Dans un communiqué repéré par Interesting Engineering, des chercheurs du prestigieux Massachusetts Institute of technology (MIT) ont présenté leurs derniers progrès : ils ont imaginé un robot capable d’assembler n’importe quel type de structure — y compris d’autres robots !
L’intégralité de ce concept fascinant repose sur un concept à la mode en ce moment : la modularité. L’idée, c’est d’utiliser de nombreux exemplaires d’un élément de base (on parle de voxels, la déclinaison 3D des pixels) qui peuvent être assemblés les uns avec les autres pour construire quelque chose de beaucoup plus complexe — un peu comme des LEGO, en somme.
C’est un concept populaire chez les équipes du MIT, qui ont déjà proposé des tas de constructions modulaires très intéressantes. En 2016, ils ont par exemple dévoilé une aile d’avion fonctionnelle, flexible et résistante construite uniquement à partir de petites pièces identiques.
Désormais, ils sont passés à la vitesse supérieure ; ils ont largement amélioré les voxels en eux-mêmes, et surtout, ils ont montré qu’il est aussi possible de construire un robot constructeur à partir des mêmes sous-unités. Auparavant, ces dernières n’étaient que des pièces purement structurelles ; mais cette nouvelle version est aussi capable de transmettre un courant électrique et des données d’un nœud à l’autre.
Un robot autonome et modulaire capable de se “cloner”
Cela débloque un nombre de possibilités prodigieux. Et le premier à en bénéficier, c’est ce fameux nouveau robot assembleur. Il se présente comme une sorte de serpent constitué de quelques voxels joints et articulés. Chaque extrémité est munie d’un manipulateur qui permet de saisir un voxel, soit pour le déplacer, soit pour s’en servir comme point d’ancrage temporaire. Il peut ainsi se déplacer le long de la grille pour y ajouter de nouveaux éléments, et ainsi construire une structure entière voxel par voxel.
Sur le papier, on peut imaginer qu’un tel robot pourrait construire des structures immenses. Mais il y a un hic. Plus la taille du chantier augmente, plus l’engin perd en efficacité, car il doit emprunter un chemin de plus en plus long pour aller récupérer, puis installer de nouveaux voxels. Et c’est là que la modularité du robot devient très importante. Pour contourner cet obstacle, il pourrait tout simplement… assembler un autre robot identique à lui-même. Et si cela ne suffit pas, qu’à cela ne tienne : il n’y a qu’à répéter l’opération avec les deux clones !
Un gigantesque éventail de possibilités
En théorie, on pourrait donc partir d’un seul robot, puis lui indiquer de s’auto-répliquer à loisir dès que la situation l’exige. Cela pourrait permettre de multiplier la vitesse de construction, mais ce n’est pas tout ; différents robots pourraient même collaborer pour assembler les parties les plus complexes de la structure.
L’autre avantage de cette approche modulaire, c’est que la forme du robot en lui-même n’est pas gravée dans la roche ; si besoin, le robot pourrait aussi construire une version bien plus volumineuse de lui-même. Celle-ci pourrait assembler le gros de la structure. Pendant ce temps, les plus petits engins se chargeraient des éléments plus petits et des finitions. Et conceptuellement, ce processeur pourrait être répliqué à l’infini, avec des robots de plus en plus grands, au fur et à mesure que la taille de la structure augmente.
Et d’après les auteurs du communiqué, les ingénieurs ne sont plus très loin d’en arriver à cette étape. « Nous sommes presque — mais pas encore tout à fait — arrivés au point où un de ces robots peut en construire un autre puis s’en aller », explique Neil Gershenfeld, qui a supervisé ces travaux.
Mais pour le moment, il ne s’agit encore que d’une preuve de concept. « Un robot entièrement autonome, capable de s’auto-répliquer pour assembler de larges structures n’arrivera pas avant des années », précise Gershenfeld.
Des limites physiques et surtout algorithmiques
La première limite concerne les voxels en eux-mêmes. Cette nouvelle version est certes capable de transmettre l’électricité et les données; mais cela a aussi un impact négatif sur la résistance globale de la structure. Les chercheurs vont donc devoir trouver un moyen de les fixer plus solidement. Mais ils sont très confiants sur ce point ; ce n’est probablement qu’une question de temps avant que cet obstacle soit contourné.
À ce stade, il restera encore un problème à résoudre, et pas des moindres : la planification de la construction. Car c’est une chose de produire un robot constructeur ; c’en est une autre de le faire fonctionner en autonomie.
Pour construire une grande structure dans un temps raisonnable, il ne suffit pas de savoir où placer le prochain bloc ; il faut aussi optimiser tout le trajet de l’engin. C’est un problème déjà très étudié dans d’autres contextes. Selon les auteurs, il existe déjà des « milliers » de publications scientifiques qui se sont penchées sur la planification des itinéraires des robots.
Mais avec des robots capables de s’auto-répliquer, la situation est nettement plus complexe, et il n’existe pas encore d’études sur ce sujet. Tout reste donc à inventer, et c’est ce à quoi les chercheurs du MIT travaillent en ce moment.
En premier lieu, il faudra que le robot soit capable de déterminer à partir de quand il doit s’auto-répliquer pour déléguer une partie de sa tâche. Les différents robots devront ensuite se coordonner entre eux en temps réel, puisque leur nombre peut évoluer en permanence. Ils devront aussi déterminer le rôle de chaque taille de robot dans cette organisation. Enfin, il faudra ajuster leurs itinéraires respectifs en conséquence. Une tâche extrêmement complexe d’un point de vue algorithmique.
Pour mettre en place un tel système, les chercheurs pourront éventuellement s’appuyer sur le machine learning ; l’intelligence artificielle a déjà prouvé à maintes reprises qu’elle pouvait faire des merveilles dans ce genre de situations. En revanche, il est assez difficile de déterminer d’ici combien de temps cette technologie pourrait arriver à maturité.
Un potentiel virtuellement infini
Mais cela ne suffira pas à décourager les chercheurs du MIT. Car malgré cette zone d’ombre, cette technologie affiche un potentiel tout simplement ahurissant dans des tas de domaines de l’industrie.
Les auteurs citent par exemple l’aéronautique. Pour construire un avion, il faut aussi construire des tas d’usines spécialisées ; mais avec un système de ce genre, chaque élément pourrait être produit sur un site unique, sans multiplier les étapes. Un bénéfice énorme en termes logistiques.
Gershenfeld cite aussi l’industrie automobile. « Vous pouvez facilement passer un an sur l’outillage avant que la première voiture ne soit produite », explique-t-il. Un escadron de robots autonomes permettrait de contourner entièrement ce processus.
Et il ne s’agit que d’exemples isolés. On peut aussi imaginer des tas d’applications dans l’aérospatiale, ou même sur des chantiers de construction plus classiques. Cela impliquerait certainement d’adapter les matériaux des voxels. Mais le cas échéant, on peut tout à fait imaginer que cette technologie permettra de construire des barrages, des digues, ou d’autres grands bâtiments.
Et puisque ces robots sont prévus pour être autonomes, ils pourraient aider les humains à construire dans des espaces particulièrement difficiles d’accès. On pense notamment aux profondeurs des océans ou à l’espace ; les stations spatiales et colonies interplanétaires de demain seront peut-être construites par des essaims de petits robots.
En poussant l’extrapolation encore plus loin, on peut même faire le lien avec la science-fiction, où ce concept a déjà été exploré à maintes reprises ; ces engins pourraient par exemple servir à construire une sphère de Dyson, une mégastructure placée autour du soleil pour en collecter l’énergie.
En plus de ce tour de passe-passe narratif, on peut aussi citer les divagations du brillant mathématicien John Von Neumann ; il a imaginé qu’une espèce très avancée pourrait produire des vaisseaux spatiaux auto-réplicatifs afin d’explorer de larges portions du cosmos.
Il conviendra donc de suivre l’avancement de ces travaux avec une attention toute particulière. Car même si ce concept aura encore besoin de temps pour se développer, une fois mature, ces essaims de robots pourraient véritablement révolutionner de nombreuses industries.
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Moquais, dans Stargate ça ce n’est pas trop bien passé avec une technologie similaire. 😅😜
J’avais pensé à la même chose. Le début de l’ère des réplicateurs 😅