The Independant a récemment relayé l’histoire de Joseph Dituri, un ancien commandant de la Navy désormais professeur associé à l’Université de Floride. Cet amoureux des grands fonds, qui a notamment participé à la mission Deepsea Challenger de James Cameron, s’est lancé un défi un peu particulier. Depuis le début du mois de mars, il réside dans une capsule immergée dans la baie de Key Largo, en Floride ; son objectif est d’y rester 100 jours au total.
S’il y parvient, il battra le record actuel de 73 jours établi par Bruce Cantrell et Jessica Fain en 2014. Mais l’objectif prioritaire de Dituri n’est pas de laisser une trace dans l’Histoire. Il s’agit d’une aventure avant tout scientifique dont l’objectif est d’étudier les effets de la pression sur le corps humain pendant.
En effet, tous les adeptes de la plongée savent déjà que notre organisme peut subir des dégâts catastrophiques lorsqu’il est exposé à un différentiel de pression trop important. Mais plusieurs études ont aussi montré que cette activité pouvait avoir des effets bénéfiques sur la santé physique lorsqu’elle est pratiquée de la bonne manière. Par exemple, ce papier de recherche de 2015 suggère que l’immersion profonde augmente la production d’une classe particulière de cellules souches.
Étudier l’influence de la pression sur le long terme
L’idée, de Dituri, c’est de vérifier ce qui se passe au niveau physiologique lorsque le corps est exposé pendant une durée prolongée à une pression certes modeste, mais tout de même bien plus importante qu’à la surface.
Sa capsule est installée à un peu moins de 10 mètres de la surface. À cette profondeur, la pression approche des 2 bar, soit à peu près le double de la pression atmosphérique à laquelle notre corps est adapté. Pas de quoi provoquer un grave accident de décompression, mais suffisant pour mettre en évidence d’éventuelles modifications physiologiques.
Une partie de ces changements est déjà connue d’avance. On sait par exemple qu’il devrait rétrécir d’environ 2,5 centimètres au terme de son séjour sous l’influence de la pression. C’est l’inverse de ce qui se passe chez les astronautes, qui ont tendance à grandir légèrement lorsqu’ils passent un long séjour en microgravité.
Mais pour le reste, c’est le vide sidéral ; personne ne sait exactement à quoi s’attendre puisqu’aucun humain n’a jamais passé aussi longtemps sous l’eau dans le cadre d’une étude scientifique. L’un des objectifs du séjour sera donc de tester certaines hypothèses.
De nombreux bénéfices médicaux potentiels
Par exemple, il a été démontré que des thérapies en chambre hyperbare (un caisson utilisé, entre autres, pour terminer la décompression chez des plongeurs qui ont été forcés de remonter trop vite) pouvaient avoir des effets physiologiques remarquables.
Ce papier de recherche affirme par exemple que cela provoque un allongement des télomères. Ce terme désigne les régions situées à l’extrémité des chromosomes. C’est assez significatif, car le raccourcissement progressif de ces télomères est considéré comme un facteur très important dans le processus de vieillissement.
Pour vérifier tout cela, Dituri va devoir s’astreindre à un protocole strict. Jusqu’à la fin de son séjour dans cette boîte sous-marine de 10 mètres carrés, il sera suivi de près. Une équipe de médecins et de psychologues veillera sur lui en permanence. D’après The Independant, il doit régulièrement envoyer des échantillons de sang et d’urine à la surface pour analyse. Dans un des tweets où il documente son expérience solitaire, il explique aussi qu’il doit aussi se soumettre à de nombreux examens psychologiques et neurologiques directement sur place.
19 psychological tests we do before during and after our 100 days of exposure to this Isolated Confined extreme environmenthttps://t.co/va5a5Lrv2A
— Joseph Dituri, Ph.D. (@drdeepsea) March 24, 2023
Aux dernières nouvelles, après un mois d’immersion, l’intéressé se sentait « merveilleusement bien ». Il n’a rencontré que quelques désagréments mineurs. Il explique par exemple que la pression a tendance à compliquer légèrement les passages aux toilettes.
La seule vraie inconnue concerne la sortie de cet habitat. En effet, puisque personne n’a séjourné aussi longtemps en profondeur, personne ne sait comment le corps de Dituri va réagir à la décompression. Même si la profondeur est assez modeste, il devra sans doute respecter plusieurs paliers de décompression, par principe de précaution.
Un peu de biologie marine pour la route
Mais d’ici là, l’expérience pourrait bien révéler d’autres surprises scientifiques. Tout récemment, Dituri a annoncé qu’il était tombé sur un micro-organisme inconnu au bataillon.
« Nous avons trouvé un cilié unicellulaire dont nous pensons qu’il appartient à une toute nouvelle espèce », a-t-il raconté lors de son interview à The Independant. L’échantillon a été acheminé vers la surface, et il est désormais entre les mains d’une équipe de microbiologistes. Ils vont continuer à passer la littérature scientifique en revue pour vérifier s’il s’agit effectivement d’une espèce jamais documentée auparavant. Malheureusement, ils n’ont pas encore livré la moindre indication complémentaire. Impossible d’en savoir plus sur ce mystérieux cilié pour le moment.
Au terme du protocole, il sera donc très intéressant de se pencher sur les conclusions de l’équipe médicale et des biologistes. Avec un peu de chance, cette expérience pourrait donner davantage de poids à des pistes thérapeutiques très intéressantes pour contrer certains soucis immunitaires, mais aussi les problèmes liés au vieillissement. Espérons simplement que cette expérience ne sera pas un avant-goût de ce qui nous attend après plusieurs décennies de montée des océans sous l’effet du réchauffement climatique…
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c’est génial, c’est magnifique…
de ma part je suis prêt à toute intervention pareille ex 150 jours où bien 20 mètres…
enfin je suis interressé à savoir tout sur cette aventure
Bel article, avec une source très intéressante.