La fin de l’année approche, et pour tous les amoureux de jeux vidéo, c’est l’heure du grand débat habituel : quel titre mérite le titre prestigieux de meilleur jeu de l’année 2022 ? Cette année, deux prétendants se détachaient nettement du peloton aux Game Awards : Elden Ring, de FromSoftware, et God of War : Ragnarok, de Santa Monica Studios. C’est la pépite signée Hidetaka Miyazaki qui s’est imposée; voici quelques points qui peuvent expliquer cette vicoire méritée.
Parce qu’il faut récompenser la prise de risque
Avec Elden Ring, Miyazaki et ses troupes se sont imposé un chantier absolument monumental. Rappelons que ce titre hérite directement du patrimoine génétique de la série Dark Souls. Il s’agit d’une franchise clivante, en grande partie à cause de ses mécaniques exigeantes qui ont rapidement fait prendre la fuite à certains joueurs.
Au fil des 3 épisodes (4 en comptant Demon’s Souls), FromSoftware a peaufiné sa recette et maîtrise désormais parfaitement son sujet. Ce n’est pas pour rien si l’on parle désormais de « souls-like » ; pour les amateurs du genre, c’est une recette qui propose des saveurs qu’on ne retrouve nulle part ailleurs dans le monde du jeu vidéo. Cela a permis au studio de se construire une fanbase extrêmement dévouée qui continue encore de faire vivre tous les titres de la franchise aujourd’hui.
Miyazaki aurait donc aisément pu continuer à faire ce qu’il fait de mieux en enchaînant avec un Dark Souls 4 immédiatement. Mais à la place, il a opté pour un grand écart spectaculaire : terminée, l’architecture à base de séquences linéaires savamment interconnectées qui a fonctionné à la perfection depuis plus de dix ans. Avec Elden Ring, le studio a proposé un monde ouvert immense, ce qui implique de repenser complètement l’expérience.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la mayonnaise a pris. Elden Ring, c’est bien plus qu’un simple Dark Souls en monde ouvert ; FromSoft a réussi à transcender son propre concept en mettant ce monde ouvert au service d’une expérience intense et particulièrement immersive. À ce titre, l’Entre-Terre est plus qu’une carte ouverte ; c’est le symbole d’une expérience de jeu transcendée.
Même si les mécaniques en elle-même sont assez similaires, il s’agit donc d’un changement de philosophie assez profond… et cela représente un risque considérable. Car en modifiant aussi radicalement sa formule, FromSoftware aurait aussi pu se vautrer de tout son long ; et dans l’univers impitoyable du jeu vidéo, cela peut se payer très cher.
Développer un jeu de calibre AAA est un projet pharaonique qui coûte un argent monstrueux ; l’épuisement d’un concept peut forcer des studios entiers à mettre la clé sous la porte (Lionhead, THQ…). Dans ce contexte, de nombreux studios optent systématiquement pour la continuité. Et on comprend aisément pourquoi ils ne cherchent pas forcément à se réinventer ; pourquoi modifier un concept qui marche déjà très bien et rapporte gros à chaque nouvelle sortie sans trop d’efforts (comme la licence FIFA, pour ne pas la nommer) ?
C’est une démarche financièrement pragmatique, mais aussi, il faut bien l’avouer, terriblement frileuse artistiquement et techniquement. Si le paysage AAA a tendance à devenir un tantinet moribond, c’est en grande partie à cause de cette aversion pour le risque que certains préféreront qualifier de manque d’ambition. Or, si l’on peut tout de même adresser certains reproches légitimes à Elden Ring, il faudrait faire preuve d’une mauvaise foi immense pour l’accuser .
Miyazaki a choisi en son âme et conscience de s’écarter significativement de la formule des Dark Souls.
Avec ce choix de design audacieux, FromSoftware a joué gros, car son succès repose en grande partie sur cette fanbase extrêmement dévouée — et la décevoir aurait pu être lourd de conséquences. Mais au bout du compte, le contrat a été honoré. Lorsqu’un grand studio prend le pari de se réinventer de cette manière et qu’il s’en sort avec les honneurs, ça mérite bien quelques louanges. Et si ce succès peut convaincre certains concurrents de sortir de leur zone de confort, l’héritage d’Elden Ring n’en sera que plus important !
Parce que la direction artistique est incomparable
C’est bien connu, il ne faut pas juger un livre à sa couverture — mais quand elle est aussi exceptionnelle que celle d’Elden Ring, cela mérite qu’on s’attarde dessus ; artistiquement, le jeu est une véritable merveille qui n’a que très peu d’équivalents dans le paysage vidéoludique. Hidetaka Miyazaki n’a pas volé sa palme de la meilleure réalisation.
Et le choix de mots est important ici. Car s’il s’agit bien d’un jeu de très bonne facture d’un point de vue strictement technique, il y a certains titres qui font encore un peu mieux dans la gestion de la lumière, la qualité des textures, et ainsi de suite. Par contre, en termes de vision artistique, le dernier-né de FromSoftware est incontestablement une pépite.
À ce titre, Elden Ring est le digne héritier de l’illustre saga Dark Souls. Dès Demon Souls, la bande à Miyazaki a posé des fondations artistiques sur lesquelles elle n’a cessé de construire depuis. Tout en restant dans une certaine continuité, le style des décors, des équipements et des ennemis s’est affirmé au fil des épisodes, jusqu’à atteindre une sorte de maturité avec Dark Souls 3.
Elden Ring, de son côté, revendique fièrement cet héritage artistique. Mais il prend aussi soigneusement ses distances sur certains points clés afin de marquer son identité propre. On peut d’ailleurs dresser un parallèle intéressant avec le passage au monde ouvert ; la direction artistique a été décloisonnée de la même façon que le gameplay. Là où les Dark Souls étaient essentiellement… eh bien, sombres (c’est comme le port-salut), Elden Ring étend le champ des possibles en introduisant une sorte de clair-obscur nuancé et déclinable à l’infini.
On se retrouve donc avec un titre à l’identité forte et affirmée ; il réussit à esquiver habilement presque tous les poncifs du genre, ou joue intelligemment avec lorsque c’est inévitable. Et au bout du compte, presque tous les éléments du jeu sont assez mémorables.
Cela commence par les éléments fonctionnels comme les armes, les sorts et les équipements, qui sont extrêmement variés et souvent intéressants. En bon héritier des Dark Souls, les PNJ occupent également une place très importante. Ils sont relativement rares, ce qui les rend d’autant plus marquants en plus de mettre en valeur les efforts d’écriture de From Software.
Nous pourrions tergiverser pendant des heures sur ces points, mais passons plutôt aux deux derniers qui illustrent encore mieux la qualité sensationnelle de la direction artistique. Le premier, c’est l’univers, symbolisé par le fameux Elden Tree qui domine le paysage. C’était l’élément visuel choc qui a marqué tout le monde à la sortie des premiers trailers.
Il représente parfaitement cette dimension clair-obscur dont nous parlions plus haut, et qui a été déclinée avec intelligence et subtilité dans presque toutes les zones du jeu. Certes, la carte en elle-même n’est peut-être pas aussi vivante que celle de RDR2, par exemple. Mais chaque portion a une véritable âme, une histoire travaillée, et il n’y a pas la moindre zone prétexte dans ce monde immense ; rien n’a été négligé, et il est évident que chaque recoin a fait l’objet d’un véritable processus de réflexion et de création à part entière.
Ces réflexions valent aussi pour la principale attraction du jeu, à savoir les ennemis. Elden Ring était attendu au tournant à ce niveau, sachant que la franchise Dark Souls a produit certains adversaires parmi les plus mémorables de l’histoire du jeu vidéo. Et le contrat a été honoré avec brio.
Le dernier-né de FromSoftware propose un bestiaire sensationnel, et intégré de façon particulièrement intelligente organique dans l’Entre-Terre. D’affreuses mains de Liurna aux fiers guerriers déchus de Leyndell en passant par les bêtes féroces du Plateau d’Altus, pour ne citer qu’eux, Elden Ring propose des dizaines d’adversaires tous plus artistiquement intéressants que les autres.
Et cela vaut tout particulièrement pour les plus marquants d’entre eux, à savoir les boss. Certains ont été réutilisés à plusieurs reprises, mais tous les designs originaux sont absolument fabuleux en termes de modélisation 3D, d’animation et de lore.
Avec Elden Ring, Miyazaki et ses troupes ont produit certains des méchants les plus mémorables de leur histoire ; le titre comporte une belle brochette de boss qui méritent tous leur place au panthéon de FromSoftware, aux côtés de Gwynn, Ornstein & Smough, Artorias et consorts. On peut citer des champions comme l’affreux Margit qui a traumatisé bon nombre de néophytes, le vénérable Radagon qui attend les joueurs au terme de leur quête, ou encore l’impitoyable Malenia qui a humilié des hordes de vaillants guerriers.
Mettez tous ces éléments bout à bout (et tous les autres que nous n’aurons pas le temps d’aborder dans cet article), et vous obtenez une direction artistique d’une qualité tout simplement exceptionnelle qui méritait absolument d’être primée.
Parce qu’on en parlera encore dans dix ans
Un jeu n’a pas absolument besoin de s’inscrire dans la durée pour prétendre au titre de jeu de l’année. S’il est suffisamment bon, il peut tout à fait séduire son public même avec une rejouabilité négligeable. Mais dans l’absolu, la rejouabilité reste un facteur assez important. Les titres qui affichent la durée de vie la plus importante ont plus de chances d’être réexplorés par de nombreux joueurs au fil des années, et si le gameplay en vaut la peine, ils sont donc plus susceptibles de rester dans les mémoires.
Et à ce niveau, la franchise Dark Souls est une véritable référence. Des tas de forcenés continuent d’écumer inlassablement ses interminables couloirs jonchés d’ennemis impitoyables. Certains le font simplement par amour du jeu, et savourent le fait de maîtriser chaque affrontement à la perfection. De l’autre côté du spectre, les speedrunners se livrent une compétition féroce pour tenter de finir le jeu le plus vite possible.
Elden Ring est déjà parti pour marcher dans les pas de ses illustres prédécesseurs. Entre les différentes fins, la multitude de chemins possibles et la quantité ahurissante d’équipements et de sorts, il est possible de finir le jeu un nombre incalculable de fois avec des expériences de jeu radicalement différentes. Cette liberté peut amener une certaine confusion pour les amateurs de jeux linéaires ; mais pour tout le reste, c’est une source de divertissement intarissable qui sera toujours d’actualité dans plusieurs années.
Et cela vaut aussi pour les speedrunners. Même si le jeu a déjà été parcouru en long, en large et en travers, il ne fait aucun doute que certaines surprises signées Miyazaki ne montreront pas le bout de leur nez avant un certain temps. Si vous en doutez, il suffit de se repencher encore une fois sur le cas de Dark Souls 1. aujourd’hui encore, plus de dix ans après la sortie de l’opus original, certains joueurs continuent de trouver de nouvelles stratégies et de faire tomber des records. Autant dire que vous allez probablement entendre parler d’Elden Ring pendant quelque temps. Et même si ce n’est pas un prérequis absolu pour l’emporter, c’est tout de même un argument de poids dans al course au jeu de l’année.
Parce que les jeux moins codifiés méritent aussi de gagner
À la sortie, comme souvent avec FromSoftware, les réactions n’ont pas été unanimes — la faute à un concept plutôt clivant. Miyazaki a toujours refusé de prendre le joueur par la main. Les « tutoriels », par exemple, sont généralement minimalistes à l’extrême ; pour découvrir les mécaniques, il n’y a pas d’autre choix que d’expérimenter, de prendre une belle peignée, puis de recommencer. Idem pour l’exploration ; si les niveaux cloisonnés des Dark Souls avaient au moins k’avantage de guider un peu le joueur, il est plus ou moins livré à lui-même dans les grands espaces de l’Entre-Terre.
Et cela concerne aussi la narration. Là où la plupart des jeux prennent la peine de présenter leurs personnages, leurs hauts lieux et leurs différents arcs narratifs, Elden Ring a fait le choix de saborder toute la narration artificielle ; pour découvrir la lore du jeu, il faut prendre son temps pour explorer des zones cachées, lire les dialogues cryptiques des pnj, décortiquer les descriptions d’objets rares, et jouer aux devinettes à partir de ces bribes d’information ; une démarche assez organique qui rajoute une couche d’investigation omniprésente et très intéressante.
En revanche, ceux qui se contentent de faire défiler tous les menus à vitesse grand V risquent de sacrifier une part significative de l’immersion ; on comprend facilement pourquoi certains joueurs pensaient que la lore d’Elden Ring était tout simplement inexistante.
Une partie du public interprète cela comme une forme de fainéantise scénaristique de la part d’un studio qui ne se concentrerait que sur ses célèbres boss. Mais c’est en fait une vraie méthode de narration, légitime et pertinente, que FromSoftware assume sans trembler du menton. Cette philosophie rend-elle le jeu plus difficile à aborder qu’un autre titre où la narration est brillamment servie au fil du récit à travers différentes interactions et cinématiques ? Assurément. Mais en même temps, c’est aussi une décision parfaitement cohérente avec l’approche globale du studio.
Au final, Elden Ring, c’est l’aboutissement d’un concept ; FromSoftware rappelle une nouvelle fois qu’il est possible de développer un futur jeu de l’année sans se reposer su les mêmes bases que la plupart des blockbusters modernes, qui sont pour la plupart assez codifiés. Elden Ring, c’est finalement une expérience assez difficile à décrire, qu’on y adhère ou pas, et c’est de plus en plus rare dans le monde de plus en plus formaté du jeu AAA. Lorsqu’un titre aussi abouti sort à ce point des sentiers battus, il convient de saluer… et un titre de jeu de l’année est une excellente façon de le faire !
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Redac de JDG: “Pourquoi God of War Ragnarök est forcément le jeu de l’année”
…
Epic cringe
Bonjour @DS,
Juste une précision : l’article auquel vous faites référence fait partie d’une double publication (avec celle-ci, qui était initialement titrée “Pourquoi Elden Ring est forcément le jeu de l’année”) ! L’objectif était de présenter (avec un zeste de subjectivité assumée, d’où le titre) des arguments qui expliquent en quoi ces deux jeux auraient tous les deux mérité la palme; rien de cringe dans le fait de se prêter au jeu ! Le titre de ce volet a simplement été mis à jour pour refléter la victoire du jeu de FromSoftware, mais cela n’enlève rien aux qualités intrinsèques de God of War Ragnarök, qui ont été très bien mises en avant par ma collègue Elisa.
Cordialement et en vous remerciant de votre lecture,
Aucune logique entre les article, du vrai professionnalisme ca. C’est pour des trucs comme ca que la presse est tant aimé depuis tt ces années. Et ca essaie en plus de se justifier.
Lis le commentaire laissé par l’un des membres de la rédaction au lieu de faire ta Karen @Xehanort57
elden ring jeu de l’année 2022 ?
franchement non !!
quand tu sais qu’il faut faire du framing de runes (et pas qu’un peu) pour monter ton perso en xp c’est nul !! ça casse tout le jeu !!
je suis lvl 100 et pour monter d’ un lvl il faut quasiment une heure a Farmer !! et quand tu vois le gain sur ton perso c’est pinuts ! c’est ennuyeux a mourir et ça gâche le coté exploration….
ça m’étonnerais j’aille au bout du jeu !! c’est une grande déception !!!
et je ne parle pas de la pléthore de bonus que tu gagne, et qui ne servent en faite a rien…..