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Climat : la banquise de l’Antarctique n’a jamais été si mal en point

2023 a été une année noire pour la banquise de l’Antarctique, et cela n’augure rien de bon pour la suite.

Ce 23 septembre, l’automne a officiellement débuté au nord de l’équateur. Mais dans l’hémisphère sud, c’est le printemps qui vient de commencer, et le retour des beaux jours n’est pas une bonne nouvelle pour tout le monde ; les glaces de l’Antarctique viennent en effet de battre un triste record.

C’est en tout cas ce qui ressort du rapport annuel du National Snow and Ice Data Center américain (NSIDC). Selon cette institution, la situation était déjà très problématique en début d’année. En février (le mois le plus chaud de l’été de l’autre côté de l’équateur), le NSIDC n’a recensé que 1,79 million de kilomètres carrés de glace de mer, soit à peu près trois fois la superficie de la France.

Cela pourrait sembler énorme, mais lorsqu’on le compare avec les relevés des années précédentes, ce chiffre devient très alarmant. C’était même un record. La surface des glaces de l’océan Austral était au niveau le plus bas depuis au moins 44 ans. Accessoirement, elle était 36 % inférieure à la moyenne compilée depuis 1979 (la date à laquelle ces enregistrements ont débuté).

Le maximum le plus faible de l’ère moderne

Et depuis, la banquise a progressé à un rythme particulièrement lent pendant les mois les plus froids et sombres de l’année. Et il ne s’agissait pas que d’une région isolée. Tout l’Antarctique était concerné. « La croissance de la glace était faible autour de presque tout le continent, et pas seulement dans une région en particulier », précise Walt Meier, l’un des auteurs du rapport.

Les spécialistes s’attendaient donc à recevoir davantage de mauvaises nouvelles à la fin du mois de septembre, qui correspond à la fin de l’hiver dans la moitié sud de la planète. Et leurs craintes ont été confirmées. Le minimum de 2023, enregistré le 10 septembre dernier, a été particulièrement moribond.

D’après le NSIDC, l’étendue de la glace de mer en Antarctique n’a atteint que 16,96 millions de kilomètres carrés. Certes, c’est plus d’une fois et demie la superficie totale de l’Europe. Mais là encore, il s’agit du niveau le plus bas jamais enregistré à cette période de l’année — et de loin. Cela représente un déficit de 1,03 million de kilomètres carrés, soit presque deux Frances de banquise en moins par rapport au précédent record.

© NSIDC

Pour couronner le tout, la situation n’est pas beaucoup plus engageante de l’autre côté du globe. Toujours selon le NSIDC, la banquise arctique ne s’étend que sur 4,23 millions de kilomètres carrés. C’est le sixième niveau le plus bas enregistré depuis un demi-siècle.

Un cercle vicieux qui se renforce

Au-delà des chiffres bruts, ce qui est particulièrement préoccupant, c’est la tendance qui commence à se dessiner. L’étendue de la banquise en Antarctique est restée stable pendant plusieurs décennies, en dépit du réchauffement climatique constaté. Mais, depuis août 2016, elle diminue à vue d’œil presque tous les mois.

L’origine exacte de ce déclin n’est pas encore parfaitement claire ; certains chercheurs rechignent encore à établir un lien direct avec le réchauffement global de l’atmosphère, car les modèles climatiques n’ont pas fait émerger de lien de cause à effet évident entre ces deux paramètres. À l’heure actuelle, cette tendance à la baisse est plutôt attribuée au réchauffement de la couche supérieure des océans. Mais il va falloir plus de données pour le confirmer rigoureusement.

En revanche, la diminution de la surface de la banquise reste une très mauvaise nouvelle. Il y a en effet un point sur lequel les experts sont unanimes : cette tendance contribue directement à accentuer le réchauffement climatique.

La glace joue en effet le rôle de bouclier protecteur en réfléchissant la majorité du rayonnement solaire qui y parvient ; on dit qu’elle présente un albédo élevé. Lorsqu’elle disparaît, elle laisse sa place à des surfaces comme l’océan nu, qui présentent un albédo moins important ; elles absorbent une plus grande partie du rayonnement.

Cette énergie se retrouve ainsi piégée au sein du système Terre au lieu d’être renvoyée. Elle contribue donc au réchauffement de la planète, ce qui accélère la fonte des glaces… et ainsi de suite. On se retrouve avec ce qu’on appelle une boucle de rétroaction, un cercle vicieux qui pourrait avoir des conséquences importantes dans le contexte actuel.

Le NSIDC souligne d’ailleurs que la perte de la glace de mer génère d’autres boucles de rétroaction problématiques. Plus la banquise régresse, plus les côtes sont exposées aux vagues. Cela contribue à déstabiliser la calotte glaciaire, et par conséquent à réduire l’albédo global.

Et la montée des eaux dans tout ça ?

Ce dernier phénomène pose aussi un problème en termes de montée des eaux. On considère traditionnellement que la fonte de la glace de mer n’a pas d’effet sur le niveau des océans, un peu comme la fonte d’un glaçon ne peut pas faire déborder un verre d’eau.

Ce n’est pas rigoureusement exact dans un océan constitué d’eau salée (voir cet article), mais cet effet reste relativement marginal. Par contre, l’érosion de la calotte par les vagues qui se déplacent librement en l’absence de banquise a un effet beaucoup plus significatif. Car la fonte massive de cette glace terrestre, de son côté, provoquerait une montée catastrophique du niveau des océans.

Tous ces éléments rappellent à quel point la dynamique climatique est complexe, il y a de nombreux facteurs que nous n’avons pas mentionné ici, et probablement  d’autres dont nous ne sommes même pas conscients à l’heure actuelle. Quoi qu’il en soit, le constat est clair : il devient de plus en plus urgent de limiter le réchauffement climatique, et de le faire dans les plus brefs délais.

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