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Comment la NASA garde les légendaires sondes Voyager en vie

Ces engins historiques sont peut-être en fin de course, mais la NASA ne lésine pas sur les efforts pour leur offrir quelques années de sursis.

En 2022, la NASA a dévoilé des nouvelles peu rassurantes au sujet des deux sondes Voyager. Après presque un demi-siècle d’activité, ces deux engins iconiques perdent progressivement leur capacité à générer de l’énergie, et se dirigent donc vers la fin de leur grande épopée.

Mais les ingénieurs ne comptent pas rester les bras croisés en attendant l’issue fatidique. En ce moment, ils s’acharnent à trouver des solutions de plus en plus astucieuses pour repousser l’inévitable.

Ces efforts ont débuté en 2022, lorsque l’ordinateur de bord de Voyager 1 a commencé à envoyer des rapports complètement brouillés. Après des mois de diagnostic, la NASA a réussi à trouver l’origine du dysfonctionnement. Le coupable était l’AACS, un système de contrôle qui se trompait de destinataire. Au lieu d’adresser les commandes à l’ordinateur comme prévu, il se contenter de les inscrire dans sa mémoire, ce qui a fini par lui faire perdre les pédales.

Une cure de jouvence logicielle

L’origine exacte de ce glitch n’a jamais été identifiée. Mais au lieu de s’acharner à le résoudre, les ingénieurs ont préféré déployer un patch qui a modifié le fonctionnement de l’AACS en profondeur, afin qu’il ne puisse plus jamais se tromper. Or, sur un engin aussi ancien, c’est malheureusement plus facile à dire qu’à faire. L’architecture du code est carrément préhistorique par rapport aux standards actuels.

Mais même avec toutes ces précautions, il reste un risque que la mise à jour soit mal interprétée par cet ordinateur de bord capricieux. Elle pourrait alors écraser certaines fonctions essentielles. Pour cette raison, lorsque le patch a été transmis le 20 octobre, la NASA ne l’a installé que sur Voyager 1 dans un premier temps, afin de vérifier que tout se passe comme prévu avant de faire de même sur son jumeau.

Pour l’instant, la mise à jour n’a pas généré de problème supplémentaire — mais la NASA reste prudente. Elle fera un dernier état des lieux le 28 octobre, et si les résultats sont satisfaisants, les ingénieurs mettront également Voyager 2 à jour. En théorie, les deux engins devraient donc être immunisés contre ce problème qui aurait pu conduire à la perte pure et simple des deux sondes. « Ce patch est comme une politique d’assurance qui va nous protéger à l’avenir, et nous aider à garder les sondes en vie le plus longtemps possible », explique Suzanne Dodd, responsable de la mission Voyager.

Mais ce serait presque trop facile si le souci n’était que logiciel. Malheureusement, les sondes rencontrent aussi des problèmes matériels — et ceux-ci sont beaucoup plus difficiles à résoudre.

Des compromis au service de la longévité

À long terme, le plus grave est celui de la production d’énergie dont la NASA avait déjà parlé l’année dernière. Les réacteurs au plutonium des sondes perdent en efficacité petit à petit ; cela a forcé l’agence à mettre une bonne partie des instruments à la retraite, afin d’accorder un sursis aux outils indispensables. Mais il y a un autre point encore plus menaçant sur le à moyen terme.

Pour apporter la moindre contribution scientifique, les Voyagers doivent évidemment communiquer avec la Terre. Ils doivent donc garder leur antenne pointée vers notre planète grâce à une série de propulseurs capables de réorienter l’engin. Ces petits moteurs sont alimentés par une série de minuscules conduites de carburant, et c’est là que réside le problème.

À chaque fois qu’un des propulseurs est mis en marche, un petit dépôt se forme dans ces tuyaux. Et après 46 ans de bons et loyaux services, l’accumulation progressive de ce matériel est devenue inquiétante. Si elle dépasse un seuil critique, certains propulseurs pourraient cesser de fonctionner ; la sonde sera donc incapable de réorienter son antenne correctement, et perdra définitivement le contact avec la Terre.

Évidemment, procéder à un nettoyage de printemps n’est pas envisageable, sachant que les deux sondes naviguent à plus de 15 milliards de kilomètres de la Terre ! Pour les ingénieurs, tout l’enjeu est donc de retarder l’inévitable. Comme avec le sacrifice de certains instruments pour économiser de l’énergie, cela implique de faire quelques compromis.

Pour réduire autant que possible l’accumulation de ces dépôts, ils ont choisi de faire des concessions sur l’orientation de l’antenne. Elle sera désormais autorisée à s’écarter un petit peu plus de sa position idéale. Cela va impacter la stabilité du signal, et la NASA s’attend à perdre quelques bits de données. En revanche, cela permettra de réduire la fréquence des corrections ; Voyager 1 et 2 vont utiliser leurs propulseurs moins souvent, ce qui réduira la vitesse d’accumulation du dépôt. Malgré les pertes de signal occasionnelles, cette approche devrait permettre de récupérer plus de données sur le long terme, puisque les sondes pourront opérer plus longtemps.

Un combat perpétuel contre le temps

Mais les ingénieurs ne sont pas au bout de leurs peines pour autant. Il y a de fortes chances que d’autres problèmes finissent par survenir. La NASA va donc continuer à surveiller attentivement ce duo à l’âge canonique, et chercher de nouvelles approches innovantes pour prolonger leur mission.

« L’équipe est confrontée à de nombreux problèmes pour lesquels il n’y a pas de solution évidente », explique Linda Spilker, ingénieure au Jet Propulsion Lab de la NASA. « Mais ils continuent à trouver des solutions créatives. »

Espérons qu’ils y parviendront encore quelque temps, pour que Voyager 1 et 2 continuent de nous faire rêver encore quelques années. Après tout, ce sont des engins fabuleux qui peuvent s’enorgueillir d’un immense exploit; aucune autre machine humaine n’a voyagé aussi loin que les deux explorateurs, qui évoluent respectivement à 18 et 22 milliards de kilomètres de la Planète bleue. Ils continuent donc de nous abreuver de données sur les confins du cosmos à travers cette grande épopée qui a marqué l’imaginaire collectif au fer rouge.

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