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Médecine : saura-t-on bientôt guérir la paralysie ?

Une nouvelle équipe de chercheurs a permis à des souris paralysées de remarcher grâce à une nouvelle technique de régénération de la moelle épinière. Un succès qui témoigne des progrès rapides de cette niche thérapeutique.

Lorsqu’une personne subit un traumatisme de la moelle épinière, le pronostic dépend en grande partie d’un facteur déterminant. Si les dégâts sont mineurs, la paralysie initiale est suivie d’une régénération spontanée et d’un retour progressif des fonctions motrices. En revanche, si les cellules nerveuses sont entièrement détruites, un corps adulte n’est plus en mesure d’en produire de nouvelles, et les dégâts sont généralement irréversibles.

Depuis de longues années, la recherche tente de trouver des pistes pour initier le processus de guérison dans les cas les plus graves. Il y a cinq ans, les équipes de NeuroRestore, un institut de recherche et de traitement affilié à l’École Polytechnique Fédérale et à l’Hôpital Universitaire de Lausanne, ont dévoilé une belle avancée. Les chercheurs ont développé une thérapie génique qui a réussi à stimuler la régénération des cellules nerveuses chez des souris adultes.

Un grand progrès, mais sans application clinique à ce stade. La structure de ces tissus nerveux est délicate et complexe, et faire repousser les cellules ne suffit pas à récupérer la mobilité. Pour y parvenir, il faut aussi reconstituer les connexions détruites pour qu’elles puissent à nouveau transmettre les signaux nécessaires.

Ce problème de connectivité est donc devenu leur priorité depuis. Et récemment, ils ont annoncé un progrès plus que significatif à ce niveau. Ils ont réussi non seulement à stimuler la croissance des nerfs des souris, mais aussi à la guider de façon à ce que les cellules se reconnectent à leurs cibles naturelles, permettant aux rongeurs de récupérer la mobilité perdue.

© sipa – Pixabay

Une méthode inspirée de la régénération naturelle

Pour y parvenir, ils ont collaboré avec les prestigieuses universités américaines UCLA et Harvard. Ensemble, ils ont conduit des analyses poussées pour déterminer exactement quel type de neurone est impliqué dans la régénération naturelle lors d’une blessure partielle. En séquençant l’ARN nucléaire contenu dans ces cellules, ils ont pu mettre en évidence exactement quels axones (les longues fibres où transite l’influx nerveux) devaient se régénérer. Et surtout, cela leur a permis d’identifier les protéines qui permettent d’amener ces connexions vers la bonne destination.

À partir de là, ils ont pu passer à la phase concrète. Ils ont d’abord stimulé la régénération des cellules nerveuses à l’aide de facteurs de croissance. Ensuite, ils ont administré ce qu’ils décrivent comme des « molécules tutrices ». Celles-ci ont eu pour effet de guider les axones régénérés vers leurs cibles naturelles sur le site de la lésion. « Pour concevoir cette stratégie thérapeutique, nous nous sommes inspirés du processus naturel qui permet la réparation spontanée de la moelle épinière après une blessure partielle », explique Jordan Squair, auteur principal de l’étude.

Et les résultats ont été assez spectaculaires : les rongeurs ainsi traités ont récupéré leur capacité à marcher. Au terme du processus, ils étaient capables de se déplacer aussi bien qu’un rongeur dont le tissu nerveux s’est régénéré normalement après une blessure partielle.

Une piste thérapeutique concrète

Les chercheurs ne s’attendent pas à ce que cette technique à elle seule permette de rendre toute leur mobilité à des personnes hémiplégiques. En revanche, cette approche pourrait faire des merveilles en complément des autres techniques développées en ce moment.

« Nous nous attendons à ce que notre thérapie génique soit complémentaire de nos autres procédures, comme la stimulation électrique de la moelle épinière » ; explique Grégoire Courtine, co-auteur de l’étude et dirigeant de NeuroRestore. « Nous pensons qu’une solution complète pour traiter les lésions graves nécessitera ces deux approches — la thérapie génique pour faire repousser les fibres concernées, et la stimulation spinale pour maximiser la capacité des tissus à produire un mouvement ».

Il reste encore de nombreux obstacles techniques qui devront être surmontés avant d’arriver à un tel résultat sur des humains. Il faudra aussi procéder à un essai clinique en bonne et due forme une fois que la procédure sera mature. Mais cette démonstration sur des rongeurs reste extrêmement encourageante.

Des progrès de plus en plus rapides

Et surtout, c’est un nouvel exemple qui s’inscrit dans la lignée de plusieurs autres avancées spectaculaires réalisées, toutes survenues en l’espace de deux ans à peine. Fin 2021, une équipe de la Northwestern University a obtenu des résultats impressionnants avec un réseau de nanofibres conductrices. Un an plus tard, ce sont des Israéliens qui ont fait remarcher des souris paralysées avec un traitement aux cellules souches.

Avec la nouvelle réussite des chercheurs suisses, on commence à voir émerger tout un panel de techniques potentiellement complémentaires. Mises bout à bout, elles pourraient enfin permettre de guérir ces blessures qui changent la trajectoire d’une vie. Avec un peu de chance, le fameux « lève-toi et marche » pourrait passer de la Bible à la réalité dans un futur relativement proche ; il ne reste plus qu’à patienter en attendant cet exploit thérapeutique.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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Source : EurekAlert

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