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Nikon lance une campagne contre l’IA, mais oublie de payer ses photographes

Nikon a publié une campagne photo pour lutter contre l’IA, mais multiplie les maladresses.

Lutter contre l’IA et la génération artificielle d’images est devenue le mantra de certains corps de métier. Les professions créatives, notamment, s’en donnent à cœur joie pour tenter de (se) rassurer sur la supériorité de l’art humain. Face à l’émergence des intelligences artificielles comme DALL-E aux images toujours plus réalistes, le fabricant japonais Nikon a récemment publié une impressionnante campagne photo, dédiée à la beauté de la (vraie) nature. L’occasion de montrer à quel point le monde réel peut être impressionnant, sans avoir recours à la technologie.

Nikon milite pour une création éthique en Amérique latine, mais ne paie pas ses photographes ?

Baptisée Natural intelligence, la campagne de Nikon s’articule autour de plusieurs clichés, tous plus époustouflants les uns que les autres. Chacun est accompagné d’un prompt, ces requêtes textuelles utilisées pour communiquer avec les chatbots. L’idée est intéressante, les visuels impactants. Plus important encore, la campagne réussit avec brio à dénoncer la crise sans précédent que subissent actuellement les métiers de l’image et de la communication, notamment en Amérique latine, pays d’origine du projet.

Plus étranges que la fiction, les images partagées par Nikon avaient aussi pour objectif de dénoncer le manque d’éthique derrière certaines créations générées par l’IA, qui oublie bien souvent de citer ses sources premières et de valoriser les artistes derrière les prompts. Flanquée d’un slogan coup de poing “N’abandonnez pas le monde réel“, la campagne de Nikon Pérou avait tout pour s’imposer comme le symbole d’un combat titanesque pour faire valoir le droit des artistes. Sauf que l’entreprise n’aurait pas pris la peine de rémunérer ses photographes.

comparatif campagne nikon
© DIY Photography

Selon une enquête du média DIY Photography, l’ensemble des images utilisées pour illustrer la campagne de Nikon réalisée au Pérou proviendrait de banques gratuites, comme Unsplash et Flickr. Des images sous la licence Creative Commons, qui ont sans doute été utilisées par l’entreprise sans aucune rémunération pour les photographes. L’arbre Dragon’s Blood, photographié par Andrew Svk par exemple, est disponible gratuitement sur le site Unsplash. L’artiste n’a d’ailleurs pas été informé de l’utilisation de son œuvre. Seule consolation, le fabricant a crédité les photographes.

Des retouches et beaucoup d’hypocrisie

Autre élément troublant de cette campagne, la facilité avec laquelle Nikon Pérou a retouché les images, tout en faisant la promotion pour des images réelles. Entre les tampons de duplication et les ajustements colorimétriques, l’agence Circus Gray à l’origine de la campagne n’y est pas allée de main morte. C’est notamment le cas des couleurs éclatantes des montagnes de Salta en Argentine, qui dans la réalité sont bien moins colorées.

Pour une campagne qui dénonce l’utilisation de l’IA dans la photographie, le double discours est pour le moins étonnant. Non seulement Nikon multiplie les retouches photos pour mettre sur pied sa campagne, mais en plus le géant de la photo mise sur des images accessibles gratuitement sur des banques en ligne, dont on connaît les dérives en matière de rémunération des artistes. D’autant plus que toujours selon DIY Photography, l’entreprise aurait elle-même eu recours à l’IA dans deux de ses photos, capturées grâce au micrologiciel du Z9. À noter que l’opération ne concerne pas la branche de Nikon France, qui nous a indiqué n’avoir “aucun lien direct” avec cette campagne.

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