Si comme nous, vous restez un poil traumatisés par certains souvenirs d’enfance liés à la découverte du Voyage de Chihiro d’Hayao Miyazaki (sorti en 2001), vous risquez de ne pas ressortir indemne du Royaume des Abysses. Sorti à la fin de l’année 2022 en Chine, le métrage d’animation réalisé par Tian Xiaopeng a quitté ses frontières natales pour atterrir chez nous. Après avoir brillé au festival d’Annecy 2023, le film a confirmé une sortie au cinéma pour le 21 février prochain.
Chihiro à la mer
Difficile de ne pas comparer Le Royaume des Abysses à ses ainés, et notamment au superbe Voyage de Chihiro sorti vingt ans plus tôt. Le voyage initiatique de la petite Shenxiu est un plongeon, intime et plus sombre qu’il n’y parait. Reste que l’onirisme n’est jamais loin. En découvrant le monde des abysses, la petite fille va aussi découvrir une population étrange, concentrée dans un restaurant moite et animé. Toutes celles et ceux qui croiseront la route de l’héroïne n’auront pas que des intentions bienveillantes à son égard, à commencer par le mystérieux Capitaine Nanhe, qui décide de la prendre sous son aile. Entre fascination et danger, le souvenir du royaume des esprits nous rappelle au bon souvenir de l’enfance, dans toute sa cruauté.
Avis de tempête
Derrière le synopsis de base (une enfant perdue à la recherche de sa mère disparue), les thématiques abordées sont puissantes, matures, et parfois incroyablement dures. Reste que Tian Xiaopeng réussit le pari de traiter tous ses sujets avec poésie autant qu’avec pessimisme. Le deuil, la mort, la colère, la trahison… Le Royaume des Abysses est une tempête d’émotions, que les spectateurs devront traverser main dans la main avec l’héroïne du film.
Saupoudrez le tout de scènes violentes et angoissantes, pendant lesquelles un étrange fantôme rouge cherche à détruire aveuglément tout ce qui l’entoure, et vous obtenez un résultat entre deux eaux, tantôt explosif, tantôt contemplatif, mais toujours imprévisible. On n’en dira pas plus pour éviter le spoil, mais la fin est à la hauteur du reste du film : cryptique, poétique, et profondément difficile.
Un tsunami visuel
Comme un trésor au milieu des océans, Le Royaume des Abysses brille dans le paysage cinématographique de ce début d’année. Le film n’a pas l’ambition d’un blockbuster, mais son animation et ses partis pris graphiques sont une claque de plein fouet. La palette de couleur qui donne vie au monde sous-marin est riche, fourmillante de détails. Les personnages évoluent dans l’eau comme dans un rêve éveillé, et le métrage s’impose comme une expérience sensorielle rare. L’eau et ses habitants remuent, dansent et dégoulinent parfois, dans une chorégraphie hypnotisante et intense.
À déconseiller aux plus sensibles et aux jeunes enfants, Le Royaume des Abysses vous maintient la tête sous l’eau pendant près de deux heures. Vous n’en sortirez sans doute pas indemnes, mais le film n’en reste pas moins sacré voyage, autant qu’une leçon d’animation. Rendez-vous le 21 février au cinéma pour découvrir l’œuvre de Tian Xiaopeng, qui promet déjà de faire date dans l’histoire de l’animation.
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