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Des astronomes assistent en direct au réveil d’un trou noir pour la première fois

Il faudra d’autres observations complémentaires pour le confirmer rigoureusement, mais quel que soit le phénomène en jeu, il s’agit d’une trouvaille très enthousiasmante pour les astronomes.

En 2019, la galaxie SDSS1335+0728 a attiré l’attention des astronomes lorsqu’elle a soudainement commencé à briller de mille feux, en émettant de grandes quantités de rayonnements visibles, infrarouges et UV. En février dernier, le phénomène s’est encore intensifié quand des rayons X se sont joints à la fête.

Les télescopes ont donc braqué leurs objectifs sur cet objet très calme qui n’avait pas grand-chose de remarquable jusque-là, dans l’espoir d’identifier l’origine de ce feu d’artifice inattendu. Et les chercheurs pensent désormais avoir compris ce qui se passe : d’après une étude récente, un trou noir serait en train de s’éveiller au cœur de la galaxie, directement sous les yeux des astronomes.

Des siestes qui compliquent les observations

L’observation des trous noirs a fait d’énormes progrès ces dernières années. Grâce à l’apparition de techniques et d’instruments de plus en plus sophistiqués, les astronomes sont désormais capables d’en extraire de plus en plus d’informations. On sait estimer leur masse, la quantité de matériel qu’ils ingurgitent, et même leur tirer le portrait depuis que les troupes de l’European Southern Observatory (ESO) ont pris la première photo de Sagittarius A*, le trou noir supermassif au centre la Voie lactée.

La première image directe de Sagittarius A*, le trou noir supermassif de la Voie lactée. © ESO / EHT

Mais aussi précieux soient-ils, ces travaux ne nous renseignent que sur le comportement des trous noirs actifs. En effet, ces mastodontes ne sont vraiment brillants que lorsqu’ils sont au beau milieu d’un festin. Lorsque de grandes quantités de gaz et de poussière filent inexorablement vers l’horizon du trou noir, ce matériel est surchauffé par la friction et les forces gravitationnelles phénoménales. Cela se manifeste à travers l’émission de rayonnements particulièrement intenses.

Artist’s Impression: The Black Hole At The Centre Of The Galax
Une vue d’artiste de la galaxie SDSS1335+0728 avant (en haut) et après (en bas) cette augmentation soudaine de luminosité. © ESO / M. Kornmesser

Mais les trous noirs ne passent pas leur vie à s’empiffrer. Après avoir terminé leur assiette, ils s’offrent généralement une longue sieste durant laquelle ils assimilent peu de matière. Les rayonnements se font alors très discrets, ce qui complique considérablement leur détection. Par conséquent, nous manquons encore cruellement d’informations sur le comportement des trous noirs pendant ces phases de dormance.

Puisqu’ils sont déjà difficiles à repérer dans cet état, il faut donc avoir énormément de chance pour en observer un précisément au moment où il sort de sa torpeur. Plusieurs équipes ont déjà cru y avoir assisté, mais ils ont à chaque fois été victimes d’une cruelle désillusion : il s’agissait en fait de perturbations ponctuelles induites par le passage d’autres corps célestes à proximité. En effet, ces objets qui passent dans la zone d’influence du trou noir se retrouvent déchiquetés par leur étreinte gravitationnelle, produisant un pic de rayonnements qui peut prêter à confusion.

La toute première activation de trou noir en direct ?

Par conséquent, à ce jour, personne n’a encore réussi à observer directement le réveil d’un trou noir en bonne et due forme. Mais cette fois, la situation semble différente.

La durée du phénomène observé au cœur de SDSS1335+0728 semblait déjà incompatible avec une telle disruption, et les analyses complémentaires des chercheurs ont rendu cette piste encore moins convaincante. Les auteurs de l’étude se sont donc rabattus sur une autre explication plausible, et il s’agit de la plus excitante : tout indique que nous assistons en direct à l’activation d’un trou noir massif pour la toute première fois dans l’histoire de l’astronomie.

Il faudra cependant conduire d’autres observations pour le confirmer rigoureusement. Selon le communiqué de l’ESO, il reste une possibilité qu’il s’agisse d’une perturbation particulièrement lente, ou d’un autre phénomène radicalement différent et jamais documenté.

Mais dans tous les cas, il s’agit d’une perspective très enthousiasmantes. Quel que soit le phénomène en jeu, les chercheurs pourront en extraire de précieuses données sur la dynamique et le cycle de vie de ces mystérieux ogres cosmiques. « Quelle que soit la nature de ces variations, cette galaxie nous offre des informations de grande valeur sur la façon dont les trous noirs grandissent et évoluent », conclut l’astrophysicien Sànchez Sàez.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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