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156 300 milliards d’images par seconde : voici la caméra la plus rapide du monde !

SCARF, un concept imaginé par les ingénieurs canadiens de l’INRS, est capable de capturer des phénomènes exceptionnellement brefs qui pourraient faire progresser plusieurs branches de la science.

Une équipe d’ingénieurs de l’INRS, l’équivalent québécois du CNRS, a récemment réalisé un sacré exploit technique. Dans un communiqué repéré par New Atlas, ils ont annoncé avoir créé la caméra la plus rapide du monde — et les chiffres sont assez ahurissants. Jugez plutôt : leur système est capable de capturer… 156 300 milliards d’images par seconde ! Un nouveau record qui promet d’ouvrir de nouvelles portes aux chercheurs.

Pour resituer ce chiffre dans son contexte, on peut le comparer à ceux que proposent d’autres systèmes vidéo plus courants. Par exemple, de nombreux smartphones haut de gamme proposent désormais des modes slow-mo qui permettent de filmer à plusieurs centaines d’images par seconde. Pour aller plus loin, il faut se tourner vers des caméras professionnelles hors de prix comme celles de la marque Phantom, spécialisée dans les caméras ultrarapides.

Par exemple, son modèle T4040 est capable de tourner à un impressionnant 9300 IPS en résolution 2560 x 1664. En réduisant la résolution, ce véritable monstre vendu plusieurs dizaines de milliers d’euros est même capable d’atteindre 440 000 images par seconde, d’après la fiche du produit… mais c’est encore 350 millions de fois plus lent que le nouveau système imaginé par les chercheurs canadiens !

Phantom T4040
La Phantom T4040 est extrêmement rapide, mais encore très, très loin de pouvoir rivaliser avec le SCARF. © Phantom

Un gros défi d’ingénierie

Pour atteindre ce score ahurissant, les chercheurs se sont appuyés sur une technologie qu’ils explorent depuis 2014 : la photographie ultrarapide compressée, ou CUP (pour Compressed Ultrafast Photography). Les performances de leur premier modèle étaient déjà remarquables, avec environ 100 milliards d’images par seconde au compteur. Mais au fil des années, ils ont réussi à repousser les limites de plus en plus loin. En 2020, ils ont accouché d’une nouvelle version baptisée CUSP, pour Compressed Ultrafast Spectral Photography, qui a atteint les 70 000 milliards d’images par seconde. Avec leur nouveau prototype, baptisé SCARF (Swept-Coded Aperture Real-time Femtophotography), ils ont encore réussi à doubler ce score.

Comme son nom l’indique, il est capable de capturer des événements qui se déroulent à l’échelle de la femtoseconde, soit un millionième de milliardième de seconde. Le problème, c’est qu’à cette échelle de temps, les méthodes de capture traditionnelles ne fonctionnent qu’avec des objets parfaitement inertes, ou des phénomènes qui se reproduisent exactement de la même manière à chaque fois. Un obstacle qui limitait considérablement l’intérêt scientifique de cette technologie. « Par exemple, des phénomènes comme l’interaction d’une onde de choc avec une cellule vivante ou le chaos optique ne peuvent pas être étudiés de cette façon », explique Jinyang Liang, le meneur de cette équipe de recherche.

Diviser pour mieux régner

Pour arriver à ce résultat, l’équipe a dû dévier de l’approche traditionnelle. En règle générale, on cherche à capturer des séries d’images complètes” qui sont mises bout à bout pour reconstituer un mouvement. Dans le cas de ces caméras scientifiques ultrarapides, la capture est synchronisée avec les pulsations d’un laser ultrarapide qui permet d’illuminer la scène à un rythme bien précis.

Or, même les systèmes laser les plus performants du monde sont incapables d’émettre des pulsations de moins de quelques femtosecondes, ce qui est trop long pour espérer dépasser les 150 000 milliards d’images par seconde. Au lieu de développer un laser encore plus rapide, les chercheurs ont donc trouvé une autre approche très élégante. Elle consiste à travailler non pas avec l’intégralité du faisceau, mais avec ses différents constituants.

Light Shearing Scar
Une représentation de la séparation du spectre lumineux qui permet à cette caméra d’enregistrer des mouvements de l’ordre de la femtoseconde. © Liu et al.

La lumière peut être décomposée en différents domaines qui correspondent chacun à une longueur d’onde précise (620 à 750 nm pour le rouge, par exemple). Pour exploiter cette propriété, les auteurs ont développé un système qui permet de modifier très légèrement le timing des différentes composantes du spectre lumineux. Après avoir traversé l’objet, elles passent à travers un masque qui se comporte comme un système d’encodage avec un très léger décalage ; les longueurs d’onde dans le domaine du rouge arrivent les premières, suivies de l’orange, et ainsi de suite jusqu’au violet. Au lieu de reconstituer le mouvement en empilant des images “complètes”, la vidéo est donc produite en analysant les différences minuscules qui surviennent d’une “couleur” à l’autre.

Une ribambelle d’applications très prometteuses

Cette technologie présente un potentiel considérable dans de nombreuses branches de la recherche scientifique, puisqu’il permet d’appréhender des phénomènes exceptionnellement fugaces que la science a encore du mal à comprendre. Par exemple, cette caméra pourra permettre d’observer des réactions chimiques ultrarapides entre des protéines ou des molécules — une perspective très alléchante pour les biologistes structuraux et les chercheurs en pharmacologie, par exemple.

Plus largement, cela pourrait aussi générer de grand progrès en sciences des matériaux, notamment dans le domaine des nanotechnologies. On peut aussi citer la physique fondamentale ; le SCAR pourrait par exemple capturer des détails inédits sur le comportement du plasma et des particules de haute énergie. Avec des implications profondes pour l’astrophysique, la physique des particules, ou encore la recherche appliquée à la fusion nucléaire. Même chose pour la dynamique des fluides ; observer des phénomènes comme les turbulences, les ondes de choc ou la cavitation pourrait déboucher sur des avancées remarquables en aéronautique, en hydrodynamique, et même en médecine.

Enfin, ce dispositif pourrait révéler des détails encore inconnus sur le comportement de la lumière en elle-même. De quoi mieux comprendre des phénomènes mystérieux comme le chaos optique, ou faire avancer des disciplines émergentes comme l’informatique photonique. Il sera donc assez fascinant de se pencher sur les nouveaux travaux révolutionnaires auxquels cette technologie va sans doute ouvrir la voie.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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Source : INRS

3 commentaires
  1. Article très intéressant qui nous change des frequents et insipides sujets : xiaomi, problème 3 corps, Ios 3500 …

    Merci beaucoup

  2. C’est une technologie très bien connue des Houagoold qui permet de stocker 150 000 milliard d’images en 4K par seconde sur une clef USB.2. alors quelle n’est même pas dans le port. C’est ouf …

Les commentaires sont fermés.

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