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Twitter rafle des milliers de GPU pour entrer dans la course à l’IA

Elon Musk veut faire passer l’oiseau bleu à l’ère de l’intelligence artificielle; le réseau social vient d’acheter plusieurs milliers de cartes graphiques pour s’en donner les moyens.

Elon Musk a beau répéter à tort et à travers que l’IA pourrait causer la ruine de l’humanité, le machine learning continue d’occuper une place fondamentale dans les opérations de ses entreprises. Cela vaut surtout pour Tesla, où ces algorithmes sont à la base du fameux système de conduite autonome. Et très bientôt, c’est Twitter qui devrait passer la seconde à ce niveau. Selon le Business Insider, la firme vient tout juste de lancer une grande offensive sur ce terrain.

C’est en tout cas ce qu’affirment plusieurs sources du média américain. Selon elles, Twitter aurait fait l’acquisition d’environ d’une très grande quantité de GPU. Et dans l’écosystème actuel, c’est le genre de commande qui ne passe pas inaperçue ; c’est généralement un signe que quelqu’un s’apprête à entraîner de gros modèles IA, une tâche qui nécessite une puissance de calcul très importante.

Si l’on se base sur les chiffres avancés, Twitter semble avoir de grands projets à ce niveau. En effet, l’oiseau bleu aurait acheté environ 10 000 GPU ces dernières semaines. Le modèle exact n’a pas été précisé, mais on peut affirmer sans risque que cela représente une puissance de calcul assez phénoménale. À titre de comparaison, OpenAI a aussi utilisé environ 10 000 GPU HPC A100 de Nvidia pour entraîner son fameux ChatGPT, le fameux modèle de langage (LLM) qui met Internet à feu et à sang !

Twitter voudrait développer son propre LLM

Et d’après les sources du Business Insider, Musk voudrait justement que le réseau social développe son propre LLM. Cette suggestion semble assez raisonnable, car l’ensemble des tweets de la plateforme constituent une base de données énorme qui pourrait tout à fait servir à entraîner un modèle de ce genre.

Une photo du site web de ChatGPT
© Jonathan Kemper – Unsplash

Cette interprétation est renforcée par le fait que Musk cherche à recruter des pointures de l’intelligence artificielle depuis quelques mois déjà. D’après The Information, il aurait approché plusieurs ingénieurs de renom depuis février. Le mois dernier, il aurait signé ses deux premières recrues d’envergure : Igor Babuschkin et Manuel Kroiss. Ces deux ingénieurs ont précédemment travaillé chez DeepMind, un autre titan de l’IA à qui l’on doit notamment AlphaChess, AlphaGo ou encore le révolutionnaire AlphaFold (voir notre article).

Elon Musk voudrait donc développer une IA générative spécialement conçue pour son réseau social. Reste encore à savoir à quelles fins. Et malheureusement, même les sources du Business Insider ne semblent pas avoir la réponse.

Un nouvel épisode du feuilleton Musk vs OpenAI…

Quel que soit l’objectif final, cette décision suscitera probablement quelques sourires cyniques chez la concurrence. En effet, Elon Musk fait partie des 1300 personnalités qui ont récemment signé une pétition réclamant une « pause » dans la recherche en intelligence artificielle (voir notre article). Une décision pas étonnante, sachant que l’intéressé n’a jamais caché son appréhension vis-à-vis du potentiel destructeur de l’IA.

Mais certains observateurs ont aussi jugé que c’était une façon de mettre des bâtons dans les roues à la concurrence le temps de rattraper son retard sur ces technologies révolutionnaires. Ils estimeront probablement que l’achat de ces 10 000 GPU leur donne raison, et les relations compliquées que Musk entretient avec les cadors du secteur renforcent encore cette piste.

Pour rappel, Musk faisait initialement partie des investisseurs d’OpenAI, qui domine aujourd’hui le segment de l’IA « grand public ». Mais suite à une sombre histoire de lutte pour le poste de dirigeant et de conflits d’intérêts autour de Tesla, Musk a fini par claquer la porte. Avec la perte de cette manne financière, OpenAI s’est presque retrouvée sur la paille.

Une aubaine pour Microsoft, qui en a profité pour s’engouffrer dans la brèche à grands coups de milliards. Et cela n’a pas été du goût d’Elon Musk, qui n’a jamais caché son désamour pour Bill Gates et sa firme (voir notre article). De nombreux médias américains ont rapporté que le fondateur de SpaceX était « furieux » du succès commercial et de l’exposition que ChatGPT a apportés à OpenAI après son départ.

…ou une simple évolution logique à l’ère de l’IA ?

Musk essaierait-il donc de rendre la monnaie de sa pièce à l’écurie de Sam Altman ? Ce n’est pas entièrement impossible, connaissant le tempérament du milliardaire. Mais il convient toutefois de nuancer cette lecture de la situation qui semble tout de même tirée par les cheveux. En effet, Twitter ne va probablement pas se focaliser sur la recherche fondamentale au même titre qu’OpenAI. Son objectif sera certainement d’intégrer le machine learning aux services de Twitter pour améliorer l’expérience utilisateur.

blue-twitter
© Alexander Shatov – Unsplash

Mais là encore, on peut à peine formuler quelques suggestions un brin hasardeuses. Par exemple, vous avez peut-être remarqué que certains tweets sont désormais accompagnés d’une bulle de contexte qui donne des précisions sur certains propos ambigus ou controversés. L’idée, c’est d’améliorer la transparence et de lutter contre la désinformation. En l’état, ce sont les internautes qui ajoutent ces précisions ; Musk pourrait envisager de laisser ce travail à un algorithme aussi objectif que possible.

Le Business Insider, de son côté, propose deux pistes. Le média suggère que ce nouveau système pourrait permettre d’améliorer la fonction de recherche — un point dont Musk s’est régulièrement plaint depuis son acquisition de la plateforme. Il pourrait aussi servir à générer de la publicité pour renflouer les caisses d’un Twitter en difficulté financière.

Les réseaux sociaux, nouvel El Dorado de l’IA générative

Quoi qu’il en soit, si les informations du Business Insider sont exactes, il sera très intéressant de suivre les retombées de cette affaire. L’arrivée de Twitter dans ce domaine pourrait accélérer la montée en puissance du machine learning que l’on constate déjà sur d’autres réseaux sociaux. Par exemple, en février, c’est Mark Zuckerberg qui a annoncé que Meta travaillait aussi sur son propre LLM qui servira à générer de la pub.

Or, comme chacun le sait, les données sont le fonds de commerce de ces entreprises. Et ce matériel va encore gagner de la valeur ces prochaines années, puisqu’il peut désormais être utilisé pour contribuer à des tas de projets de machine learning. Il y a donc de quoi être inquiets, sachant que les GAFAM ont déjà prouvé qu’ils n’avaient aucun scrupule à faire un usage discutable de ces données — on pense notamment à Facebook avec le scandale Cambridge Analytica. Une raison de plus qui devrait pousser les décideurs politiques à légiférer sur l’usage de ces outils basés sur l’IA.

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