À son arrivée aux commandes de Twitter, Elon Musk a lancé de grands travaux avec l’objectif de transformer complètement le réseau social. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que tout ne s’est pas passé comme prévu. Entre les licenciements en pagaille sur fond de galère économique et les nombreuses polémiques autour de la nouvelle philosophie de l’oiseau bleu, le sulfureux milliardaire a été forcé de revoir ses plans ; il a notamment annoncé hier que la fameuse coche bleue de la discorde ne reviendrait pas de sitôt.
Cette décision ne surprendra probablement pas les observateurs habitués aux frasques du trublion de la big tech. Ces dernières années, il s’est régulièrement distingué par son tempérament de fonceur. Ce trait de personnalité a eu un impact très important sur les trajectoires de ses entreprises ; c’est en grande partie grâce à son goût prononcé pour les changements radicaux que SpaceX et Tesla sont aujourd’hui les leaders incontestés de leurs niches respectives.
La coche bleue payante au cœur du débat
Mais c’est aussi une philosophie par définition risquée qui ouvre la porte à de nombreux accidents de parcours; et ça s’est encore vérifié peu après son arrivée à la tête de Twitter. L’une de ses premières décisions a été de déployer un nouveau système qui permet à n’importe qui de s’octroyer la fameuse coche bleue, à l’origine censée servir de marque de légitimité, à condition de s’acquitter d’un petit paiement mensuel.
Avec cette décision pour le moins curieuse qui a fait pousser des cris d’orfraie à de nombreux observateurs, Elon Musk espérait remplir les caisses de l’entreprise, qui est en ce moment victime d’une véritable hémorragie financière. Mais en déployant trop tôt cette fonctionnalité encore loin d’être mature, Twitter s’est créé un nouveau problème qui s’est rapidement révélé plus grave que prévu.
Des usurpations d’identité en pagaille
De très nombreux utilisateurs se sont empressés d’abuser de ce nouveau système ; en quelques heures à peine, des tas de comptes parodiques (pour ne pas dire frauduleux) qui se faisaient passer pour des célébrités ou des institutions sont apparus, tous dotés de la fameuse marque bleue. Qui l’eût cru…
Le plus souvent, il s’agissait de blagues relativement bon enfant qui cherchaient surtout à pointer du doigt les limites de cette nouvelle formule. Mais en pratique, cela a généré un chaos sans précédent sur la plateforme. On peut par exemple citer un faux compte d’une grande marque de soda qui vantait les mérites de son rival historique, ou cette image de Mario en train de réaliser un geste obscène (voir notre article ci-dessous).
La réaction initiale des équipes techniques a été de bannir directement tous ces comptes; il est désormais obligatoire pour les comptes parodique de l’indiquer explicitement. Mais cela n’a pas empêché la situation d’avoir des conséquences très concrètes. On peut citer l’exemple du groupe pharmaceutique américain Eli Lily. Elle a connu une chute vertigineuse de sa capitalisation boursière après qu’un compte parodique ait annoncé que l’insuline serait désormais gratuite.
Did Twitter Blue tweet just cost Eli Lilly $LLY billions?
Yes. pic.twitter.com/w4RtJwgCVK
— Rafael Shimunov (@rafaelshimunov) November 11, 2022
Twitter prend son temps pour trouver une parade
Hier, Musk a donc décidé de mettre le holà en annonçant la suspension temporaire de l’abonnement Twitter Blue. D’après un enregistrement de ses propos obtenu par The Verge, cela continuera un certain temps. Le sigle ne reviendra pas avant que les ingénieurs aient trouvé une manière viable d’empêcher ces usurpations d’identité.
Pour l’instant, le plan serait de rétablir cette fonctionnalité à la fin du mois, le 29 novembre. Mais en l’état, personne ne semble savoir exactement si ce délai est réaliste ou non. « Nous pourrions le lancer la semaine prochaine. Peut-être que non. Mais nous ne le relancerons pas avant d’avoir pleinement confiance dans notre capacité à protéger les usagers des usurpations d’identité significatives », aurait déclaré Musk selon la même source. Un éclair de lucidité décidément bien tardif, alors que de très nombreux observateurs semblaient pourtant avoir anticipé ces dérives…
Reste à savoir comment le noyau dur d’irréductibles développeurs qui a échappé aux licenciements de masse compte s’y prendre. Musk semble avoir un début de réponse ; peu après que ces informations aient été rendues publiques, il a précisé que Twitter « utiliserait probablement des marques de différentes couleurs » pour distinguer les différents types d’usagers. Une idée déjà suggérée par de nombreux utilisateurs; mais cela restera largement insuffisant pour régler le fond du problème.
Il ne reste donc plus qu’à attendre le prochain épisode de ce feuilleton sans queue ni tête. Et si l’on se base sur le début de la saison, on peut encore s’attendre à quelques rebondissements spectaculaires dans un futur proche.
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