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Physique : l’étau se resserre autour de la masse de la lumière

Déterminer la masse des insaisissables photons pourrait complètement transformer la physique, et les travaux de chercheurs chinois vont permettre de s’en rapprocher… même si la route reste longue.

Combien pèse la lumière ? Traditionnellement, la réponse à cette question a toujours été zéro. Des cours de physique de niveau lycée aux modèles avec lesquels travaillent les spécialistes, (presque) toute la littérature scientifique décrit les photons comme des particules sans masse, et cette donnée joue un rôle déterminant dans notre compréhension des mécanismes de l’Univers.

Si autant de modèles attribuent une masse nulle aux photons, c’est parce que cela correspond bien à ce que l’on observe en pratique. En effet, tout indique que ces objets traversent le vide de l’espace à une vitesse constante, sans jamais accélérer ou ralentir tant qu’un obstacle ne se dresse pas sur leur route. Cela implique effectivement que les photons sont dépourvus de toute masse… du moins, selon les lois de la physique communément admises aujourd’hui.

La masse du photon, un pilier de la physique moderne

Car jusqu’à présent, personne n’a réussi à le démontrer rigoureusement. Si les photons avaient effectivement une masse, elle serait incroyablement faible. Même les neutrinos, les fameuses « particules fantômes » qui sont les objets les plus légers détectables avec les méthodes actuelles, seraient de véritables mastodontes en comparaison. Par conséquent, la science moderne est tout simplement incapable de déterminer directement la masse d’un photon.

Mais cela n’empêche pas les spécialistes de chercher. Et s’ils s’infligent un tel casse-tête, ce n’est pas simplement pour le plaisir de se creuser la tête ; une telle découverte aurait des implications absolument dantesques. En effet, une grande partie de nos théories les plus fondamentales sont directement basées sur l’absence de masse des photons. Si cette dernière était écartée, les relativités restreintes et générales d’Einstein ou encore les équations de Maxwell, des piliers sur lesquels reposent des pans entiers de la physique moderne, risquent fort de nécessiter de larges révisions. En d’autres termes, c’est tout le modèle standard de la physique des particules qui pourrait vaciller… voire s’écrouler complètement — avec tout ce que cela impliquerait pour notre compréhension de l’Univers.

Cette perspective à la fois terrifiante et fascinante motive de nombreux physiciens à imaginer des méthodes indirectes pour déterminer l’éventuelle masse d’un photon — ou plutôt la fourchette dans laquelle elle pourrait éventuellement se situer.

Le plasma à la rescousse

C’est ce qu’une équipe de chercheurs chinois affiliés a récemment tenté de faire dans une étude relayée sur Phys.org. Pour avancer, ils se sont basés sur deux sources de rayonnements électromagnétiques très intenses.

Les premiers sont des pulsars, des étoiles à neutrons qui tournent sur elles-mêmes à une vitesse ébouriffante tout en émettant un puissant flux de particules accélérées par leur champ magnétique très intense. Vu de la Terre, ces rayonnements nous parviennent sous forme de pulsations périodiques et intermittentes, d’où le terme de pulsar. Les seconds sont des sursauts radio rapides (ou FRB, pour Fast Radio Burst). Ce sont des décharges d’onde radio à la fois très brèves et exceptionnellement intenses qui voyagent à travers le cosmos depuis des sources encore inconnues à ce jour.

Une vue d’artiste du pulsar de Vela
Une vue d’artiste du pulsar de Vela. © Science Communication Lab – DESY via CNRS

Il s’agit de deux types de rayonnements très différents, mais ils ont tout de même des points communs, dont un particulièrement important dans le cadre de ces travaux. Lors de leur voyage, les photons qui les composent peuvent croiser différentes sources de plasma. Ce terme désigne un état de la matière où les électrons, des particules chargées négativement, sont arrachés aux atomes et se promènent librement, dans un désordre complet.

On sait que ces charges libres peuvent affecter la propagation des ondes électromagnétiques émises par les pulsars et les FRB. Plus spécifiquement, elles ont tendance à les diffuser ; en pratique, cela se manifeste par une dispersion des photons qui les composent. Or, selon les chercheurs, ces anomalies dans la propagation des ondes seraient aussi affectées par une éventuelle masse des photons ; si elle était supérieure à zéro, ils arriveraient avec un léger retard.

Ce délai serait infinitésimal et impossible à mesurer directement et précisément. Mais en exploitant de nombreuses sources, les chercheurs ont pu construire un modèle statistique décrivant l’influence de la masse des photons dans cette dynamique. À partir de là, ils ont pu calculer la limite supérieure théorique de la masse des photons, à savoir 9,52 x 10^-46 kg — environ 10 milliards de milliards de milliards de milliards de milliards de fois plus léger qu’une particule de poussière.

« C’est la première fois que les interactions entre un photon de masse non nulle et le plasma sont prises en compte et calculées », expliquent les auteurs.

Pas (encore) de preuve formelle

Il ne s’agit en aucun cas d’une preuve que les photons disposent effectivement d’une masse ou qu’ils en sont dépourvus; il faudra vraisemblablement quelques décennies supplémentaires pour que la technologie nous permette de le vérifier rigoureusement.

En revanche, c’est tout de même un résultat très intéressant. Cette étude pourra servir de ligne directrice pour concevoir de nouvelles approches expérimentales, et permettra de tester la cohérence des modèles actuels avec les observations pour aider les chercheurs à s’approcher d’une réponse convaincante. Mais en attendant, les physiciens continueront de se baser sur les travaux de Maxwell Einstein et consorts qui nous ont déjà rendu de fiers services.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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Source : Phys.org

23 commentaires
  1. Des photons avec une masse c’est pour le moins très “perturbant” ! C’est étrange car pour se déplacer à la vitesse de la lumière (C) théoriquement et même pour un photon doté d’une masse astronomiquement faible ça demanderait quand même une grande énergie. Mais qui viendrait d’où ? Mystère ! Ou alors A. Einstein s’est planté en beauté. Je penche pour une “chinoiserie” statistique 😉 Mais je peux aussi me tromper.

    1. Il n’y a rien de révolutionnaire. Si l’on attribue une masse nulle au photon, c’est déjà parce que l’on est jamais arrivé à le “peser” en lui mesurant la moindre masse. Cela ne veut pas dire pour autant que sa masse serait “nulle” mais que sa masse serait tellement petite qu’il est plus pratique d’un point de vue “mathématiques” de l’approximer par la valeur 0 qui est à la base juste une idéalisation mathématique. Mesurer une valeur non nulle ne ferait en aucune manière s’effondrer la physique actuelle, cela permettrait juste de l’affiner dans des secteurs jusqu’à présent inatteignable.

      1. Ça serait surtout incompatible avec e=mc², équation qui a des applications bien réelles donc je penche plutôt du côté d’Einstein que des chercheurs Chinois (sans méprise).
        Beaucoup ont essayé de le contredire mais à chaque fois ce fût des flops.

        1. E= mc2 a déjà fait ses preuves a Hiroshima…donc de quelle contradiction la chinoiserie veut nous en parler?

      2. Ce n’est pas une simplification mathématique de mettre zéro à la place de très petit. En effet si la masse est non nulle il faut une énergie infinie pour arriver à atteindre la vitesse de la lumière c’est ce que disent les équations de la relativite restreinte et par ricochet de la relativite générale et les 4 équations de Maxwell. On aurait donc un vrai problème !

        1. Attention le plasma est l’ état de la matière à très haute température (10^9 degrés celsius au moins) où seules
          Les particules élémentaires peuvent survivre

    2. Je vais vous dire que tout objet visible à l’oeil nu ou par méthode scientifique a une masse dans le cas contraire il n’existerait pas et donc pas de masse.
      Ma pensée existe mais elle n’a pas de masse. Ça reste à méditer.
      Salut

  2. Bizarre.
    Selon mes connaissances limitées, je dirais intuitivement qu’un photon a une masse puisqu’il existe des lentilles gravitationnelles, mais bon, Einstein dit que c’est l’espace qui se déforme et donne la trajectoire du photon.
    “Lentille gravitationnelle” serait donc une appellation trompeuse !
    S’il n’y a plus besoin de gravité pour courber la trajectoire des objets, à quoi bon continuer d’utiliser notre bonne vieille gravité qui est la première force connue, mais la plus mystérieuse.
    D’ailleurs, on dit force de gravité, mais c’est encore une appellation trompeuse puisque la vraie force est le poids.

  3. Le photon a une masse nulle car sinon il ne se déplacerait pas à la vitesse maximale (qu’on appelle usuellement la vitesse de la lumière). Mais cette vitesse est un absolu : dès qu’il y a une masse non nulle il faut une quantité d’énergie infinie pour tendre vers cette vitesse ultime.

    Il y a des invariants dans cet univers. Il y a une vitesse absolue, indépassable. Il y a une température minimum absolue indépassable (le zéro Kelvin). Et encore quelques autres constantes de ce genre (temps de Planck,…). Pourquoi ? On n’en sait rien du tout. Mais l’univers est ainsi.

  4. Bonjour à vous rédacteur de cet article.

    “les relativités spéciales d’Einstein” ça n’existe pas mais “la relativité restreinte” ça existe hein

    1. Bonjour @fabiendu69,
      Vous avez tout à fait raison de le souligner; le passage en question est désormais corrigé avec la bonne version francophone du terme.
      Bien cordialement et en vous remerciant de votre lecture et de votre vigilance,

  5. “Ce serait incompatible avec e=mc²” nous dit Jean-Philippe. Surement pas et “dès qu’il y a une masse non nulle il faut une quantité d’énergie infinie pour tendre vers cette vitesse ultime” nous dit Patalf. Aucunement et j’explique.
    Les équations bien connues de la relativité restreinte posent le délicat problème mathématique de la division par zéro. Un résultat infini? Non, diviser par zéro revient à diviser par rien, alors c’est un cas de non-division et le résultat est indéterminé. Cherchez l’erreur. La formule e=mc² est universelle et s’applique parfaitement aux photons,
    sans exceptions.

    1. Bonjour. De mon côté, sans vouloir choquer personne, je pense que ce qu on appelle la lumière est en fait matériel, les particules étant au dessu du zéro absolu impriment un mouvement au milieu homogène qui l entouré, généralement cela induit une onde qui se propage. Une onde n a pas de masse dans le sens qu on donne a ce mot. Qui est en fait une expression de la convergence d ondes. Aucune matière n a a proprement parler de propriété de masse. La convergence d ondes amène les particules indépendantes ou organisées en atomes a se rapprocher géométriquement. C est pourquoi la somme des “masses” des particules indépendantes n est pas équivalente a ce que serait la “masse incidente totale” de ces particules lorsqu elles sont organisées en atomes (le”poids” du chat est bien supérieur au “poids” de la somme de ces particules. Donc la lumière sous forme ondulatoire n a pas de masse. Lorsque la lumière est soumise a un stress géométrique, alors elle se transforme en son équivalent particule, le photon. Si le photon est bien la plus petite particule de l univers, alors il ne peut exercer de rapprochement géométrique qu inférieur a lui même. La géométrie de l univers n est pas nécessairement sécable et finis comme ma matière et l énergie équivalente. Donc le photon sous forme particulaire peut exercer un effet gravitationnel. Mais étant inférieur a tout ce qui nous constitue, nous ne pouvons le vérifier que de manière indirecte, ou pas.

  6. Si les photons n’ont pas de masse, pourquoi sont-ils alors détournés par des trous noirs qui ont une masse exorbitante ?

    1. Peut être parce que l’espace lui même se courbe 😉 Nos petits photons suivent donc la géométrie de l’espace déformée par la gravité du fameux trou noir. Pas facile à imaginer et pourtant…

  7. Mes connaissances dans ce domaine ne sont que parcellaire, mais je me pose plusieurs questions. Si les photons n’ont pas de masse pourquoi sont il retenus dans un trou noir. C’est bien leur gravité infini qui retient tout ce qui a une masse en son sein. Mais il me semble que la gravité n’interagit qu’avec les masses et elle seule. Donc pourquoi les photons si ils n’en ont pas ? 2eme question E=MC² ça veut bien dire aussi que l’énergie et la masse sont une seule et même chose vu sous un angle différent. Donc pourquoi les lasers qui sont un faisceau de photon parviennent ils a interagir avec la matière si ils n’ont pas de masse donc pas d’énergie. Mes questions sont peut-être stupides pour un physicien mais j’aimerai bien quand même avoir une réponse simple.

  8. Oui, c’est bien là que nos physiciens ont bien du mal à fournir des explications comme se les pose Phillip sans se trouver confrontés à de sévères contradictions. Il est dit que le photon est sans masse comme une conséquence de la relativité restreinte. Mais ce ne sont pas des théories qui font des lois de la nature. C’est tout le contraire. Les lois de la nature font (ou défont) des théories inventées par des hommes, n’est-il pas?

    1. Les mots sont importants. Il ne faut pas confondre théorie, hypothèse et loi ! C’est souvent le problème des non- scientifiques qui mélangent un peu ces notions 😉

      Hypothèse : C’est une proposition provisoire qui n’a pas encore été démontrée. Elle sert de base de travail pour développer un raisonnement et expliquer des faits ou des phénomènes.

      Théorie : Une théorie est une synthèse d’idées, de principes et de conceptions formulés à propos d’un problème ou d’un phénomène. Contrairement à une loi, une théorie n’est pas une vérité absolue, mais plutôt une conception qui peut évoluer en fonction des résultats de l’expérimentation.

      Loi : Une loi décrit un phénomène observé à plusieurs reprises et prouvé vrai. Contrairement à une théorie, elle ne cherche pas à expliquer directement le pourquoi du phénomène. Par exemple, la loi de la gravitation décrit la force responsable de la chute des corps et du mouvement des corps célestes, sans l’expliquer !

      En résumé, une théorie est une explication basée sur des preuves, tandis qu’une loi est une description d’un phénomène observé. Les théories encadrent les lois, mais une loi reste une observation sans spéculation.

      La Nature ne “fait” strictement rien du tout, il n’y a pas d’action volontaire, elle ne “décide” de rien, elle est comme elle doit être. Son comportement est strictement défini (même si ns ne savons et ne comprenons pas tout). Et comme tout ce qui existe, la “Nature” est, elle aussi contrainte, certains comportements lui totalement sont interdits. Bref, il y a de la logique et de la cohérence dans tout ceci ! Heureusement, nous avons à notre disposition un langage extraordinaire, un outil fabuleux pour tenter de décrire et de comprendre ce qui se passe dans notre monde, ce sont les mathématiques, sa seule limitation est notre imagination 🙂

  9. Salutations
    Dans votre texte cosmique thèse et hypothèse de l’ univers partant d un micro et non macronique
    La métaphysique quantité ç est normal de passer2incognito pour ne pas foutre le bordel dans la classe école humaine Nous les Pleiadiens sommes ces gardiens originel orion et Vega j ai me suis arrêté en 6eme ça me faisait dormir parfois quand c’est bien barban
    C’est normal que ce flux de lumière suivent leurs rayonnement puissance infiniment en toutes leurs tranquille pépère que de porter vibratoirement leurs attention à des humains qui les triture que de les laisser vivre leurs parcours de vie avant de changer de dimension en téléportation pour continuer à se poser des questions avant la galaxie voie lactée système stellaire tranquille pour les autres civilisations anciennes Venu Appoorte la technologie lumière minérale cristal Maya Christos Atla-Ra inca aztèque Shaman Interstellaire Maître Yamata Ndirima Mbata
    Salutations

  10. Andreo .22.06.24.
    Bjr à tous, auteur et questionneurs.
    La majorité des questions-reponses concernent le fameuse équation E=m C².
    En remplaçant m par la masse du photon…on aura l’énergie de CE photon,ce qui correspond à la fréquence qui lui est associée ,est tout va bien…
    Mais ce qui va bcp moins bien c’est que ce photon-frequence se déplace à la vitesse de la lumière ….ou presque, disons C- 1 petit quelque chose ,appelons le # un infinitesimal . Alors ,la relation qui lie masse et vitesse de cette masse :
    !
    M=masse à v nulle/racine carrée de ( 1- v²/C² ) ,devient
    M= m à v nulle /racine carrée
    d’un infinitesimal, M deviendrait
    Infiniment grand..!!!
    Photon pesant…..douteux !!
    Un grand mathématicien français,Louis de BROGLIE a réussi à associer les 2 formes d’énergie “onde et corpuscule “,
    la solution n’est-elle pas là ?
    Merci à Antoine GAUTHERIE pour nous tenir informés de l’évolution de cette question.

  11. incroyable de voir autant d’experts dans les commentaires ! Je pense que si les scientifiques regardaient un peu les commentaires sur les articles du journal du geek la science ferait un bond énorme !!!!!!
    Entre les racistes qui parlent de chinoiserie et les incultes qui savent déjà tout parce qu’ils ont dû voir une vidéo sur YouTube, vraiment pas sorti de l’auberge

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