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Pour détruire l’ISS, SpaceX va construire une capsule Dragon sous stéroïdes

Cette capsule améliorée aura droit une trentaine de moteurs supplémentaires pour accompagner l’ISS jusqu’à sa dernière demeure.

À la fin du mois de juin, la NASA a annoncé qu’elle avait chargé SpaceX de concevoir un véhicule capable de désorbiter la Station spatiale internationale à la fin de son cycle de vie, en 2031. Récemment, l’entreprise a dévoilé l’engin qui lui a permis d’être sélectionné par l’agence lors d’une conférence de presse jointe ; voici à quoi va ressembler le bourreau qui accompagnera la vénérable station vers sa dernière demeure.

Comme attendu, SpaceX a choisi de baser le véhicule sur un engin déjà existant, à savoir sa capsule Falcon. Cette dernière a déjà l’habitude de travailler au contact de la station ; cela fait 12 ans qu’elle achemine régulièrement du matériel à bord du laboratoire orbital, et quatre ans qu’elle y dépose également des astronautes dans le cadre d’un partenariat commercial avec la NASA. Avec des états de services irréprochables pour le moment.

Un engin qui a fait ses preuves

Cette approche permet donc de s’appuyer sur du matériel qui a déjà fait ses preuves. Un avantage significatif en termes de temps de développement, puisque cela évitera de devoir valider des dizaines de nouveaux composants individuellement.

« Un des avantages d’exploiter l’histoire riche du Dragon, c’est que nous pouvons continuer à utiliser du matériel déjà certifié pour plusieurs systèmes clés, comme les systèmes d’amarrage et de propulsion », a expliqué Sarah Walker, directrice du programme chez SpaceX.

Mais pour déplacer un engin aussi grand et imposant que l’ISS (110m de long pour 450 tonnes), un Dragon standard ne suffira pas. Avec ses 16 moteurs Draco, la capsule serait techniquement capable de développer une poussée suffisante pour arracher la station à son orbite, à condition de prendre son temps; par contre, elle ne pourrait pas embarquer suffisamment de carburant pour tenir toute la mission.

30 moteurs supplémentaires

Et dans tous les cas, SpaceX ne pourra pas se contenter de ralentir l’ISS pour la laisser brûler seule dans l’atmosphère. Il faudra accompagner le cadavre de la station le plus longtemps possible afin qu’il reste stable pendant la rentrée atmosphérique. Cela permettra de contrôler la trajectoire des débris, ce qui est l’objectif principal de la mission : tout l’enjeu, c’est de faire en sorte que la chute de la station ne représente pas une menace pour les populations, les écosystèmes et les infrastructures.

Or, le système de propulsion original du Dragon est conçu pour fonctionner dans le vide, sans avoir à lutter contre la friction avec l’atmosphère, et avec une charge utile bien plus faible. Il n’y a donc pas d’autre choix que de lui offrir un surplus de puissance et des réserves supplémentaires. « Ce véhicule aura besoin d’une tonne d’ergols liquides et d’une tonne de moteurs pour fournir assez de poussée pour déplacer l’ISS », insiste Walker.

Un Moteur Draco De Spacex
Un moteur Draco de SpaceX. Le Dragon amélioré qui scellera le sort de l’ISS en comptera 46, soit 30 de plus que le modèle de série. ©

Pour répondre à ce cahier des charges, SpaceX va construire une version plus musclée spécifiquement taillée pour cette mission. Au total, ce véhicule de désorbitage sera doté de 46 moteurs Draco, soit presque trois fois plus que le modèle de base. Évidemment, il faudra aussi les alimenter. Pour cela, l’engin partira avec environ 16 tonnes d’ergols liquides à bord — six fois plus que l’original.

L’ensemble sera logé dans une section centrale nettement plus longue que l’originale, et cela va demander des efforts d’ingénierie bien plus importants qu’on pourrait le penser. « Ça n’aura rien à voir avec la petite pièce en fibre de carbone qu’ils utilisent actuellement. C’est un vaisseau spatial beaucoup plus sophistiqué et complexe », explique Jonathan McDowell un astrophysicien et grand spécialiste du vol spatial interrogé par le Scientific American. « Ce n’est que de la “vieille” technologie, certes, mais tout va être assemblé d’une toute nouvelle manière », précise-t-il.

Quel opérateur de lancement ?

Il reste cependant une dernière question importante. Le contrat de SpaceX ne concerne que la construction du véhicule de désorbitage ; le lancement, en revanche, fera l’objet d’un second contrat distinct. Et à l’heure actuelle on ne sait pas encore qui va en hériter.

La bonne nouvelle, c’est qu’il est assez facile d’avancer quelques hypothèses. En effet, ce Dragon spécialisé sera massif, et les lanceurs légers comme l’Electron de RocketLab seront donc disqualifiés d’office. Les lanceurs de calibre moyen comme le Falcon 9 de SpaceX risquent aussi de manquer de punch. Il faudra se tourner vers un lanceur lourd, et les engins de cette catégorie ne se bousculent pas au portillon.

Le candidat le plus évident, c’est le Falcon Heavy, la version surdimensionnée du Falcon 9. Mais la NASA pourrait aussi éviter de mettre tous ses œufs dans le même panier en sélectionnant le Vulcan Centaur d’ULA, qui a décollé pour la première fois en janvier dernier.

Tout dépendra des propositions des différentes entreprises… et surtout du tarif, puisque la NASA ne roule pas sur l’or en ce moment. Pour référence, les deux engins boxent à peu près dans la même catégorie à ce niveau, mais il existe quand même une différence significative. Le coût du Falcon Heavy est estimé à environ 90 millions de dollars par lancement, contre près de 110 millions pour Vulcan Centaur. Ces 20 millions pourraient peser lourd dans la décision de la NASA, et à moins qu’ULA ne consente à une ristourne, SpaceX partira sans doute avec une longueur d’avance lorsque l’agence américaine se penchera sur ce dossier. Affaire à suivre.

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