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Batteries solides : un nouvel électrolyte prometteur identifié grâce à l’IA

Une collaboration entre Microsoft et un laboratoire de recherche américain a conduit à la découverte d’un nouvel électrolyte qui pourrait être utilisé dans une nouvelle génération de batteries très performantes. Mais ces travaux illustrent surtout le potentiel du machine learning pour la recherche scientifique dans son ensemble.

La science des matériaux fait partie de ces domaines où le machine learning pourrait jouer un rôle déterminant dans le futur, avec des implications techniques très concrètes. Nous l’avons encore constaté récemment avec GNoME, le système de DeepMind qui permet d’identifier de nouveaux cristaux susceptibles d’ouvrir la voie à des technologies révolutionnaires (voir notre article).

Récemment, c’est Microsoft et le le Pacific Northwest National Laboratory (PNNL) qui l’ont prouvé une nouvelle fois. Le titan du numérique et le laboratoire se sont appuyés sur l’IA pour découvrir un nouveau matériau qui, à terme, pourrait participer à un grand changement de paradigme dans l’industrie de l’énergie.

La chasse aux électrolytes solides

Plus spécifiquement, les deux acteurs du projet ont présenté un nouvel électrolyte. Ce terme générique désigne des substances contenant des ions mobiles, ce qui donne des propriétés conductrices au matériau. Ils jouent notamment un rôle central dans le fonctionnement des batteries.

Aujourd’hui, la majorité des batteries qui alimentent les objets du quotidien s’appuient sur des électrolytes liquides. C’est notamment le cas des fameuses batteries Li-ion. Mais de plus en plus d’institutions travaillent sur le développement de batteries à électrolytes solides. Il s’agit d’une technologie très prometteuse, car ce genre d’accumulateur présente des avantages considérables par rapport aux batteries à électrolytes liquides : densité énergétique plus élevée, charge plus rapide, gestion thermique moins contraignante, risque d’incendie plus faible, impact environnemental moins important…

Mais si ces batteries solides sont déjà utilisées dans certains objets comme les pacemakers depuis des décennies, elles ne se sont pas encore imposées à grande échelle. Pour des raisons à la fois économiques et techniques, elles sont encore loin de remplacer les batteries au lithium qui sont omniprésentes aujourd’hui.

Le principal enjeu, c’est d’identifier de nouveaux électrolytes solides stables, peu chers et performants pour ouvrir la voie à cette grande transition. Or, cela implique de trouver de nouveaux matériaux qui n’existent souvent pas à l’état naturel, de les synthétiser et de les tester individuellement — un vrai travail de fourmi, essentiellement empirique et extrêmement chronophage.

L’IA à la rescousse

Mais cela commence à changer grâce aux outils modernes basés sur l’IA. Ces algorithmes sont capables de prémâcher le travail en identifiant rapidement des tas de substances prometteuses, afin que chercheurs en science des matériaux puissent se concentrer sur les tests et la mise en application.

C’est précisément ce que Microsoft et le PNNL ont cherché à faire à travers leur collaboration. L’entreprise a contacté le laboratoire pour lui proposer de travailler avec Azure Quantum Elements, une branche de sa plateforme de cloud computing taillée pour la recherche en chimie et en science des matériaux.

Les chercheurs du PNNL l’ont utilisée pour faire tourner un algorithme de machine learning spécifiquement entraîné pour identifier des électrolytes solides potentiels en se basant sur leur structure atomique. Ils ont rapidement obtenu une liste de 32 millions de candidats. Dans un second temps, ils ont utilisé d’autres outils IA pour dégrossir la liste afin d’exclure les matériaux trop instables pour être utilisés dans une batterie. La liste a ainsi été réduite à environ 500 000 candidats — un chiffre plus raisonnable qui a permis aux chercheurs de changer d’approche.

Microsoft Ia électrolye
© Microsoft

Ils ont ensuite pivoté vers des méthodes basées sur la force brute. Cela leur a permis de tester individuellement les propriétés théoriques de ces matériaux à l’aide de supercalculateurs extrêmement performants. Après deux vagues de test supplémentaires, les chercheurs ont pu isoler 800, 150 puis 18 candidats particulièrement convaincants.

À partir de là, ce sont les humains qui ont pris le relais. Ils ont passé ces 18 matériaux au peigne fin pour trouver le plus prometteur, qu’ils ont ensuite synthétisé pour pouvoir le tester en conditions réelles.

Un matériau prometteur et une belle preuve de concept

Au terme de ce processus, ils sont arrivés à un électrolyte solide aux propriétés très intéressantes. Il s’est notamment montré stable et fortement conducteur dans une large gamme de températures.

Et la cerise sur le gâteau, c’est que la synthèse ce matériau nécessite environ 70 % de lithium en moins par rapport aux électrolytes des batteries Li-ion actuelles. Un avantage significatif puisque ce matériau tend à devenir de plus en plus inaccessible, notamment à cause de l’augmentation exponentielle de la demande liée à l’essor de l’automobile électrique.

Cela ne signifie pas que les batteries traditionnelles vont être remplacées dans un futur proche, loin de là. Il reste de très nombreuses étapes pour confirmer la viabilité de ce matériau à l’échelle industrielle.

Le vrai intérêt de ces travaux, c’est qu’ils montrent de manière très concrète comment la combinaison du machine learning et de l’informatique haute performance peut accélérer le processus de découverte en sciences des matériaux. Une perspective très enthousiasmante connaissant les innombrables implications pratiques de cette discipline. Au-delà de l’énergie, cette démarche pourrait aussi conduire à de grandes avancées dans des domaines comme le génie civil, l’aérospatiale, et ainsi de suite.

Plus largement, cela concerne aussi d’autres branches de la recherche comme la médecine, où cette approche va sans doute contribuer à la découverte de nouveaux médicaments ou antibiotiques. Il conviendra donc de garder un œil sur les travaux de Microsoft et du PNNL, mais aussi de toutes les autres institutions qui sont en train de faire passer la science dans une nouvelle ère à l’aide de ces outils basés sur l’intelligence artificielle.

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