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Voici le tout premier transistor en bois au monde

Des chercheurs suédois ont réussi à produire un transistor à base de bois qui va sans doute ouvrir d’autres pistes de recherche fascinantes.

Les transistors sont partout aujourd’hui. Des ordinateurs traditionnels aux smartphones en passant par les pacemakers et les instruments scientifiques, ces composants nanométriques sont l’une des clés de voûte de l’âge du numérique. Ils sont aujourd’hui absolument indispensables au bon fonctionnement de presque toute notre technologie moderne. Mais ils ne sont pas exempts de tout reproche pour autant, notamment en termes d’écologie et de gestion des ressources. Pour résoudre ces problèmes, des chercheurs viennent de proposer un nouveau concept fascinant : ils ont créé le tout premier transistor fonctionnel en bois.

Le concept a de quoi surprendre. Certes, les arbres vivants contiennent effectivement des fluides qui leur permettent de conduire une faible quantité d’électricité ; c’est même indispensable à leur physiologie. En revanche, ce n’est pas le cas du bois mort. Ce dernier est un très mauvais conducteur, et même presque inerte dans la plupart des cas.

Pour arriver à ce résultat, les chercheurs de l’université suédoise de Linköping et du KTH Royal Institute of Technology ont donc dû faire preuve d’ingéniosité. Leur méthode, décrite dans un papier repéré par New Atlas, fait intervenir plusieurs modifications du matériau ainsi qu’une substance très à la mode dans la recherche sur l’énergie : le poly(3,4-éthylènedioxythiophène), plus connu sous le nom de PEDOT.

Le premier transistor semi-organique fonctionnel

Les auteurs sont partis de quelques échantillons de balsa. C’est un bois tropical gris-blanc très prisé des maquettistes, car il est à la fois très léger et plutôt facile à travailler. Mais ce sont d’autres propriétés qui intéressaient les chercheurs, à savoir sa structure particulièrement homogène et régulière.

Au début du processus, les chercheurs ont commencé par appliquer un traitement chimique qui a retiré la lignine. C’est le polymère qui confère leur résistance et leur rigidité aux cellules végétales. Grâce à la régularité de la structure du balsa, une fois la lignine retirée, ils ont obtenu une structure constituée de canaux creux et très allongés.

L’étape suivante consiste à remplacer la lignine disparue par du PEDOT. C’est un plastique conducteur qui a déjà été utilisé dans d’autres concepts intéressants dans le domaine de l’énergie. On peut par exemple citer un enduit qui permet de transformer les briques d’une maison en petits condensateurs, ou un « film solaire » ultrafin qui rend n’importe quelle surface photovoltaïque.

Une fois solidifié, ce PEDOT se comporte comme un réseau de petits câbles électriques enchevêtrés. On se retrouve donc avec un échantillon de « bois » conducteur. Les chercheurs ont ensuite agencé ce matériau de façon à produire un transistor en bonne et due forme. Et les tests ont prouvé qu’il était quand même parfaitement fonctionnel. « Notre transistor en bois est lent et gros, mais il fonctionne ! », se réjouit Isak Engquist, professeur à l’université de Linköping et auteur principal de ces travaux.

Plus précisément, les chercheurs ont montré que leur transistor pouvait fonctionner en continu et réguler un courant électrique sans se détériorer. Il peut aussi se comporter comme un interrupteur.

En revanche, comme mentionné par Engquist, ce composant semi-biologique est loin d’être vraiment performant. Chaque transmission comporte un délai d’environ 5 secondes. De plus, avec quelques centimètres de long, il est aussi très encombrant. À titre de comparaison, un transistor classique à base de semiconducteurs mesure traditionnellement quelques nanomètres.

Une preuve de concept limitée mais prometteuse

Pour toutes ces raisons, il est difficile d’envisager une vraie application en l’état. Mais ce n’est de toute façon pas l’objectif des chercheurs. « Nous n’avions pas d’objectif spécifique en tête », concède Engquist. « Il s’agit uniquement d’une preuve de concept » qui montre la viabilité du couple bois/PEDOT dans ce contexte. « C’est de la recherche fondamentale ; on montre simplement que c’est possible », insiste-t-il.

Mais il s’agit tout de même d’un petit exploit. Car jusqu’à présent, personne n’avait réussi à arriver à ce stade. Et ce n’est pas faute d’avoir essayé. Le concept a déjà été exploré à de nombreuses reprises par d’autres équipes, comme dans cette publication de 2019 – mais sans succès.

Un transistor en bois et en PEDOT
© Linköping University – Van Chinh Tran et al.

Et les auteurs espèrent bien que leurs travaux vont inciter d’autres chercheurs à développer de nouvelles technologies intéressantes basées sur cette approche. À terme, les travaux de ce genre conduiront peut-être à la création d’une nouvelle génération de transistors biodégradables. Nous en sommes encore à des années-lumière, mais connaissant l’impact environnemental de cette filière, la piste mérite d’être explorée.

Et en attendant, ce concept pourrait se trouver d’autres applications plus concrètes. Cela concerne notamment des disciplines où ses défauts ne seraient pas forcément rédhibitoires. On pense notamment aux chercheurs qui travaillent à la frontière de la biologie et de l’électronique.

Ces transistors semi-organiques pourraient par exemple servir à produire des circuits électroniques biocompatibles. Ces derniers qui pourraient ensuite être intégrés directement aux plantes elles-mêmes. De quoi fournir des informations in vivo très précieuses pour la recherche scientifique, le suivi et la préservation de l’environnement, ou encore l’agriculture et l’agronomie appliquée.

Le texte de l’étude est disponible ici.

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