Une éruption solaire a mis une fusée de SpaceX à l’arrêt
Dans la nuit du 26 février, puis une nouvelle fois la soirée du 27, l’arrivée de deux tempêtes solaires consécutives a provoqué de somptueuses aurores. Les habitants des régions nordiques et les astronautes ont eu droit à des spectacles saisissants, et une fois n’est pas coutume, même les Français ont pu en profiter… mais tout le monde n’a pas été logé à la même enseigne ; pendant que les terriens s’extasiaient devant ces volutes colorées, les ingénieurs de SpaceX ont été forcés de repousser le lancement d’une fusée.
Les aurores sont causées par des flux de particules chargées en provenance du Soleil. Ces dernières sont émises en grandes quantités lors de certains événements qui se déroulent à la surface de l’astre, comme les éruptions solaires et les éjections de masse coronale. Il en résulte alors ce qu’on appelle un vent solaire particulièrement intense.
Lorsque ce vent approche de la Terre, ces particules chargées sont généralement déviées par le champ magnétique de la planète. Mais ce dernier n’est pas complètement uniforme. Les lignes de champ qui permettent de le définir s’affaissent au niveau des pôles, ce qui permet aux particules d’atteindre la haute atmosphère. Ces dernières entrent alors en collision avec les gaz qui y résident.
Ce sont ces interactions qui produisent les grandes nappes colorées qui dansent dans le ciel. Et lorsqu’un vent solaire particulièrement intense percute le champ magnétique terrestre, comme c’était le cas avant-hier, il peut même l’enfoncer, un peu comme un énorme bélier. On obtient alors des aurores particulièrement vives, visibles bien au-delà des pôles.
Un spectacle à couper le souffle
Et c’est précisément ce qui s’est passé ces derniers jours. En l’espace de 48 heures, la Terre a été bombardée par un vent solaire très violent et a subi deux éjections de masse coronale (d’immenses bulles de plasma catapultées par l’étoile) consécutives. Résultat : même les Français ont eu droit à de beaux spectacles !
Pendant que vous dormiez paisiblement, des aurores boréales ont été observées en France et immortalisées par les passionnés de météorologie sur le Photolive d'@infoclimat 👇
📷FlorianBigand (Pas-de-Calais)
📷Droupi (Bourgogne)
📷 Max.B (Poitou)
📷 Sylvain62 (Pas-De-Calais) pic.twitter.com/bAx7wm0eAT— Dr. Serge Zaka (Dr. Zarge) (@SergeZaka) February 27, 2023
Mais nous étions tout de même moins bien lotis que les chasseurs d’aurores des hautes latitudes. Dans ces régions, les astrophotographes ont pu s’en donner à cœur joie. Voici quelques superbes exemples partagés sur les réseaux sociaux.
https://twitter.com/itshannahlclose/status/1630149905929981952
OMG!! The Coronas at twilight this morning were insane!!😱#teamtanner #aurora @treetanner @TamithaSkov @NightLights_AM @chunder10 @scottrockphoto @GirlsWhoChase @mikesobel @ScottWx_TWN pic.twitter.com/bM0TXrnGbD
— Dar Tanner (@dartanner) February 27, 2023
A little timelapse of the #Aurora last night, just south of Mandurah.
I didn't intend it as a timelapse so the positioning is a bit all over the place, but at least you can see the movement of the aurora! pic.twitter.com/XYDK3eiL3T— Shelley ⚓️ (@wheresshelly) February 28, 2023
Certains d’entre eux étaient même particulièrement bien placés. C’était le cas de l’astronaute John Cassada qui a capturé cette image incroyable depuis l’ISS.
Absolutely unreal. pic.twitter.com/pah5PSC0bl
— Josh Cassada (@astro_josh) February 28, 2023
Mais pour de nombreux professionnels, ces aurores étaient tout sauf une bénédiction. En effet, le vent solaire qui en est à l’origine ne fait pas que colorer le ciel. Il a aussi des conséquences très concrètes pour certaines branches de l’industrie.
SpaceX victime des caprices du Soleil
Et cette fois, c’est SpaceX qui en a fait les frais. Le 27 février, la firme avait prévu un lancement très important. Elle devait mettre sa première fournée de satellites Starlink V2 en orbite. Le début d’une grande transition générationnelle qu’il ne fallait manquer sous aucun prétexte. Lorsque les ingénieurs ont pris connaissance de cette tempête solaire, ils ont donc préféré jouer la carte de la sécurité. Le lanceur a été cloué au sol pendant plusieurs heures, jusqu’à ce que l’intensité du phénomène diminue.
Il y a deux raisons à cette décision. La première, c’est que ce déluge de particules chargées a tendance à perturber les systèmes électriques, ainsi que les signaux radio et GPS. Plutôt embêtant lorsqu’il s’agit de véhicules qui dépendent entièrement de ces technologies.
La deuxième, c’est que ces tempêtes posent aussi un problème de navigation en orbite. Lorsque les particules chargées atteignent la haute atmosphère, celle-ci a tendance à se dilater. Cela augmente la densité des gaz en altitude. Et c’est un gros problème pour les satellites, car l’air se comporte comme un frein. Ils peuvent donc avoir du mal à atteindre l’orbite visée, voire même en décrocher (voir notre article).
C’est une situation à laquelle SpaceX a déjà été confrontée. En février 2022, l’entreprise a perdu une cargaison de 40 satellites après les avoir lancés au beau milieu d’une tempête solaire pourtant assez faible (voir notre article). Cela explique les précautions prises lors de ce lancement.
Et les opérateurs vont probablement devoir y faire de plus en plus attention à l’avenir. Le Soleil approche en ce moment du pic de son cycle d’activité de 11 ans. D’ici à 2025, le nombre de tempêtes solaires et leur intensité ne vont faire qu’augmenter.
Sans céder au catastrophisme, il va donc falloir toucher du bois pour que notre étoile se montre clémente. Car si une tempête solaire particulièrement violente frappe la Terre un jour, elle pourrait détruire une grande partie des systèmes électriques de la planète en un clin d’œil, avec des conséquences potentiellement apocalyptiques à la clé voir notre article ci-dessous).
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