Pour la première fois depuis 1960, les syndicats des scénaristes et des acteurs d’Hollywood participent à une grève coordonnée. Les négociations avec l’AMPTP, l’association commerciale qui représente les principaux studios et plateformes de l’industrie, n’ont pas abouti à un accord. La Writers Guid of America ainsi que la Screen Actors Guild estiment que les rémunérations sont insuffisantes. Au cœur de la discorde, ce sont les droits résiduels qui font particulièrement parler d’eux. Les plateformes entretenant le mystère concernant les audiences de leurs productions, ces revenus liés aux rediffusions ne sont plus accordés aux acteurs et scénaristes d’une production. Le succès d’une série ou d’un film n’est plus déterminant et de nombreux salariés peinent à vivre confortablement.
Un autre point inquiète aussi bien les acteurs que les scénaristes. Alors que les technologies liées à l’intelligence artificielle font de plus en plus parler d’elles, les deux organisations demandent qu’un cadre légal soit défini avec de démocratiser l’usage de tels outils. Pour les comédiens, cela passe par exemple par l’assurance que leur image ne pourra pas être utilisée gratuitement à l’avenir. Les logiciels de création d’image deviennent de plus en plus réalistes, la SAG veut les protéger d’une utilisation indésirée de leurs visages.
Le sens du timing
C’est dans ce contexte particulièrement tendu que Netflix publie une annonce pour recruter son nouveau chef de produit IA. Sur la rubrique emploi de son site, le géant du streaming détaille les missions allant de “l’optimisation” de la production de films et de séries à l’évolution de sa “Machine Learning Plateform”. Comme le note The Intercept, il s’agit d’un programme d’intelligence artificielle qui est utilisé pour booster les recommandations selon l’utilisateur ou les tendances. Outre ce calendrier assez étonnant, de la part d’une entreprise clairement visée par les grèves, c’est la rémunération envisagée qui suscite l’indignation de nombreuses personnalités. La fourchette salariale située entre 300 et 900 000 dollars ne passe pas.
L’acteur Rob Delaney, qui a œuvré récemment œuvré sur Netflix, indique au média américain : “Donc 900 000 dollars par an pour un soldat de leur armée IA… Ce montant pourrait permettre à 35 acteurs et leurs familles de bénéficier de l’assurance maladie de la SAG-AFTRA. C’est tout simplement macabre”. Heureux hasard, ce dernier est apparu dans un épisode de l’anthologie Black Mirror, qui traitait justement de l’intelligence artificielle.
La fiction dépasse la réalité
Dans le chapitre baptisé Joan is Awful, il incarnait l’ancien petit ami de l’héroïne dont la vie se retrouve étalée sur la place publique. Après avoir souscrit un abonnement à Streamberry, référence à peine déguisée à Netflix, Joan découvre qu’une série portée par Salma Hayek retrace chaque moment de sa journée. Le programme, qui cartonne, est développé avec l’aide d’une IA utilisant le visage de l’actrice.
Netflix ne serait pas la seule entreprise du secteur à investir dans le machine learning. Selon The Intercept, Disney recrute également un ingénieur IA pour “stimuler l’innovation dans nos pipelines cinématographiques et nos expériences théâtrales”.
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Ce n’est pas une erreur de timing ou de montant trop élevé. Au contraire, c’est pour peser dans le bras de fer face aux grévistes, c’est du pur rapport de force.