
– Mais c’est une souris, oui.
– Je pense que les consommateurs pourraient les percevoir comme deux choses très différentes.
– [Rires] Oui, mais c’est magnifique ! Imaginez une souris incrustée de diamants”, se réjouit Faber.
Quelques arguments pertinents
Au fil de l’échange, la dirigeante a clarifié sa vision en indiquant qu’il ne s’agissait pas encore d’un produit mature sur le point d’être commercialisé. À la place, Logitech se sert plutôt de cet objet quasiment universel comme d’un exemple pour illustrer une nouvelle philosophie de design, mais aussi un nouveau modèle économique des périphériques.
D’un côté, cette approche n’est pas entièrement dénuée de sens. En premier lieu, pour espérer une grande longévité, il faut de toute façon se tourner vers des produits plutôt haut de gamme, et donc fatalement assez chers. En outre, de la même façon que certains utilisateurs sont fidèles à une marque de chaussure qui correspond bien à leur pied, d’autres ont souvent tendance à racheter le même modèle de souris à la fin de sa durée de vie pour garder leurs repères.
Dans ce contexte, pourquoi ne pas investir dans un produit premium, éventuellement modulaire, qui serait pris en charge sur le long terme ? Surtout si cela permet en plus de limiter la production de plastiques et de composants électroniques qui finiront à la poubelle d’ici quelques années ?
“You will own nothing and be happy”
Mais même si ces quelques arguments semblent à peu près recevables, à travers ce projet, on distingue tout de même les contours d’un cynisme commercial assez nauséabond. Difficile de ne pas avoir l’impression que la finalité de ce projet n’est pas seulement de proposer un produit premium susceptible de s’inscrire dans la durée pour répondre aux attentes des utilisateurs, mais aussi de surfer sur ce nouveau paradigme qui consiste à extraire un maximum de jus financier de produits qui s’en passaient très bien jusqu’à présent.
Dans un monde idéal, on pourrait légitimement attendre qu’un produit soit fourni avec quelques garanties par défaut, afin que le client puisse rentabiliser son investissement. Mais plus le temps passe, plus il semble que cette ère sera bientôt révolue ; il suffit de regarder du côté des films, des jeux vidéo ou des logiciels pour s’en convaincre. Et si la maladie des abonnements et du “software as a service” commence à infecter des objets physiques aussi mondains que des périphériques PC, où placer la limite ? Faudra-t-il un jour débourser un supplément mensuel pour en utiliser tous les boutons ?
Certes, cet exemple est volontairement tiré par les cheveux. Mais aussi absurde soit-il, il n’est pas non plus totalement dénué de sens à une époque où des constructeurs comme BMW ont déjà tenté de faire payer un abonnement pour des sièges chauffants installés par défaut dans le véhicule — sans succès heureusement.
En tant que consommateurs, il va donc falloir faire entendre notre voix collective et voter avec notre portefeuille pour empêcher cette façon de procéder de devenir la norme. En attendant, il ne reste plus qu’à espérer que le point de non-retour n’a pas déjà été franchi. Autrement, nous risquons bien de nous diriger vers un futur où “nous ne posséderons rien et nous en serons heureux“, comme le dit si bien la désormais célèbre phrase qui résume cet essai de la députée danoise Ida Auken.
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Et comme tous les produits à abonnements premium ou ceux qui devaient avoir un suivi longue durée, le suivi sera abandonné du jour au lendemain pour laisser la place à un nouveau modèle. On se souvient bien du Windows 10 qui devait être le “dernier windows”, et finalement windows 11 est sorti, et windows 12 sort dans un an.
J’ai eu que des mauvaises expériences avec Logitech. Entre les souris, les casques et les hauts parleurs, rien n’a tenu plus de 3ans. J’ai un concept à proposer à Logitech : faire des produits de qualité et proposer des garanties de 10 ans. Ça revient à payer un abonnement décennale et tout le monde serait content
Philip K dick l’avais vu bien avant tout les monde bientôt rien ne nous appartiendra vraiment et on payera un peut pour tout
Malheureusement ça existe déjà dans le monde de l’automobile où certaines fonctionnalités hardware sont soumises à abonnement… Certaines marques par exemple limite la fonctionnalité siège chauffant au paiement d’un abonnement !
On paiera beaucoup pour tout
Les rooters et modems sont inclus dans notre box internet, impossible d’avoir internet sans payer la location de la box “inclue dans l’abonnement ”.
“En premier lieu, pour espérer une grande longévité, il faut de toute façon se tourner vers des produits plutôt haut de gamme, et donc fatalement assez chers.”
==> Cet argument est faux.
Ce n’est pas parce qu’un produit est cher qu’il a une longue durée de vie (souvent même au contraire mais j’y reviens juste après). Petit contre-exemple… J’ai acheté une souris gamer no-name y a au moins 10 ans, elle m’a couté 16€ et marche toujours aussi bien qu’au premier jour. Alors ok, c’est pas un objet “de luxe” mais en terme utilitaire, il répond très bien au besoin. Et à l’inverse, j’ai eu plus de soucis avec une souris de marque (logitech en l’occurrence) qui m’avait couté plus cher que ça.
Et d’un point de vue économique, je doute qu’on me propose un abonnement mensuel (comme dit dans l’article) pour une souris qui coute moins de 10 centimes par mois.
Ce n’est pas parce qu’un produit n’est pas cher qu’il a une courte durée de vie. Par contre, il n’a pas les 500 gadgets intégrés (dont les gens vont en utiliser peut être 1%) qui donnent chacun une nouvelle cause possible de panne, réduisant ainsi la durée de vie de l’objet en bon état de fonctionnement.