Le recyclage des lanceurs est l’un des enjeux les plus importants de l’aérospatiale du 21e siècle. Derrière SpaceX, leader incontesté et incontestable de cette niche technologique, tous les géants de l’industrie sont en train de faire des pieds et des mains pour conformer leurs véhicules à ce nouveau paradigme. Hier, selon Space.com, c’est RocketLab qui a annoncé une nouvelle initiative dans ce sens : pour la première fois, la firme californienne va tenter de réutiliser un de ses moteurs imprimés en 3D.
L’impression 3D est une autre technologie qui a le vent en poupe dans ce domaine. Le spécialiste de cette approche, c’est Relativity Space, qui a récemment fait les gros titres avec le baptême de l’air de Terran-1 — le premier lanceur presque entièrement imprimé en 3D.
Tout le monde n’a pas joué cette carte à fond comme Relativity. Mais l’impression 3D est déjà utilisée par la plupart des grands noms de l’aérospatiale. Ils s’en servent pour des pièces excessivement chères et difficiles à produire dans le cadre d’un processus d’usinage traditionnel. Par exemple, les injecteurs qui permettent de vaporiser puis de mélanger les ergols liquides nécessaires à la propulsion sont déjà tous imprimés en 3D depuis belle lurette.
Un nouveau départ pour le moteur Rutherford
Rocket Lab est un précurseur à ce niveau. Lorsqu’il est entré en service en 2017, son propulseur Rutherford est devenu le premier moteur-fusée imprimé en 3D. Depuis, il affiche une fiabilité à toute épreuve. Il a permis à plus d’une trentaine de lanceurs Electron — la Rolls-Royce des lanceurs légers — d’atteindre l’orbite.
Mais jusqu’à présent, la firme n’a jamais pris le risque d’en réutiliser un après son premier vol. Afin d’augmenter la rentabilité des vols de son fer de lance, elle va tenter l’expérience pour la première fois au troisième trimestre 2023.
Le plan consiste à remettre en service un moteur Rutherford inauguré en mai 2022, à l’occasion de la mission There And Back Again. Pour rappel, il s’agissait d’un test assez spectaculaire ; l’entreprise a réussi à récupérer le booster en plein vol à l’aide d’un hélicoptère.
Si la firme a initialement choisi cette approche, c’est parce que ses véhicules sont incapables de revenir se poser seuls à la verticale comme les Falcon de Space. Et ce n’est pas parce que ses ingénieurs sont moins talentueux ; c’est plutôt une question de format. En effet, les lanceurs légers comme Electron ne peuvent tout simplement pas emporter suffisamment de carburant pour amortir la chute après avoir mis un engin en orbite.
L’hélicoptère a fini par relâcher sa charge dans l’océan par sécurité. Mais Rocket Lab a quand même pu récupérer l’engin à l’aide d’une barge. Une fois rapatrié, le moteur rescapé a subi une batterie de tests extrêmement exigeants. L’objectif : vérifier qu’il était toujours parfaitement opérationnel. Les ingénieurs ont notamment confirmé à plusieurs reprises sa capacité à maintenir une poussée stable sur une durée prolongée. Ils ont déterminé que ses performances étaient équivalentes à celles des moteurs Rutherford neufs. Sur le papier, il est donc prêt à reprendre du service.
Par contre, depuis cet épisode, les ingénieurs ont réalisé que le lanceur était parfaitement capable de survivre à un simple retour en parachute. En théorie, la firme n’a donc pas besoin d’avoir recours à cette approche risquée et complexe pour récupérer son moteur. Elle a plus ou moins abandonné la piste de l’hélicoptère.
Si le deuxième vol se passe bien, l’entreprise va donc probablement enchaîner avec un autre test comparable. Cette fois, elle tentera probablement de réutiliser un moteur qui est revenu directement dans l’océan, sans intervention d’un hélicoptère. Cela permettra de vérifier si les conclusions des techniciens sont toujours valides dans ce cas de figure. Et si c’est le cas, Rocket Lab pourra probablement commencer à réutiliser tous les moteurs qu’elle parvient à récupérer, avec de belles économies à la clé.
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