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Pluton : l’éruption d’un supervolcan pointe vers un océan souterrain

Comme Encelade ou Europe, la planète naine pourrait héberger un océan sous sa surface; mais les chercheurs ont du mal à expliquer pourquoi il ne s’est pas encore solidifié.

En 2015, la sonde New Horizons est entrée dans l’histoire en devenant le tout premier engin à visiter Pluton, la planète naine aux confins de notre système solaire. Et presque dix ans plus tard, les chercheurs continuent de faire des découvertes fascinantes dans les données rapportées par cette mission.

Tout récemment, une équipe de chercheurs américains s’est replongée dans ces données pour s’intéresser à une région appelée Sputnik Planitia, en hommage au tout premier satellite artificiel lancé par l’humanité en 1957.

D’après Space.com, ils y ont trouvé un vaste cratère aux propriétés inhabituelles. Selon les auteurs, il ne s’agit pas de l’impact d’un autre corps céleste ; il manquait le petit monticule central qui apparaît lors de ces collisions. Cette cicatrice serait plutôt due à l’éruption d’un supervolcan, il y a quelques millions d’années à peine — une durée très courte par rapport à l’âge du système solaire.

Un ” supercryovolcan ” ?

Au-delà de ses dimensions impressionnantes (il mesure environ 44 kilomètres de diamètre), il se distingue aussi par le mécanisme qui a généré cette éruption. En effet, ce cratère baptisé Kiladze n’a pas rejeté de roches ou de lave telle qu’on en trouve sur Terre. À proximité de l’édifice, les chercheurs ont identifié de grandes quantités de glace d’eau. « Elle se démarque clairement de la glace de méthane qui recouvre presque toute la planète », explique Dale Cruikshank, auteur principal de l’étude cité par Space.com.

La zone centrale du cratère du Kiladze sur Pluton
La zone centrale du cratère du Kiladze. © Cruikshank et al.

Cela indique que l’éruption a émis ce que les planétologues appellent du cryomagma. Ce terme désigne un mélange de composés volatils tels que la glace d’eau, de l’ammoniac, le méthane ou le dioxyde de carbone. C’est donc un témoin du processus de cryovolcanisme.

Comme avec le volcanisme terrestre, lorsque la pression souterraine dépasse un certain seuil critique, tout ce matériel peut se retrouver violemment éjecté dans un grand panache. D’immenses cryovolcans ont déjà été documentés sur les lunes gelées comme Europe, Ganymède ou Encelade.

Selon les chercheurs, ces données donnent du crédit à plusieurs autres études qui ont suggéré que Pluton pouvait héberger un vaste océan souterrain, comme les trois lunes citées plus haut. Cette hypothèse avait été renforcée en 2022, quand des chercheurs ont décrit plusieurs petits cryovolcans potentiels.

D’où vient la chaleur ?

Or, pour entrer en éruption, ces cryovolcans ont typiquement besoin d’une source de chaleur. L’existence de ces cryovolcans, et en particulier du gigantesque cratère de Kiladze, n’est donc pas anodine. Cela suggère fortement que l’intérieur de Pluton abrite encore beaucoup plus de chaleur que ce que l’on pensait jusqu’à présent.

L’autre point intéressant, c’est l’âge estimé de cette éruption. À partir de la couche de glace de méthane, ils ont pu estimer que l’événement avait eu lieu il y a environ trois millions d’années. Or, à cause de sa petite taille, Pluton aurait déjà dû perdre toute sa chaleur interne bien avant cette époque. Cette contradiction témoigne de l’existence d’un mécanisme qui empêche cet océan souterrain de geler complètement.

L’explication la plus évidente serait que le cœur de Pluton contient de grandes quantités d’éléments radioactifs qui continuent d’émettre de la chaleur. Mais selon Space.com, cette hypothèse semble incompatible avec les conclusions de précédentes études sur la composition de la planète naine.

Les chercheurs vont donc continuer d’éplucher les données de New Horizon. Avec un peu de chance, ils y trouveront de nouveaux éléments qui permettront d’y voir plus clair. Autrement, ce mystère risque de perdurer encore un long moment, car aucune agence spatiale n’a prévu de renvoyer un engin vers Pluton à l’heure actuelle.

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