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Le JWST capture une étoile rare à deux doigts de la supernova

Le roi des télescopes continue de nous en mettre plein les yeux tout en rapportant des données fascinantes aux astronomes.

La NASA vient de nous offrir une nouvelle vue saisissante rapportée par le James Webb Space Telescope : il a surpris une étoile massive, mais aussi assez pudique, car cachée derrière un épais voile de poussière. Elle est sur le point de finir en supernova, et les scientifiques espèrent bien lui tirer les vers du nez avant l’heure fatidique.

Baptisée WR 124, elle est une pensionnaire de la constellation du Sagittaire. Elle doit son nom à sa classification un peu particulière. En effet, elle est considérée comme une étoile Wolf-Rayet. Ce terme désigne une étape transitoire que traversent certains astres extrêmement chauds, massifs et lumineux quand ils approchent de la fin de leur cycle de vie. A ce stade, la supernova devient imminente ; cela signifie qu’elle est toute proche de finir sa vie en apothéose à la faveur d’une explosion thermonucléaire aux proportions apocalyptiques.

Avant d’en arriver là, ces objets émettent un long râle d’agonie. Ils expulsent leurs couches externes sous forme de vents stellaires très intenses. Cela revient à éjecter des quantités phénoménales de matériel dans la zone avoisinante. Il s’accumule alors dans un halo de poussière et de gaz caractéristique qui produit souvent de belles images. En août 2022, le JWST avait par exemple capturé le magnifique halo de WR 140, qui nous apparaît comme une sorte de toile d’araignée cosmique.

Un mystérieux surplus de poussière

Dans le cas de WR 124, ce halo est particulièrement spectaculaire. C’est d’abord une question de taille; l’intéressée est environ 30 fois plus lourde que notre étoile. Elle a déjà éjecté l’équivalent de 10 masses solaires de gaz et de poussière. Cela en fait un objet d’étude très prometteur pour les chercheurs.

En effet, cette poussière joue un rôle déterminant dans la dynamique globale de l’univers. « Elle abrite les étoiles en formation, elle s’accumule pour former des planètes, et elle sert de plateforme pour que des molécules puissent se former et s’agglomérer — y compris les éléments de la vie sur Terre », précise la NASA dans son communiqué. Et il ne s’agit que d’exemples isolés qui ne suffisent pas à décrire l’importance de ce matériel.

Mais si les astronomes ont déjà identifié son rôle dans des tas de mécanismes, il reste un problème de quantité qui continue de les laisser perplexes. On observe trop de poussière dans l’univers par rapport à ce que prévoient les modèles cosmologiques. A l’heure actuelle, aucune théorie n’est capable d’expliquer d’où provient cette différence. Même les modèles mathématiques les plus extravagants sont encore très loin du compte.

Le roi des télescopes à la rescousse

Cela rend les étoiles Wolf-Rayet encore plus intéressantes pour les chercheurs. Puisqu’elles éjectent énormément de poussière, elles contribuent forcément à ce surplus de matériel. Les spécialistes espèrent donc y trouver certaines pièces manquantes de ce grand puzzle cosmique grâce à la puissance du JWST.

Le nouveau roi des télescopes est spécialisé dans l’observation des rayonnements infrarouges, qui sont capables de se frayer un chemin au milieu de ces nuages de matière. Il peut donc tirer beaucoup plus d’informations qu’un appareil comme Hubble, qui observe dans l’UV et le visible, lorsqu’il scrute la structure interne d’une étoile Wolf-Rayet.

La nébuleuse de WR 124 capturée par Hubble
La nébuleuse de WR 124, ici capturée par Hubble. Ce n’est pas évident à l’œil nu, mais cette image contient beaucoup moins d’informations que celle du JWST. © ESA/Hubble & NASA – Judy Schmidt

Sur l’image présentée par la NASA, on observe ainsi de superbes volutes de poussière et de gaz. Elles sont illuminées de l’intérieur par le rayonnement infrarouge de l’étoile. Un spectacle saisissant, puisqu’elles sont généralement bien cachées au cœur du halo. Et ce genre d’image pourrait rapidement apporter des informations très utiles.

« Avant le Webb, les astronomes n’avaient tout simplement pas assez d’informations détaillées pour explorer la question de la production de poussière dans de tels environnements », explique la NASA. Désormais, les chercheurs peuvent mesurer cette quantité de matériel avec une bonne précision.

Une fenêtre sur le passé et le futur de l’Univers

Ils pourront donc tenter de déterminer si les étoiles Wolf-Rayet permettent à elles seules d’expliquer ce surplus de poussière à l’échelle de l’univers. Si cela se vérifie, il s’agira d’une information très importante. Cela permettra d’affiner les modèles qui décrivent, entre autres, la formation des corps célestes. Avec tout ce que cela implique pour notre compréhension globale de l’univers.

Et dans le cas contraire, cela signifie qu’il reste encore d’autres phénomènes qui produisent de grandes quantités de poussière. Tout l’enjeu sera de trouver de quoi il s’agit, et il s’agira également d’une quête fascinante. Et cela ne diminuerait pas l’intérêt des étoiles Wolf-Rayet, loin de là.

Car ce n’est pas seulement à cause de la poussière qu’elles fascinent les chercheurs. Ces derniers les utilisent aussi comme modèles pour comprendre une période cruciale de l’univers précoce. En effet, les étoiles Wolf-Rayet sont assez similaires aux astres suspectés d’avoir ensemencé le cosmos d’antan avec les premiers éléments lourds. En les étudiant, les chercheurs peuvent donc travailler sur des mécanismes qui ont directement contribué à l’apparition de l’univers tel qu’on l’observe aujourd’hui.

Les étoiles Wolf-Rayet sont donc prévenues. Elles n’auront droit à aucune intimité ces prochaines années; le Webb va continuer d’en observer aussi souvent que possible. Et cela produira sans doute de nouvelles images somptueuses comme celle-ci.

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Source : NASA

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