Le Trace Gas Orbiter (TGO) de la mission ExoMars, un engin déployé en orbite de la Planète Rouge par l’ESA pour étudier la chimie de l’atmosphère martienne, a récemment trouvé de l’eau sous forme de givre dans une région où les chercheurs pensaient qu’il ne pouvait pas exister. Une découverte qui pourrait s’avérer cruciale pour comprendre l’histoire et la dynamique de l’eau sur Mars.
Ce n’est pas la première fois que du givre est identifié sur cette planète. Le TGO lui-même en avait déjà trouvé des traces auparavant, notamment dans les régions polaires. En revanche, c’est la toute première fois que sa présence est confirmée dans le Tharsis. II s’agit d’une région remarquable qui contient 12 énormes volcans dont Arsia Ascraeus, Ceraunius Tholus, et surtout Olympus Mons — le plus grand volcan de tout le système solaire qui culmine à presque 30 kilomètres d’altitude.
Une découverte très inattendue
C’est au sommet de ces trois titans géologiques que la sonde a trouvé du givre. Tous les jours, pendant quelques heures autour du lever du Soleil, ces énormes édifices se retrouvent couverts d’un duvet blanchâtre extrêmement fin. Son épaisseur est à peine supérieure à celle d’un cheveu, mais la surface qu’il recouvre est très importante, et cela représente une quantité d’eau considérable ; les chercheurs estiment qu’au pic du phénomène, le Tharsis héberge plus de 110 millions de litres d’eau gelée !
C’est un constat qui a pris les chercheurs au dépourvu, car jusqu’à présent, tout le monde pensait que cette région de faible latitude était fondamentalement incapable d’héberger du givre. « On pensait que c’était impossible autour de l’équateur de Mars, car la combinaison de la lumière du Soleil et de la finesse de l’atmosphère maintient des températures relativement élevées aussi bien à la surface qu’au sommet des reliefs — contrairement à ce que l’on observe sur Terre, où on s’attend à voir des pics givrés », explique Adomas Valantinas, le postdoctorant à l’origine de cette découverte.
Un microclimat à l’origine du phénomène
Il faudra des études complémentaires pour faire toute la lumière sur les mécanismes qui pourraient entrer en jeu ; mais l’équipe de chercheurs estime déjà avoir une idée assez claire de la situation. Leur hypothèse repose en grande partie sur les caldeiras — les vastes cratères laissés au sommet des volcans par les éruptions. Selon l’équipe, la circulation de l’air au-dessus de ces structures crée un microclimat singulier qui pourrait aider le givre à s’installer dans les zones ombragées.
« Les vents grimpent les pentes des montagnes, transférant ainsi de l’air relativement humide de la surface aux sommets où il se condense sous forme de givre », explique Nicolas Thomas, co-auteur de l’étude. « C’est quelque chose que l’on voit déjà sur Terre et dans d’autres régions de Mars ; ce même phénomène est par exemple à l’origine des nuages saisonniers au-dessus d’Arsia Mons », précise-t-il.
Une excellente nouvelle pour les futurs explorateurs
« Trouver de l’eau à la surface de Mars, c’est toujours excitant en termes d’intérêt scientifique, mais aussi parce que cela regorge d’implications pour l’exploration humaine et robotique. Mais cette découverte-là est particulièrement fascinante », résume Colin Wilson, planétologue de l’ESA.
Si la présence de ce matériau est si enthousiasmante, c’est qu’elle va aider les chercheurs à affiner les modèles qui décrivent la dynamique atmosphérique de Mars. Ces travaux pourraient avoir des tas d’implications potentielles pour l’histoire géologique de la planète, et même jouer un rôle dans les futures missions d’exploration.
Un jour, un rover partira peut-être explorer la caldeira d’Olympus Mons, comme Perseverance le fait déjà dans le delta du cratère de Jezero. Mais à plus long terme, il est probable que les humains partent également visiter la Planète Rouge. Et lorsqu’une telle mission sera d’actualité, il sera très important de savoir exactement où et quand chercher de l’eau sous n’importe quelle forme. Si cette échéance est encore relativement abstraite en 2024, d’ici quelques années, on se souviendra peut-être de cette découverte comme d’une étape importante dans l’histoire de l’exploration martienne.
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