C’était la prochaine étape évidente après le wet dress rehearsal du 24 janvier dernier ; dans la nuit, SpaceX a procédé à un test de mise à feu simultanée de tous les moteurs-fusées de l’immense lanceur Super Heavy, l’engin qui permettra au Starship de faire le grand saut vers l’orbite. Globalement, l’opération a été un succès. Malgré un bémol de taille, ce test rapproche encore le véhicule de son baptême de l’orbite très attendu.
Le Super Heavy, un véritable béhémoth de presque 70 mètres de haut pour plus de 3600 tonnes au décollage, dispose au total de 33 moteurs-fusées. Cette cohorte de Raptor V2 est capable de développer une poussée gigantesque, de l’ordre de 7500 tonnes. Avant le grand départ, il faut donc s’assurer que tous ces éléments sont capables de fonctionner de concert, et que le pas de tir est en mesure d’encaisser les contraintes immenses qui y sont associées.
La mise à feu s’est faite à 16 h 14 heure locale, soit à 22 h 14 en France. La bonne nouvelle, c’est que la firme a pu mener ce test de 15 secondes (avec une phase de poussée de 6 secondes) jusqu’à son terme. Et le bilan s’est avéré très positif : les ingénieurs ont confirmé que le reste de la structure s’était comporté comme prévu.
L’autre information très importante, c’est que le pas de tir a supporté ce déluge de gaz surchauffé sans broncher. Il est resté dans un état tout à fait acceptable et n’aura pas besoin d’être réparé après cette unique mise à feu. Une excellente nouvelle pour la suite des opérations. Car à terme, SpaceX ambitionne de faire décoller plusieurs de ces véhicules dans des délais relativement courts.
Deux Raptors récalcitrants
Mais il y a toutefois une ombre significative au tableau. En effet, peu avant le compte à rebours, les équipes au sol ont remarqué un léger dysfonctionnement sur l’une des unités. Le chef des opérations a donc décidé de ne pas le solliciter lors de ce test, par mesure de précaution. Et au moment de la mise à feu, un second Raptor a également flanché. Au final, seuls 31 des 33 propulseurs ont fonctionné correctement.
Même si les plus pointilleux vont donc considérer ce test comme un échec, il s’agit tout de même d’un résultat très encourageant. Pour l’anecdote, SpaceX a en a aussi profité pour battre un record historique d’une courte tête : celui du nombre de moteurs mis à feu en simultané. Il revenait jusque-là au lanceur soviétique N1, avec ses 30 moteurs — un record qui tenait depuis plus d’un demi-siècle.
De plus, même dans cette configuration, Super Heavy affiche encore une poussée extrêmement importante. Le lanceur est si puissant qu’il dispose d’une marge de manœuvre confortable. D’après Elon Musk, ces 31 moteurs sont encore largement suffisants pour atteindre l’orbite terrestre basse.
Team turned off 1 engine just before start & 1 stopped itself, so 31 engines fired overall.
But still enough engines to reach orbit! https://t.co/QYx3oVM4Gw
— Elon Musk (@elonmusk) February 9, 2023
La dernière ligne droite avant l’orbite
Et cette échéance se rapproche désormais à grands pas. Dans une conférence qui s’est tenue il y a deux jours, la Présidente de SpaceX Gwynne Shotwell expliquait qu’en cas de succès, le Starship serait vraisemblablement prêt à rallier l’espace dans moins d’un mois — à condition d’obtenir la licence de vol à temps. Il faudra désormais déterminer l’impact de ces deux défaillances sur le calendrier de la mission.
L’information la plus attendue, c’est le nombre de moteurs-fusées qui devront être remplacés après ce test. Pour rappel, le couple Starship-Super Heavy est censé être entièrement réutilisable. La durabilité des moteurs au-delà de la première mise à feu sera donc déterminante. Pour l’instant, SpaceX n’a pas communiqué à ce sujet.
Le verdict aura un impact significatif sur la suite des événements. Si l’état général des moteurs est jugé satisfaisant, SpaceX pourrait choisir de procéder à un premier test de mise en orbite dans la configuration actuelle, avec seulement 31 d’entre eux.
Autrement, la firme devra vraisemblablement attendre de signer un véritable carton plein lors d’un nouveau test de mise à feu statique. Le cas échéant, cela implique forcément de remplacer au moins une partie des moteurs. Cela repousserait probablement le baptême de l’orbite du Starship au-delà du nouveau délai récemment annoncé par Musk. De quoi faire honneur à une citation désormais célèbre du gourou de la tech : « Chez SpaceX, notre spécialité, c’est de passer “d’impossible” à “en retard”. »
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