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Hausse des frais de port sur les livres : une aubaine pour les liseuses ?

Avec la hausse des frais de port sur les livres, le gouvernement entend soutenir les libraires français. La mesure risque pourtant d’avoir l’effet inverse, on vous explique pourquoi.

Se faire livrer un livre va coûter plus cher à partir d’octobre 2023 en France. Les frais de port sur les livres passeront à 3 euros pour toutes les commandes de livre inférieures à 35 euros. Évoqué depuis plusieurs mois, ce nouveau tarif a pour but d’inciter les clients à se rendre en librairie plutôt que de commander en ligne. La position se défend et vise à soutenir les libraires indépendantes face à des mastodontes de l’e-commerce, Amazon en tête.

Un choix médian qui ne satisfaisait personne

Signé par la ministre de la Culture Rima Abdul-Malak et son homologue de l’Économie Bruno Le Maire, l’arrêté a été publié au Journal officiel. Ce montant minimum de 3 euros n’a pas été choisi par hasard, il fait suite à l’avis consultatif de l’Arcep. L’autorité a opté pour un compromis entre le 1,49 euro défendu par Amazon et les 4,50 euros réclamés par les libraires. Néanmoins, le montant retenu ne convient finalement à personne et c’est un premier problème.

Pour les libraires, ce n’est pas suffisant

Si le Syndicat de la librairie française (SLF) évoque un « premier pas pour une concurrence plus équilibrée », il fait également part de ses doutes. L’organisation professionnelle qui représente les librairies indépendantes craint « que la réintroduction de la quasi-gratuité au-delà de 35€ d’achat, n’amoindrisse la portée de la mesure et n’entretienne une culture de la gratuité contraire à la logique du prix unique du livre ». En effet, il reste possible de proposer un tarif de 0,01 euro – en vigueur depuis 2014 – pour des commandes égales ou supérieures à 35 euros.

Interrogés par France 3 Régions, des libraires estiment que c’est « plutôt une bonne mesure ». Comme pour le SLF, cette limite fixée à 35 euros apparaît toutefois comme insuffisante. « On s’arrête à 35 euros, mais vu l’augmentation du prix du livre en ce moment, pour deux grands formats, les 35 euros seront vite dépassés. Donc, cela reste dans un cadre qui est limité, mais c’est mieux que rien », affirme Marion Royer, responsable littérature à la librairie Forum de Besançon.

Amazon pense aux « petites villes »

De son côté, Amazon n’est pas non plus ravi de cette mesure. Et pour cause, le géant américain plaidait pour la mise en place d’un tarif postal dédié et réduit « au niveau le plus bas possible ». Lors de la consultation publique de l’Arcep, la firme disait vouloir « limiter (les) effets inflationnistes ».

« L’introduction d’un tarif minimum d’expédition aurait un effet inflationniste majeur, induisant une hausse du coût d’acquisition des livres vendus en ligne et affectant le pouvoir d’achat des lecteurs – et plus particulièrement de ceux qui résident loin des points de vente physiques et n’ont pas d’alternative. […]. Près de la moitié des livres achetés (46 %) sur Amazon le sont par des habitants de communes de moins de 10 000 habitants […] », affirmait Amazon. Et d’ajouter : « Des alternatives existent qui ne pénaliseraient ni la lecture, ni le pouvoir d’achat des Français, par exemple la mise en place d’un tarif postal dédié, comme cela existe pour les expéditions de livres vers l’étranger : envoyer un livre de 500 grammes à Londres coûte ainsi 1,49€, alors que l’envoyer à une adresse française coûte quatre fois plus cher, à savoir 6€ ».

Le discours n’a pas changé, comme en témoigne la dernière déclaration du groupe. Amazon nous fait savoir qu’il s’inquiète aujourd’hui de « l’impact qu’aura cette mesure sur la lecture et sur les lecteurs, notamment ceux vivant dans les zones rurales et les petites villes ».

Une inflation, des questions : les consommateurs dubitatifs sur cette hausse

Le géant américain défend évidemment son activité, mais force est de constater que ces arguments rejoignent ceux des consommateurs. L’Arcep indique (PDF) que la grande majorité des contributions reçues de la part de consommateurs s’opposait à l’augmentation des frais de port. Nombreux sont ceux à évoquer le cas des personnes habitant en milieu rural qui habitent loin d’une librairie. Ils font aussi part du coût et de l’impact sur l’environnement associés à ces déplacements.

La situation des personnes plus âgées ou souffrant de handicap revient aussi avec insistance. Dans ce cas, la livraison à domicile est une réponse aux problèmes de déplacement. Dans notre article consacré à cette mesure, nous retrouvons d’ailleurs les mêmes arguments :

Commentaires JDG livraison livres
© Capture d’écran / JournalduGeek.com

Le marché du livre a de la ressource

Le livre physique démontre depuis quelques années qu’il a de la ressource. Alors que les années Covid ont bousculé le domaine culturel, le livre a fait mieux que résister et il a même confirmé une hausse non négligeable en 2022. Outre des résultats encourageants, les créations de librairies en France sont en hausse.

Néanmoins, ce secteur n’échappe pas aux difficultés actuelles comme l’inflation. Les prix des livres ont augmenté ces derniers mois et cette mesure touche encore le portefeuille des consommateurs.

Les liseuses et les abonnements, les vrais gagnants de ce changement ?

La hausse des frais de port pourrait en effet booster les ventes de liseuses électroniques. Ces dernières ont le vent en poupe depuis le confinement et la lecture sur écran progresse. Un baromètre de 2021 indiquait que le nombre de lecteurs numériques avait doublé en cinq ans. De plus, ces liseuses s’accompagnent de service d’abonnements. Un « Netflix du livre » est notamment disponible chez un certain géant américain de l’e-commerce.

Vous voyez où on veut en venir ? Amazon est un poids lourd de ce secteur avec ses Kindle et le programme qui va avec. Il y a aussi son grand rival Kobo qui propose des liseuses, un abonnement Kobo Plus et bénéficie d’un partenariat avec Fnac. Enfin, on pense à Scribd, Youboox ou encore YouScribe. Ces services proposent des abonnements autour de 10 euros, donnant accès à des milliers de ebooks, livres audio, presse, BD.

Finalement, ce changement pourrait avoir l’effet inverse de celui escompté. Il risque de pousser les lecteurs à chercher la solution la plus économique. Cela peut passer par des commandes plus importantes – ou groupées – pour dépasser la limite de 35 euros. À noter qu’un certain flou subsiste sur les offres multiservices comme Amazon Prime ou la Carte FNAC+. Selon l’Arcep, le fait d’opter pour un tel abonnement « peut effectivement accorder un avantage tarifaire sur la livraison de livres ». Cependant, cet avantage ne peut faire en sorte que le tarif payé par l’acheteur soit inférieur au tarif minimum obligatoire. Quant à la solution numérique, l’achat d’une liseuse électronique peut vite être rentabilisée.

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2 commentaires
  1. On peut aisément et facilement trouver la plupart des livres gratuitement si on se débrouille bien. La liseuse est vite rentabilisée.

  2. Pas besoin liseuse une application comme ReadEra offre un confort extraordinaire de lecture sur smartphone ❗

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