Les lasers font aujourd’hui partie de notre quotidien, que ce soit dans les communications, la fabrication, la médecine, la défense, l’audiovisuel, l’astronomie, et encore un tas d’autres branches de la recherche scientifique. Mais dans tous ces cas de figure, aussi divers et variés soient-ils, ont un point commun : il existe un nombre très limité de manières de dévier le flux de photons.
La plus évidente consiste à exploiter les propriétés réfléchissantes d’un matériau, comme l’aluminium ou l’argent utilisé dans le revêtement des miroirs. Alternativement, on peut aussi s’appuyer sur la réfraction. Lorsqu’une onde comme la lumière passe dans un autre milieu transparent qui présente des propriétés différentes (plus précisément, un indice de réfraction différent), le front de l’onde se retrouve dévié. C’est par exemple pour cette raison qu’un faisceau laser change de direction lorsqu’il pénètre dans l’eau, ou dans une couche plus ou moins dense de l’atmosphère.
Il existe d’autres manières plus subtiles d’y parvenir. Mais dans l’ensemble, la quasi-totalité de ces approches repose sur l’interaction des photons avec un autre matériau aux propriétés bien précises. Cela fonctionne parfaitement dans la grande majorité des cas. Mais il commence à y avoir des exceptions.
Sur les dernières décennies, la puissance des lasers utilisés en recherche scientifique de pointe a augmenté de façon exponentielle. Les spécialistes qui travaillent avec ces faisceaux surpuissants commencent à voir émerger un problème de taille : les composants optiques actuels approchent de leurs limites physiques. Les lasers les plus performants sont susceptibles d’endommager les composants tels que les prismes et les miroirs. Cela influe évidemment sur la qualité de ces expériences qui nécessitent parfois un énorme degré de précision.
Du son pour contrôler la lumière
Pour surmonter cet obstacle, plusieurs institutions allemandes de premier plan ont collaboré pour trouver une parade très élégante : au lieu de travailler sur de nouveaux composants toujours plus performants, ils ont développé une technique qui permet… de ne pas en utiliser du tout !
À la place, ils exploitent un phénomène physique radicalement différent : les ondes sonores. Un vrai changement de paradigme. « L’optique moderne est presque exclusivement basée sur les interactions de la matière avec la lumière solide », explique Christoph Heyl, le responsable de ce projet. « Notre approche ouvre un tout nouveau champ de recherche. »
Dans leur papier de recherche publié, ils décrivent une sorte de maillage invisible constituée entièrement d’air. « Nous avons généré une grille optique avec l’aide d’ondes acoustiques qui modifient localement la densité de l’air », explique Yannick Schrödel, doctorant au DESY — un prestigieux centre de recherche qui travaille sur la structure de la matière, et dont l’accélérateur de particules avait notamment “senti” un concert de Rammstein à deux kilomètres de distance l’année dernière (voir notre article).
Pour y parvenir, ils ont utilisé des haut-parleurs spéciaux qui peuvent former un motif particulier constitué d’air plus ou moins dense. Lorsque le faisceau traverse cette grille, sa trajectoire s’en trouve donc modifiée, comme s’il avait traversé différentes couches de l’atmosphère terrestre.
C’est une approche très intéressante sur le papier. En théorie, elle offre un degré de contrôle exceptionnel sur la trajectoire du laser sans pour autant polluer le signal.
Des premiers résultats très prometteurs
Et les premiers tests en laboratoire se sont avérés très prometteurs. Les auteurs ont déjà réussi à rediriger un puissant laser de 20 GW. Pour référence, c’est à peu près 4000 milliards de fois plus puissant qu’un pointeur laser standard.
Pour y parvenir, ils ont cependant dû faire exploser le compteur de décibels. « Les propriétés de cette grille sont influencées par la fréquence et l’intensité — en d’autres termes, le volume — des ondes sonores », indique Schrödel. « Nous travaillons à environ 140 dB, ce qui correspondrait à un moteur d’avion à réaction à quelques mètres de distance », précise Heyl. « Heureusement que nous sommes dans le domaine des ultrasons, que nos oreilles ne perçoivent pas ! »
Lors de ces tests, les chercheurs ont atteint une efficacité d’environ 50 %. Un chiffre encore modeste dans l’absolu. Mais il s’agit toutefois d’une très belle preuve de concept. De plus, leurs simulations suggèrent qu’il sera possible d’atteindre une efficacité nettement plus importante en pratique.
Un potentiel énorme
Et une fois la technologie mature, cette technique ouvrira la voie à une myriade d’applications concrètes très intéressantes. Les auteurs donnent notamment l’exemple des commutateurs optiques. De nombreux systèmes dépendent de ces composants qui permettent de rediriger un faisceau à la volée, pendant le fonctionnement de l’appareil. En utilisant le son au lieu d’une combinaison de lentilles et de miroirs, on s’affranchit des limites de précision et de vitesse qui handicapent les actionneurs mécaniques traditionnels. Un gros avantage pour les performances et la fiabilité du système.
Forts de ce premier succès, les chercheurs vont donc tenter d’augmenter l’efficacité du système et d’en explorer d’autres déclinaisons. Par exemple, pour l’instant, ils n’ont travaillé que dans l’air. Mais d’autres mélanges de gaz pourraient ouvrir la voie à encore plus d’applications dans des domaines de pointe. On peut citer la mécanique quantique, la physique des particules, ou encore la fusion nucléaire. « Nous allons tenter notre chance avec d’autres gaz pour exploiter d’autres longueurs d’onde, et par extension, d’autres géométries et propriétés optiques », conclut Heyl.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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Superbe ! Article une nouvelle fois du JdG , traitant sur de nouvelles recherches en utilisation des ondes sonores ou acoustique ! Mais il faut se rappeler que ces ondes acoustiques sont connues depuis la…préhistoire ! Par les echos utilisés pour communiquer entre les falaises et Montagnes engendrés par les frappe des galets et des bâtons sur des troncs! par nos Hommes de Cro-Magnon ! Alors pour revenir dans notre réel, les ondes acoustiques font partie de la centaine d ondes différentes encore totalement non maîtrisées! qui nous entourent à chaques instants de notre… vie! Elles ont d énormes capacités encore inconnues et ici celles ci, je ne peut que penser que nos Militaires y ont mis leurs cognitifs extrême dans les domaines qui en découlent dont cette “ligne” mais pas que, de ce bel Article !
Merci Thank you merci a Tous
Bonsoir messieurs je vous remercie beaucoup pour vos efforts considérables et je vous souhaite bon courage et réussite dans votre domaine de recherche vous ne le faites pour vous mais pour l et humanité toute entière et par la même occasion je porte à votre connaissance que je suis étudiant en 2 année universitaire spécialité physique très cordialement votre
Bonjour, article très intéressant…… Je suis convaincue de l’importance du son, de la vibration qu’il crée, dans tous les domaines scientifiques…. les différentes formes de matières, physique classique ou quantique sont, je pense, sous l’influence des ondes sonores… Je n’ai pas de compétences scientifiques 😞, je suis juste curieuse 🤔 et dans l’attente de réponses qd aux liens qui forment le TOUT…,.Que l’ont soit humain, animal ou végétal, nous y sommes sensibles…… Alors, pkoi certaines constructions très anciennes seraient elles axées vers LE SON?? Merci ….👍❤️
Oui , en 1940 , la DCA de mon Papy detectait les avions de l’adversaire avec des cornets acoustiques de 10 mètres, à faire tourner electric dans le sens de la puissance sonore maximale, mais il fallait composer avec le vent du nord à Wambrechies , et ils en auraient touché trois avant la percée de Dunkerque …! PL.