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WhatsApp, Signal et les autres messageries bientôt forcées d’abandonner une fonction de confidentialité essentielle ?

Depuis deux ans, le débat autour d’un projet de règlement européen sur le chiffrement des messageries tient en haleine les partisans des libertés numériques. Le texte vise à lutter contre la prolifération d’images et de vidéos d’abus sexuels sur des enfants. Un projet louable, mais les implications pour la confidentialité des communications inquiètent.

Le texte proposé par la Commission européenne en 2022 impose aux plateformes de messagerie des obligations de détection et de signalement des contenus pédocriminels. Les messageries chiffrées — Signal, Telegram et WhatsApp, entre autres — pourraient être contraintes de désactiver leur chiffrement pour permettre l’analyse des images et vidéos échangées par les utilisateurs. Cette perspective soulève de très sérieuses craintes concernant la surveillance généralisée des communications privées.

Un compromis autour du chiffrement de bout en bout

Un groupe de travail à Bruxelles cherche un compromis sur le projet de règlement européen visant à prévenir et combattre les abus sexuels sur enfants en ligne. Les associations de protection de l’enfance, comme Ecpat France et BeBrave, ont appelé la France à soutenir ce règlement.

Mélanie Marié, chargée de plaidoyer d’Ecpat France, souligne à l’AFP l’importance d’inclure les messageries chiffrées de bout en bout dans cette réglementation, malgré l’opposition de certains pays comme l’Allemagne. Elle appelle la France à prendre une position claire sur ce sujet. Selon le Conseil de l’Europe, un enfant sur cinq en Europe est victime de violence sexuelle, que ce soit en ligne ou dans la vie réelle.

En 2023, le NCMEC, une ONG américaine, a enregistré 100 millions de signalements de contenus sexuels impliquant des mineurs, contre 88 millions en 2022. Cette augmentation importante montre l’ampleur du phénomène.

Le projet de règlement a également attiré l’attention des députés européens. Patrick Breyer, membre du Parti pirate, a critiqué sur Twitter ce qu’il considère comme un « chantage » pour les utilisateurs de messageries chiffrées comme WhatsApp ou iMessage. Ils seraient forcés de choisir entre l’utilisation complète des fonctionnalités de ces plateformes et l’abandon du chiffrement de bout en bout.

Un texte de compromis daté du 28 mai exclut les communications audio de la détection obligatoire, mais maintient cette obligation pour les contenus visuels, les images, les vidéos et les URL, comme le rapporte Euractiv. Les utilisateurs devront consentir à cette détection, sinon ils ne pourront utiliser que les parties des services n’impliquant pas l’envoi de contenus visuels.

Le chiffrement de bout en bout est essentiel pour la confidentialité des communications, car il empêche toute lecture des messages par des tiers, y compris par les fournisseurs de services comme WhatsApp ou Signal. Certains estiment pourtant que cette technologie entrave la détection des contenus pédocriminels.

Pour appliquer ce règlement, les fournisseurs de ces messageries devront utiliser des technologies de détection et de prévention de ce type de contenus avant leur transmission aux autorités policières et judiciaires. Les injonctions de détection ne s’appliqueront pas aux comptes utilisés à des fins de sécurité nationale ou militaire.

Ce sont les autorités nationales de coordination, sous la supervision d’autorités judiciaires ou administratives indépendantes, qui émettront ces injonctions. Les fournisseurs devront signaler les contenus potentiellement pédocriminels sans accéder directement aux informations et conserver les données relatives aux résultats pendant au moins douze mois.

La France, qui avait précédemment freiné l’avancement de ce dossier, pourrait désormais soutenir le texte de compromis, ce qui permettrait ainsi sa progression au sein du Conseil de l’UE. Il y aura encore des discussions et des négociations avant que le texte aboutisse en l’état. Mais la crainte est réelle de voir le chiffrement de bout en bout s’évaporer des messageries…

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