Dans un communiqué repéré par SciencePost, une équipe de chercheurs américains a raconté comment elle a réussi à communiquer pour la première fois avec une baleine à bosse… et comment cette rencontre étonnante pourrait nous aider à discuter avec des extraterrestres.
Cela fait des siècles que les humains cherchent à comprendre les animaux afin de pouvoir discuter avec eux. Dès l’antiquité, des milliers d’années avant notre ère, les Égyptiens et les Grecs s’intéressaient déjà au comportement et aux modes de communication des animaux.
Au XXe siècle, ces travaux ont pris un nouveau tournant avec l’émergence de l’éthologie moderne et de nouvelles technologies de plus en plus perfectionnées. Aujourd’hui, les chercheurs ont accès à des techniques d’observation et des appareils d’enregistrement sophistiqués qui permettent de mieux comprendre comment les animaux s’adressent les uns aux autres. Il existe aujourd’hui des tas de chercheurs qui travaillent sur le langage des singes, des oiseaux, ou encore des mammifères marins comme les dauphins ou les baleines à bosse.
La première “conversation” avec une baleine à bosse
Ces dernières sont particulièrement fascinantes pour les chercheurs, car elles disposent d’un système de communication exceptionnellement élaboré qui témoigne de leurs grandes capacités intellectuelles. « Les baleines à bosse sont des animaux extrêmement intelligents ; elles ont une structure sociale complexe, utilisent des outils — des “filets” de bulles pour attraper des poissons », et surtout, elles communiquent très régulièrement à l’aide de chants et d’appels sociaux », explique Fred Sharpe, co-auteur de l’étude associé à l’Alaska Whale Foundation.
Ce sont ces majestueux cétacés qui étaient au centre des travaux d’une équipe de chercheurs américains. Ils ont enregistré des vocalisations de baleines à bosse à l’aide d’un hydrophone avant de les diffuser en direction d’un individu baptisé Twain — et ce dernier a répondu à l’appel. En réponse à ce signal, il s’est approché du bateau des scientifiques et a commencé à tourner autour de l’embarcation en produisant ses propres vocalisations.
À partir de là, l’équipe a pu alimenter un échange que l’on pourrait presque décrire comme un dialogue. Pendant une vingtaine de minutes, ils ont répondu « dans un style conversationnel » à chaque vocalisation de Twain en diffusant d’autres enregistrements, en prenant bien soin de respecter les intervalles de temps généralement observés dans les communications entre les baleines.
Évidemment, les chercheurs ne comprenaient pas le contenu de cette discussion. À ce jour, personne n’est encore capable de traduire directement les vocalisations des baleines en langage humain. Mais les auteurs estiment tout de même qu’ils ont atteint un niveau d’interactivité inédit. « Nous pensons que c’est la première fois qu’un tel échange communicatif a lieu entre des humains et des baleines à bosse dans leur langage », se réjouit Brenda McCowan, chercheuse à l’Université de Californie et auteure principale de l’étude.
Des chasseurs d’aliens au contact des baleines
Il s’agit donc d’une expérience très intéressante, même si ses implications sont assez limitées en termes d’éthologie. Mais ce n’était pas l’objectif des chercheurs. Pour comprendre la vraie finalité de ces travaux, il faut s’intéresser à la troisième institution qui a pris part à l’étude. En plus de l’Alaska Whale Foundation et de l’Université de Californie, qui travaillent déjà sur les baleines depuis de longues années, des chercheurs du SETI étaient aussi impliqués dans ces travaux. La présence de cet organisme a de quoi surprendre, car cette organisation est spécialisée dans un domaine qui n’a rien à voir avec les mammifères marins : la recherche d’une intelligence extraterrestre.
Les deux disciplines sont évidemment très différentes. Contrairement aux éthologues, qui peuvent observer des espèces bien documentées pour étudier le comportement, les chercheurs du SETI manquent cruellement de ressources. À ce jour, il n’y a même aucune preuve irréfutable qu’une autre forme de vie intelligente existe quelque part dans le cosmos. Tout l’enjeu, c’est donc de pouvoir identifier un éventuel message extraterrestre ; avant de pouvoir communiquer avec des aliens, il faudrait d’abord être capable de réaliser qu’ils essaient de s’adresser à notre espèce.
C’est une problématique loin d’être triviale. En effet, l’univers est parcouru en permanence par de très nombreux signaux. Les astronomes captent très régulièrement des ondes électromagnétiques et des particules de haute énergie dont l’origine n’est pas toujours évidente. En théorie, il n’est pas impossible que des messages extraterrestres soient encodés dans certains de ces signaux — mais si c’est effectivement le cas, comment faire la différence ?
S’entraîner à reconnaître un éventuel message alien
Pour séparer les phénomènes naturels d’un éventuel message artificiel, les chercheurs du SETI ont mis au point une stratégie assez prometteuse : disséquer les signaux pour en déterminer le degré de complexité. En effet, on peut raisonnablement partir du principe qu’un message alien présenterait différents types de motifs bien spécifiques, organisés selon une structure particulière. Un peu comme les langues humaines qui sont conditionnées par des règles grammaticales bien définies.
Or, c’est quelque chose qu’il est possible de déterminer à l’aide d’outils mathématiques poussés. Même sans comprendre le sens d’un message, ces méthodes analytiques peuvent mettre en évidence des motifs susceptibles de révéler un haut degré de complexité, et par extension, la nature intentionnelle d’un message.
C’est une approche prometteuse, mais qui se heurte tout de même à une limite majeure. Il est difficile de peaufiner ces outils analytiques, puisque jusqu’à preuve du contraire, nous n’avons toujours pas de message extraterrestre sur lequel se baser.
C’est là qu’interviennent les baleines à bosse. En analysant méticuleusement les interactions de ces êtres si intelligents, les chercheurs tentent de développer des filtres pour déterminer le niveau de complexité d’un signal. Dans l’idéal, ces filtres seront ensuite appliqués à divers signaux captés par les astronomes pour déterminer s’ils pourraient éventuellement provenir d’une forme de vie intelligente.
Rien ne dit que cette initiative sera récompensée un jour — mais c’est une constante dans la recherche d’intelligence extraterrestre. Cette discipline demeure très exploratoire, pour des raisons évidentes. Il faudra donc s’armer de patience en espérant que ces efforts finiront par payer.
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