Selon SpaceNews, la Chine est en train de finaliser son plan d’envoyer des astronautes sur la Lune. La CMSA, l’agence qui gère le vol habité au pays de Xi Jinping, a récemment annoncé son ambition de faire ses premiers pas sur notre satellite avant la fin de la décennie. Ses responsables viennent de présenter une feuille de route préliminaire qui décrit la logistique de la mission.
Selon ce document, l’expédition commencera par le lancement de deux fusées Longue Marche 10. Il s’agit d’un lanceur kerolox lourd qui appartient à la même catégorie que le Falcon Heavy. Mais contrairement à la fusée de SpaceX, LM10 comportera non pas deux, mais trois étages distincts.
L’engin est toujours en développement à l’heure actuelle. Le vol inaugural d’une première version à deux étages est attendu en 2027. En cas de succès, l’agence chinoise pourra attaquer la construction de la version finale à trois étages, mais aucune date n’a encore été annoncée pour cette échéance.
Une marge de manœuvre réduite
Le timing s’annonce donc assez serré, même si l’aérospatiale progresse extrêmement rapidement en ce moment. Il faudra que chaque étape du développement se déroule sans accroc pour espérer un départ avant 2030. Or, les retards de plusieurs années sont monnaie courante dans cette industrie.
Une fois opérationnel, ce modèle mature sera capable de déployer 70 tonnes de matériel en orbite terrestre basse, ou 27 tonnes sur une orbite de transfert à destination de la Lune. L’agence spatiale chinoise aura donc assez peu de marge de manœuvre, car les deux véhicules qui seront lancés par ces fusées pèseront chacun 26 tonnes.
« Nous devons utiliser des matériaux et des structures avancées pour améliorer l’efficacité structurelle et contrôler la masse des véhicules de façon très stricte », explique un responsable du programme cité par SpaceNews.
Une course entre chinois et américains ?
La première fusée sera chargée d’emporter une capsule qui contiendra un peu de matériel ainsi que deux astronautes chinois. La seconde, de son côté, transportera le véhicule qui servira à l’alunissage. Les deux engins voyageront chacun de leur côté. Ils effectueront ensuite une manœuvre de rendez-vous pour s’amarrer l’un à l’autre directement dans l’orbite de la Lune.
Les taïkonautes prendront alors place dans l’alunisseur. C’est cet engin équipé de quatre petits moteurs à poussée variable, capables de développer environ 750 kg de poussée chacun, qui prendra le chemin de la surface. Si tout se déroule comme prévu, il s’agira d’un succès historique. Pour rappel, seuls douze humains ont posé le pied sur la Lune à ce jour, et tous étaient de nationalité américaine. La Chine deviendrait donc la deuxième nation au monde à y parvenir.
Il sera donc très intéressant de voir si la Chine parviendra à respecter son calendrier. Le cas échéant, il n’est pas tout à fait exclu que le pays de Xi Jinping dame le pion à celui de Joe Biden.
La mission Artemis 3, qui doit renvoyer des astronautes américains sur notre satellite pour la première fois depuis Apollo 17 en 1972, est pour l’instant toujours prévue en 2025. En théorie, l’Oncle Sam devrait retourner sur place bien avant le contingent chinois.
Mais le programme Artemis a déjà accumulé un certain retard, et de nombreux spécialistes estiment que cette deadline est trop ambitieuse. Si elle est repoussée comme cela semble de plus en plus probable et que la Chine respecte sa feuille de route, les deux missions pourraient finalement partir à quelques mois d’intervalle. Mais en l’état, les États-Unis partent tout de même avec plusieurs longueurs d’avance, et il faudrait sans doute une grosse série de déconvenues techniques pour que la Chine puisse les rattraper. Affaire à suivre.
La première étape de la colonisation lunaire chinoise
L’alunisseur emportera également un petit rover de 200 kg. Ce véhicule permettra à l’équipage de se déplacer sur une distance d’environ 10 km. Cela facilitera grandement la mission des taïkonautes. Dans un premier temps, ils seront chargés de collecter des échantillons de poussière lunaire et de réaliser quelques expériences scientifiques complémentaires. Ces dernières porteront notamment sur la géologie lunaire, l’astrobiologie ainsi que l’exploitation des ressources locales.
CGI of concepts for a lunar lander and rover for China's crewed moon landing plans presented at a China (international) commercial aerospace forum. Source: https://t.co/il9za42dDy pic.twitter.com/nlJKwE76rl
— Andrew Jones (@AJ_FI) July 13, 2023
Ce dernier point est particulièrement important. En effet, ces travaux vont poser les bases d’un autre programme encore plus ambitieux. Il s’agit de l’International Lunar Research Station (ILRS), la fameuse base scientifique permanente que la Chine souhaite construire à la surface de la Lune lors de la prochaine décennie.
Cette première expédition lunaire sera cruciale dans ce contexte. Il s’agira d’une excellente occasion d’effectuer des premiers repérages en amont des prochaines missions de colonisation.
Cela commencera en 2025 avec Chang’ e-6, dont l’objectif prioritaire sera d’étudier la topographie et la composition du sol dans le Bassin d’Aitken. Il s’agit d’une zone du pôle sud lunaire où la Chine prévoir d’installer l’ILRS.
Elle sera suivie par Chang’ e-7, qui va étudier la nature et la disponibilité des ressources dans la région. Cette mission comprendra une sonde orbitale, un alunisseur autonome et une petite sonde volante pour l’accompagner.
La mission Chang’ e-8, prévue en 2028, sera chargée d’étudier l’exploitation des ressources identifiées lors de la phase précédente. Elle sera notamment équipée d’une imprimante 3D grâce à laquelle l’agence espère construire un petit prototype de structure. Cela permettra de préparer la construction de la base finale.
Les amoureux de l’espace seront donc gâtés ces prochaines années. Entre le programme Artemis et son pendant chinois, le public aura l’occasion de suivre plusieurs missions très intéressantes sur le plan technologique, et pleines d’implications concrètes pour le futur de notre civilisation. Notre espèce n’a jamais été aussi proche de conquérir la Lune une bonne fois pour toutes, plus d’un demi-siècle après le dernier voyage sur place des astronautes américains.
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