Lundi 6 mars, la Station spatiale internationale a dû mettre un coup d’accélérateur pour éviter une collision potentiellement catastrophique avec un autre engin, explique la NASA dans un billet de blog.
Un peu avant 14 h, les propulseurs du module Progress 83 ont été mis à contribution. Ils ont accéléré pendant un peu plus de six minutes pour élever l’orbite de la station. Cela lui a permis de sortir de la trajectoire d’un satellite d’observation dont elle aurait pu croiser la route à ce moment précis.
Comme souvent dans ces cas de figure, les regards se sont rapidement tournés vers Jonathan McDowell. Il s’agit d’un astrophysicien renommé qui fait partie des références mondiales dans le suivi des satellites. Il a finalement livré son analyse sur Twitter le lendemain.
Orbital decay: the Satellogic constellation is only one of a number of Earth observing constellations with multiple satellites entering the ISS orbital height regime. Im magenta, Nusat-17 which was the cause of yesterday's ISS dodge manuever pic.twitter.com/OM0mcToe0p
— Jonathan McDowell (@planet4589) March 7, 2023
Un satellite d’observation en perte de vitesse
Selon lui, il s’agissait d’un satellite de type ÑuSat. Cela signifie qu’il appartenait forcément à Aleph-1, une constellation de satellites d’observation argentine qui est la seule à utiliser ce modèle. Sa particularité, c’est que depuis environ trois ans, ses engins subissent un déclin d’orbite assez prononcé.
Ce terme désigne une situation où un objet perd de la vitesse à cause de la friction avec les quelques particules d’air de la haute atmosphère. Or, la vélocité d’un objet et l’altitude de son orbite sont liées mathématiquement ; si un objet ralentit, il commence aussi à retomber lentement, mais sûrement vers la Terre. Et c’est exactement ce qui se passe avec Aleph-1. Résultat : plusieurs satellites ÑuSat viennent désormais marcher sur les platebandes de l’ISS, qui évolue environ 100 km en dessous de leur orbite originale.
Heureusement, il ne s’agissait pas d’une esquive de dernière minute. D’après Sandra Jones, responsable de la communication à la NASA interrogée par Space.com, l’agence a été avertie environ 30 heures à l’avance. Elle a donc pu prendre les devants tranquillement. Une équipe d’ingénieurs a calculé la manœuvre d’évitement. Pendant ce temps, l’équipage de la station a travaillé avec la NASA et Roscosmos pour préparer les propulseurs.
L’opération s’est déroulée sans problème. L’ISS est désormais saine et sauve, et ce petit contretemps ne viendra même pas perturber le calendrier des agences spatiales. « Cette manœuvre ne va pas interférer avec la gestion du trafic autour de l’ISS », assure Jones. Une bonne nouvelle pour les trois astronautes et le cosmonaute de la mission Crew-5, qui doivent repartir vers la Terre très bientôt.
Les dernières années de l’ISS vont être mouvementées
Ce n’est pas la première fois que l’ISS doit procéder à une manœuvre d’évitement de ce genre, loin de là. Depuis 1999, la station a déjà dû effectuer 32 corrections de trajectoire de ce genre. L’année dernière, elle s’est ainsi écartée à deux reprises pour éviter les débris de Kosmos-1408. Pour rappel, il s’agit d’un satellite détruit par la Russie en novembre 2021 dans le cadre d’un test militaire, ce qui lui a valu de sévères remontrances de la part de ses partenaires (voir notre article).
Jusqu’à présent, les systèmes de suivi des agences spatiales ont toujours bien fonctionné. L’ISS n’a jamais été menacée de façon critique et imminente. C’est un point très encourageant. Mais les agences spatiales vont aussi devoir faire de plus en plus attention.
Car dans le contexte actuel, où de plus en plus d’entreprises privées envoient des engins en orbite chaque jour, le trafic commence à devenir considérable à quelques centaines de kilomètres de la Terre. Et avec des acteurs comme SpaceX qui vont encore déployer plusieurs milliers de satellites ces prochaines années, la situation ne va pas s’arranger. Cela suggère que les opérateurs de la station vont devoir redoubler de vigilance. Il est fort probable qu’ils doivent réaliser beaucoup plus de manœuvres de ce genre avant la retraite de l’ISS, prévue autour de 2030 (voir notre article).
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