Habituellement, quand les Nations Unies parlent de climat, c’est pour tirer la sonnette d’alarme par rapport aux catastrophes qui nous attendent au tournant. Mais une fois n’est pas coutume, l’institution est arrivée avec d’excellentes nouvelles : la couche d’ozone se porte comme un charme ! Une bonne occasion de revenir sur une aventure scientifique qui force le respect, et qui montre que malgré ses déboires actuels, l’humanité n’est pas forcément un cas désespéré.
L’ozone, c’est un gaz qui se forme lorsque le rayonnement solaire vient briser les liaisons entre les atomes qui composent le dioxygène. Ces derniers cherchent alors à se recombiner, car en solitaire, ils sont énergétiquement instables. Cela aboutit à la formation d’ozone (O3).
Lorsqu’on le retrouve dans la couche inférieure de l’atmosphère, c’est une mauvaise nouvelle ; dans ce contexte, c’est techniquement un gaz à effet de serre qui est aussi toxique en grandes quantités. Mais la donne change complètement lorsqu’on grimpe plus haut dans l’atmosphère.
Un bouclier pour toute la civilisation
À quelques dizaines de kilomètres d’altitude, on arrive dans une autre couche de l’atmosphère : la stratosphère. Or, dans la partie supérieure de cette dernière, on trouve une concentration relativement importante d’ozone. Vous l’aurez compris : il s’agit de la fameuse « couche d’ozone ». En termes de volume, elle serait presque négligeable. Mais elle joue en fait un rôle de protection absolument fondamental.
En effet, l’ozone a la particularité d’absorber certaines longueurs d’ondes électromagnétiques, en particulier les UV. Or, ces derniers sont extrêmement dangereux. Ils disposent d’un pouvoir mutagène très important. En cas d’exposition importante, ils peuvent notamment provoquer des cancers. La vie telle qu’on la connaît doit donc une fière chandelle à la couche d’ozone.
Mais dans les années 1970, des chercheurs ont commencé à réaliser que la concentration en ozone était en chute libre. Un constat excessivement préoccupant, connaissant le rôle de bouclier de cette structure naturelle.
Pire, ils ont même observé l’apparition progressive d’une région quasiment vide de ce gaz : c’est le fameux « trou de la couche d’ozone » dont nous avons tous entendu parler. La conclusion était donc claire : il fallait absolument trouver l’origine de ce phénomène, sous peine de voir exploser le nombre de cancers chez les prochaines générations.
Une mobilisation sans précédent
Cela a commencé par une grande mobilisation de la communauté scientifique. L’objectif : trouver l’origine de ce déclin. Assez rapidement, un coupable a émergé. Il s’agissait des chlorofluorocarbures (CFC), une classe de gaz fluorés fréquemment utilisés dans des aérosols et des systèmes de réfrigération.
Nous avons donc une situation inquiétante, un coupable bien identifié et des pistes d’actions claires. Tous les ingrédients pour résoudre le problème, en somme. Mais il fallait encore un dernier élément : la volonté politique. Or, en pleine crise climatique, nous constatons aujourd’hui que cette dernière a tendance à faire défaut lorsqu’on parle de climat…
La situation aurait donc aisément pu dégénérer. Mais fort heureusement, dans le cas de la couche d’ozone, les décideurs de l’époque n’ont pas fait preuve du même attentisme qu’on constate aujourd’hui. Une fois n’est pas coutume, l’humanité a répondu présente en s’attaquant directement à la racine du problème. Un cas quasiment unique dans notre histoire moderne.
Quelques mois à peine après avoir identifié le trou de la couche d’ozone, suspendu au-dessus de l’Antarctique comme une épée de Damoclès, 24 pays ont organisé la Convention de Vienne, puis le Protocole de Montréal. L’objectif de ces deux séries d’accords : éradiquer complètement toutes les substances qui minaient la couche d’ozone.
Ces traités, ratifiés en 1987, ont été approuvés à l’unanimité par 196 États et par l’Union européenne. Une réussite historique pour l’ONU : c’est tout simplement la première fois qu’un texte était adopté à l’unanimité par la totalité des états membres. Un bel exemple d’unité au poids symbolique non négligeable.
La couche d’ozone bientôt guérie
Pendant les treize années suivantes, le trou a continué de grandir. Mais cette initiative a fini par payer. Car à l’aube du nouveau millénaire, les chercheurs ont déterminé que la tendance s’était enfin inversée : le trou de la couche d’ozone a commencé à se refermer. Encore mieux : les modélisations de l’époque ont suggéré qu’il pourrait guérir entièrement en quelques décennies.
Une victoire immense pour toute l’humanité. Mais comme toujours en science, il aurait été bien imprudent de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Il fallait encore patienter le temps d’avoir plus de données et de recul pour confirmer la tendance. Et c’est précisément ce que l’ONU a fait aujourd’hui.
L’institution explique que grâce au bannissement de 99 % de composés destructeurs d’ozone, la couche est désormais sur la voie de la guérison complète. Si les protocoles actuels sont maintenus, elle devrait revenir à son niveau de 1980 (avant l’apparition du trou) d’ici 40 ans en Antarctique, d’ici 20 ans au-dessus de l’Arctique et d’ici une quinzaine d’années dans le reste du monde.
Un véritable cas d’école dont il faut s’inspirer
La conclusion est donc claire : le problème de la couche d’ozone sera bientôt de l’histoire ancienne. Une réussite historique donc l’humanité peut se féliciter. Mais au-delà de l’aspect technique et scientifique, c’est aussi une réussite éminemment symbolique qui doit servir d’exemple. Les terriens se sont serré les coudes pour en finir avec une menace existentielle de premier ordre, et c’est assez rare pour être souligné.
Mais malgré ce succès réjouissant, force est de constater qu’aujourd’hui, les décideurs politiques n’affichent plus le même enthousiasme lorsqu’il s’agit du climat. Des institutions comme le GIEC nous rappellent régulièrement que la situation est déjà catastrophique, et que cela ne va faire qu’empirer (voir notre article). Et pourtant, malgré des progrès sur des thématiques comme les énergies renouvelables, le tableau reste particulièrement sombre.
Or, l’histoire de la couche d’ozone est la preuve indiscutable que lorsqu’une urgence bien réelle est identifiée, les humains savent se donner les moyens d’y répondre. Certes, le problème des émissions de gaz à effet de serre est un tout autre animal, et il sera nettement plus difficile à dompter ; mais l’urgence est indiscutable, et il faut donc espérer que la classe politique saura s’inspirer de ce succès pour prendre le taureau par les cornes une bonne fois pour toutes.
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