Des chercheurs ont récemment annoncé qu’une personne de 53 ans résidant en Allemagne, surnommée « patient de Düsseldorf », était désormais considérée comme complètement guérie du VIH.
L’intéressé avait été diagnostiqué séropositif en 2008. L’évolution des symptômes l’a conduit à subir une longue thérapie à base d’antirétroviraux, mais le pronostic vital a continué de s’assombrir. Deux ans plus tard, il a développé une leucémie, une forme de cancer de la moelle osseuse qui touche des cellules indispensables à l’immunité.
À court de solutions, les médecins lui ont donc proposé un protocole risqué : une greffe de cellules souches. Mais pas n’importe lesquelles. Comme chez les quatre patients précédents, ce matériel provenait de donneurs un peu particuliers.
Une greffe salvatrice de cellules souches mutées
Ces derniers étaient en effet porteurs d’une mutation génétique rare qui touche moins d’1 % de la population. Très vulgairement, elle a pour effet de fermer complètement la porte des cellules au VIH, et donc d’empêcher l’infection. En résumé, les porteurs de cette mutation sont plus ou moins invulnérables aux assauts du virus.
Les chercheurs ont tenté d’exploiter cette particularité en pratiquant une greffe de cellules souches de moelle osseuse. L’objectif de cette procédure est généralement de traiter un cancer très agressif. Mais les résultats ont aussi été assez encourageants dans le cas du VIH. Après de longues années de suivi, les médecins ont considéré que deux patients (dits « de Berlin, » et « de Londres ») avaient été entièrement guéris de cette façon.
En 2022, d’autres chercheurs ont annoncé des guérisons similaires à City of Hope et New York, aux États-Unis. À noter qu’il demeure une part d’incertitude sur ces deux derniers cas, car certains chercheurs estiment qu’il est encore trop tôt pour crier victoire. Mais à l’heure actuelle, les deux patients concernés
Une vraie guérison complète
Mais l’important, c’est que comme ses prédécesseurs, le patient de Düsseldorf a bien réagi au traitement. Après plus de quatre ans sans prendre la moindre dose d’antirétroviraux, ses soignants ne détectent plus de particules virales actives dans son organisme. « C’est vraiment une guérison, et pas juste une rémission sur le long terme », affirme le médecin Dr Bjorn-Erik Ole Jensen.
C’est une distinction importante, car même avec une thérapie à base d’antirétroviraux, le VIH peut persister dans une forme dormante pendant de longues années. L’enjeu d’une vraie guérison, c’est donc d’éliminer ces réservoirs, et c’est ce qui semble s’être passé avec ce patient de Düsseldorf.
Il s’agit donc d’un nouveau succès retentissant dans la lutte contre ce virus longtemps jugé incurable.
Une approche trop exclusive pour être généralisée
Mais malheureusement, cela ne signifie toujours pas qu’un traitement pourra être commercialisé dans un futur proche.
La principale limite de cette approche, c’est que la greffe de cellules souches de moelle osseuse est une procédure à haut risque. Elle n’est généralement utilisée qu’en dernier recours dans des cas de cancers très agressifs. Et seulement après avoir écarté toutes les autres options.
Or, aujourd’hui, certains séropositifs peuvent vivre presque normalement pendant de très longues années avec un traitement adapté. Aujourd’hui, les cliniciens considèrent que le risque est trop important pour être justifiable. Pas question de procéder à ce genre de greffe tant qu’il n’y a pas de cancer sous-jacent.
De plus, même si des progrès techniques permettaient de contourner ce problème, il en resterait un autre très important. Pour l’instant, la disponibilité des greffons est encore largement insuffisante.
À cause du faible nombre de donneurs, il est déjà très difficile de bénéficier d’une greffe de cellules souches de moelle osseuse en temps normal. Et forcément, c’est encore plus compliqué de trouver des échantillons qui présentent aussi cette mutation rare. À l’heure actuelle, seuls quelques milliers de porteurs ont été identifiés à l’échelle de la planète. De plus, il faut aussi que le donneur soit biologiquement compatible avec le receveur. Autrement, on risque de voir apparaître un syndrome de rejet souvent fatal pour ces patients très affaiblis.
Une étape encourageante vers un vrai traitement
En résumé, l’approche qui a permis de sauver ces patients ne peut pas être utilisée à grande échelle en l’état.
Mais il convient tout de même de se réjouir de cette nouvelle guérison du VIH. Car tout l’enjeu, désormais, c’est de comprendre les mécanismes biologiques qui permettent à l’organisme de se débarrasser du virus. Et à chaque succès de ce genre, les chercheurs s’en rapprochent un petit peu plus.
À terme, cela pourrait conduire à l’apparition de nouveaux protocoles beaucoup plus abordables. Il pourrait par exemple s’agir d’une forme de thérapie génique. On peut aussi imaginer un traitement médicamenteux qui reproduirait les effets de cette fameuse mutation. Si l’humanité parvient enfin à se débarrasser du VIH d’ici quelques décennies, ce sera en grande partie grâce à la contribution de ces précurseurs qui ont réussi à terrasser le terrible virus.
Le texte de l’étude est disponible ici.
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Faudrait faire un élevage de bébés et les utiliser pour sauvez les autres… et après ont pourraient les manger en saucisses!